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Louis XIV Jacobites
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Récit de l’installation du roi et de la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 280] Le 21 au matin, jour de S. Thomas, le bastiment qui portoit la reine d’Angleterre arriva à Calais, après [p. 281] avoir couru risque de faire naufrage au port, puisqu’il s’en fallut peu qu'il ne touchait un banc qui en estoit à dix pas ; mais le maistre du paquetbot qui se trouva là fort à propos luy servit de guide, et empefcha par là ce malheur. Après que la reine fut debarquée, le capitaine du yacht dit qu'il sçavoit bien qu'il menoit cette princesse et le pince de Galles, et qu'il l'avoit toujours reconnu. Elle ne voulut point que M. le duc de Charost luy fist rendre aucuns [p. 282] honneurs à Calais. […] [p. 283] Comme la reine [p. 284] devoit faire quelque sejour à Bouligne jusqu’à ce qu’on eust receu des nouvelles de la Cour, elle demanda d’estre logée au convent des Ursulines mais, M. le duc d‘Aumont ayant fait preparer l’appartement de madame la duchesse sa femme, elle ne put le refuser. […] [p. 284] Cependant, le Roi ayant sceu que cette princesse estoit arrivé en [p. 288] France, ce monarque qui a toujours esté l’appuy des malheureux et l’azil des opprimez en ressentit une joye proportionnée au triste etat ou il scavoit qu’elle se trouvoit. […] [p. 321] La nouvelle de l’arrivée du roy d’Angleterre à Ambleteuse ayant esté receue à Versailles, M. le marquis de Beringhen l’apprit à Beaumont par un courrier que le [p. 322] Roy lui depescha. […] [p. 328] M. le Premier, après s’etre acquité de sa commission auprès de la reyne d’Angleterre, qu’il auroit conduite jusqu’à Saint Germain sans les nouveaux ordres qu’il receut, ne songea plus qu’à partir la nuit mesme pour aller au devant de Sa Majesté britannique. […]
[p. 329] Le 6, cette princesse partit de Beaumont pour se rendre à Saint Germain en Laye, dont le Roy avoit fait meubler le chasteau pour la loger. Il avoit d’abord fait preparer celuy de Vincennes, [p. 330] mais Sa Majesté croyant l’air de Saint Germain meilleur pour la santé du jeune prince, et ce chasteau plus commode pour voir la reyne plus souvent, avoit changé de dessein.
Le Roy partit le mesme jour de Versailles pour aller au devant de cette princesse. Il estoit accompagné de monseigneur le Dauphin, de Monsieur et des princes et principaux seigneurs de la Cour. Il s’avança jusques auprès de Chatou, et les gardes du corps, les gendarmes, [p. 331] les chevaux legers et les deux compagnies de mousquetaires s’etendoient dans la plaine depuis le pont du Pec jusqu’à ce village. Quoyque leurs habits ordinaires soient assez riches et que le tout ensemble produise un effet fort éclatant, chacun s’estoit efforcé ce jour là de se mettre proprement et l’on peut dire que tous les officiers estoient magnifiquement vestus. Le carosse de Sa Majesté et celuy où estoit la reyne d’Angleterre ayant paru, chacun descendit du [p. 332] sien, dans le mesme temps, et le Roy et cette reyne se saluerent. Le Roy luy presenta monseigneur le Dauphin et Monsieur, et la remit ensuite dans le mesme carosse, où estant aussitost monté il se plaça à sa gauche, et monseigneur le Dauphin et Monsieur se mirent sur le devant. Lorsqu’on fut arrivé à Saint Germain, le Roy conduisit la reyne dans l’apartement qui luy avoit esté preparé. Il demeura quelque temps en public avec elle, et luy presenta monsieur le [p. 333] Prince, monsieur le Duc et monsieur le prince de Conty. Le Roy, en prenant congé de cette princesse, luy dit « qu’il alloit voir le prince de Galles pour apprendre s’il n’estoit point fatigué du voyage ». La reyne voulut l’y accompagner et lui dit « qu’elle avoit esté ravie qu’il ne fust pas en age de connoistre ses malheurs, mais qu’à present elle estoit bien fachée qu’il ne fust pas en etat de reconnoistre l’obligation qu’il luy avoit ». Le Roy revint ensuite à Versailles et laissa cette princesse dans [p. 334] l’admiration de ses manieres toutes engageantes et qui, avec le brillant de la majesté, laissent paroistre un air tout affable qu’il seroit difficile d’exprimer. Ce monarque de son costé trouva beaucoup d’esprit et de grandeur d’ame dans cette princesse. Elle a l’air noble ; toute penetrée qu’elle est de sa douleur, elle n’en paroist point embarassée. Elle sent bien ce qu’elle est et quoy qu’elle soit fort honneste, elle scait placer ses honnestez selon les gens et est tout à fait maitresse d’elle mesme.
[…]
[p. 359] Le roy d’Angleterre […] monta à Clermont dans le carosse du Roy que M. le Premier avoit [p. 360] au voyage en allant au devant de la reine et qu’on y avoit fait venir de Beauvais toute la nuit. M. le Premier et M. le duc de Bervick entrerent dans ce carosse avec Sa Majesté, qui alla ainsi jusqu’à Saint Germain en Laye, avec des attelages du Roy qu’on avoit mis en relais. Tout Saint Denis estoit remply du peuple de Paris, qui marqua sa joye par ses acclamations lorsqu’il vit arriver Sa Majesté britannique, ce qui acheva de faire connoiste qu’il n’y a point de peuple au monde si fidelle [p. 361] et si zelé que celuy de France, ny qui se plaise davantage à entrer dans tous les sentimens de son Roy. Tout se trouva remply de peuple, de carosses pleins de personnes de qualité et de cavaliers depuis Paris jusqu’à Saint Denis, et ce prince n’entendit que des acclamations, et ne vit que de la joye sur tous les visages.
Sa Majesté receut ce monarque au milieu de la salle des gardes de Saint Germain. La joye qu’ils eurent de se voir parut dans leurs embrassades, qui furent reiterées [p. 362] plusieurs fois. Leurs complimens estant finis, le Roy mena Sa Majesté britannique dans la chambre de la reine son epouse, qui estoit au lit, et apres y avoir demeuré quelque temps et l’avoir aussi mené chez le prince de Galles, il s’en retourna à Versailles.
Le 8, le roy d’Angleterre vint l’apres dinée à Versailles rendre visite à Sa Majesté, ayant dans son carosse M. le duc de Bervick, M. le Premier et M. de Lausun. Le Roy le receut à la porte de [p. 363] la salle des gardes et le conduisit dans son petit salon, puis dans son cabinet, où ils demeurerent seuls pendant plus d’une heure et demie. Sa Majesté le conduisit ensuite par la grande galerie à l’appartement de madame la Dauphine, qui l’attendoit dans sa chambre avec un fort grand nombre de dames. Cette princesse estant avertie qu’il venoit par la galerie, s’approcha environ à trois pas de la porte. Le roy d’Angleterre entra, accompagné du [p. 364] Roy, de monseigneur le Dauphin et d’une très grande quantité de seigneurs de la Cour. Il baisa madame la Dauphine des deux costez et ensuite Madame qui s’y trouva. Il baisa après monseigneur le duc de Bourgogne, monseigneur le duc d’Anjou et monseigneur le duc de Berry qui accompagnoient tous trois madame la Dauphine. On ne fut point assis. Madame la Dauphine estoit du costé de la balustrade et, le Roy donnant toujours la droite au roy d’Angleterre, [p. 365] estoit avec Monseigneur du costé des fenestres. La conversation dura un quart d’heure. Ce monarque prit congé pour aller chez Monseigneur, qui un moment auparavant estoit sorty de chez madame la Dauphine, pour l’aller attendre dans son appartement. Le Roy accompagna ce monarque en sortant jusqu’au haut du grand degré. Monseigneur le receut à la porte de la salle de ses gardes, et le roy fit tomber la conversation sur la campagne de ce jeune prince, [p. 366] à qui il donna les louanges qui luy sont dues, mais il luy dit ensuite « qu’il s’estoit trop exposé et qu’à l’avenir il devoit se menager davantage ». Monseigneur lui repondit, avec beaucoup de presence d’esprit, « qu’estant duc d’York il ne s’estoit pas moins exposé lorsqu’il combattoit dans les troupes de France ». Le roy repliqua « qu’il n’estoit alors qu’un malheureux aventurier mais que comme il seroit presentement le plus ancien lieutenant general s’il avoit continué, il croyoit que le Roy le [p. 367] feroit marechal de France ». Monseigneur le reconduisit jusqu’au mesme lieu où il avoit esté le recevoir. Il alla ensuite chez Monsieur, qui estant veritablement indisposé, gardoit le lit ce jour là. Comme il estoit assez naturel de parler du prince d’Orange, ce qu’on en dit fit tourner la conversation sur la bataille de Cassel et Monsieur fut loué d’avoir battu un pince si fier et qui ne manquoit ny de hardisse ny de courage. Ce prince repondit là dessus [p. 368] « qu’il voudroit qu’une semblable occasion se presentast encore et qu’il exposeroit volontiers sa vie pour le service du roy d’Angleterre ». Ce monarque alla après cela rendre visite à Madame et s’en retourna à Saint Germain. M. le Premier l’y accompagne et luy dit le soir en prenant congé de luy que la Maison du Roy qu’il avoit menée au devant de la reine avoit ordre de demeurer auprès de Leurs Majestez pour les servir.
Le 9, monseigneur le Dauphin se rendit à Saint [p. 369] Germain et visita Leurs Majestez britanniques.
Le 10, Madame et mademoiselle y allerent aussi, et le 12 les princesses du sang.
Le 13, Monsieur les visita pareillement et sur les deux heures les princes du sang firent les mesmes visites. Le mesme jour, sur les quatre heures du soir, la reine d’Angleterre vint à Versailles. Le Roy, monseigneur le Dauphin et Monsieur la receurent au plus haut du grand escalier. Elle parut se defendre la droite [p. 370] de Sa Majesté. On luy avoit preparé un fauteuil qui estoit à droite de celuy du Roy et elle s’y mit. La conservation dura un quart d’heure et l’esprit de cette princesse se montra aussi brillant qu’il avoit dejà fait. Le Roy luy dit « qu’il estoit surpris de l’entendre si bien parler françois et de de qu’on ne luy remarquoit aucun accent etranger ». Elle repondit « qu’elle s’estoit toujours senti de l’inclination pour la France et que c’estoit de là que venoit la facilité qu’elle avoit eue à apprendre le françois ». [p. 371] Leur conservation étant finie, le Roy la conduisit chez madame la Dauphine, qui l’attendoit dans sa chambre avec un tres grand nombre de dames, qui estoient fort parées. Quand cette princesse fut avertie que la reine venoit par la galerie, elle s’avança jusque dans la porte. La reine la baisa d’un costé et madame la Dauphine, luy donnant la droite, la mena dans son grand cabinet. On y avoit preparé six fauteuils, scavoir pour la reine, madame [p. 372] la Dauphine, les trois jeunes princes et Madame. Celuy de la reine estoit au milieud e la chambre et les autres estoient tournez un peu du costé du fauteuil de cette princesse. Toutes les duchesses furent assises. Madame la duchesse de Powis, gouvernante du prince de Galles, et madame la comtesse de Montecuculi, une des dames d’honneur de la reine, comme estoient icy les dames du Palais, puisqu’elles sont plusieurs et qu’elles servent par semaine, eurent [p. 373] les tabourets. On s’etonnera que je donne icy le nom de duchesse à madame de Powis apres l’avoir apellée plusieurs fois marquise ; la raison de ce changement est que le roy d’Angleterre, depuis son arrivée à Saint Germain, a recompensé le zele de M. de Powis, son marquis, en le faisant duc. La conversation dura une demy heure. On se leva et madame la Dauphine conduisit la reine jusqu’à la porte de son cabinet. Cette princesse alla ensuite chez Monseigneur, qui la receut [p. 375] à la porte de la salle de ses gardes et la reconduisit jusqu’au mesme endroit. Elle alla après chez Monsieur et chez Madame, qui luy firent tous les honneurs dus à une reine. »

Mention du baptême de la fille de Jacques II dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 304] Le Roy et madame ont tenu la princesse d’Angleterre sur les fonts. La ceremonie s’est faite dans la chapelle du vieux chasteau de Saint Germain en Laye, par M. le cardinal de Bouillon, grand aumonier de France. La princesse a esté nommée Louise Marie Elizabeth, qui sont les noms du Roy, de la reine d’Angleterre et de Madame. Sa Majesté vouloit que le nom de Marie fut le premier, parce que c’est ordinairement celuy qui demeure, mais la reine [p. 305] d’Angleterre a fait de si pressantes instances pour engager le Roy à faire que le nom de Louise precedast les deux autres noms, qu’il n’a pu se deffendre d’accorder aux prieres de cette princesse ce qu’elle souhaittoit avec tant d’ardeur. »

Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans les mémoires de Saint-Simon

« [t. 2, p. 37] [1697] La premiere nouvelle qu’on eut de sa signature fut par un aide de camp du marechal de Boufflers qui arriva le dimanche 22 septembre à Fontainebleau, depeché par le marechal, sur ce que l’electeur de Baviere lui avoit mandé que la paix avoit eté signée à Ryswick le vendredi precedent à minuit. […] Le roi et la reine d’Angleterre etoient à Fontainebleau, à qui la reconnoissance du prince d’Orange fut bien amere, [p. 38] mais ils en connoissoient bien la necessité pour avoir la paix, et savoient bien aussi que cet article ne l’etoit guere moins au Roi qu’à eux-mêmes, dont j’expliquerai tout presentement la raison. Ils se consolerent comme ils purent, et parurent meme fort obligés au Roi, qui tint egalement ferme à ne vouloir pas souffrir qu’ils sortissent de France, ni qu’ils quittassent le sejour de Saint Germain. Ces deux points avoient eté vivement demandés, le dernier surtout dans l’impossibilité d’obtenir l’autre, tant à Ryswick que dans les conferences par Portland. Le Roi eut l’attention de dire à Torcy, sur le point de la signature, que si le courrier qui en apporteroit la nouvelle arrivoit, un ou plusieurs, l’un apres l’autre, il ne lui vint point dire s’il etoit alors avec le roi et la reine d’Angleterre, et il defendit aux musiciens de chantier rien qui eut rapport à la paix jusqu’au depart de la cour d’Angleterre.
[…]
[p. 93] [1698] Le roi d’Angleterre etoit au comble de satisfaction de se voir enfin reconnu par le Roi, et paisible sur ce trone ; mais un usurpateur n’est jamais tranquille et content. Il etoit blessé du sejour du roi legitime et de sa famille à Saint Germain. C’etoit trop à portée du Roi et trop pres d’Angleterre [p. 94] pour le laisser sans inquietude. Il avoit fait tous ses efforts, tant à Ryswick que dans les conferences de Portland et du marechal de Boufflers, pour obtenir leur sortie du royaume, tout au moins leur eloignement de la Cour. Il avoit trouvé le Roi inflexible ; il voulut essayer tout, et voir si, n’en faisant plus une condition, puisqu’il avoit passé carriere, et comblant le Roi de prevenances et de respects, il ne pourroit pas obtenir ce fruit par ces souplesses. Dans cette vue, il envoya le duc de Saint Albans, chevalier de la Jarretiere, complimenter le Roi sur le mariage de monseigneur le duc de Bourgogne. Il ne pouvoit choisir un homme plus marqué pour une simple commission ; on fut surpris meme qu’il l’eut acceptée. Il etoit batard de Charles II, frere ainé du roi Jacques II, et c’etoit bien encore là une raison pour Saint Albans de s’en excuser. Il voulut meme pretendre quelques distinctions, mais on tint poliment ferme à ne le traiter que comme un simple envoyé d’Angleterre. Les ducs de ce pays là n’ont aucun rang ici, non plus que ceux d’ici en Angleterre. Le Roi avoit fait la duchesse de Portsmouth et le duc de Richemont, son fils, duc et duchesse à brevet, et accordé un tabouret de grace en passant à la duchesse de Cleveland, maitresse de Charles II, son ami. […]
[p. 95] Des la premiere fois qu’il vit Torcy avant d’aller à Versailles, il lui parla du renvoi, à tout le moins de l’eloignement du roi Jacques et de sa famille. Torcy sagement n’en fit point à deux fois, et lui barra tout de suite la veine. Il lui repondit que ce point, tant de fois proposé dans ses conferences avec le marechal de Boufflers, et sous tant de diverses [p. 96] formes debattu à Ryswick, avoit eté constamment et nettement rejeté partout, que c’etoit une chose reglée et entierement finie, qu’il savoit que le Roi, non seulement ne se laisseroit jamais entamer là-dessus le moins du monde, mais qu’il seroit extremement blessé d’en ouir parler davantage, qu’il pouvoit l’assurer de la disposition du Roi à correspondre en tout, avec toutes sortes de soins, à la liaison qui se formoit entre lui et le roi d’Angleterre, et personnellement à le traiter lui avec toutes sortes de distinctions ; qu’un mot dit par lui sur Saint Germain seroit capable de gater de si utiles dispositions, et de rendre son ambassade triste et languissante ; et que, s’il etoit capable de lui donner un conseil, c’etoit celui de ne rien gater, et de ne pas dire un seul mot au Roi, ni davantage à aucun de ses ministres, sur un point convenu, et sur lequel le Roi avoit pris son parti. Portland le crut, et s’en trouva bien ; mais on verra bientôt que ce ne fut pas sans depit, et le Roi approuva extremement que Torcy lui eut des l’abord fermé la bouche sur cet article. On prit un grand soin de faire en sorte qu’aucun Anglois de Saint Germain ne se trouvat à Versailles ni à Paris, à aucune portée de ceux de l’ambassadeur, et cela fut tres exactement executé. […] [p. 98] Mais parmi tant de fleurs, il ne laissa pas d’essuyer quelques epines, et de sentir la presence du legitime roi d’Angleterre en France. Il etoit allé une autre fois à Meudon pour suivre Monseigneur à la chasse. On alloit partir et Portland se bottoit, lorsque Monseigneur fut averti que le roi d’Angleterre se trouveroit au rendez vous. A l’instant il le manda à Portland, et qu’il le prioit de remettre à une autre fois. Il fallut se debotter et revenir tout de suite à Paris. […] [p. 98] Il etoit grand chasseur. Soit envie de voir faire la meute du Roi, soit surprise de ne recevoir aucune civilité du duc de La Rochefoucauld que la simple reverence lorsqu’ils se rencontroient, il dit et repeta souvent qu’il mouroit d’envie de chasser avec les chiens du Roi. Il le dit tant et devant tant de gens qu’il jugea impossible que cela ne fut revenu à M. de La Rochefoucauld, et cependant sans aucune suite. Lassé de cette obscurité, il la voulut percer, et au sortir d’un lever du Roi aborda franchement le grand veneur, et lui dit son desir. L’autre ne s’en embarrassa point. Il lui repondit assez sechement qu’à la verité il avoit l’honneur d’etre grand veneur, mais qu’il ne disposoit point des chasses, que c’etoit le roi d’Angleterre dont il prenoit les ordre, qu’il y venoit tres souvent mais qu’il ne savoit jamais qu’au moment de partir quand il ne venoit pas au rendez vous, et tout de suite la reverence, et laissa là Portland dans un grand depit, et toutefois sans se pouvoir plaindre. M. de La Rochefoucauld fut le seul grand seigneur distingué de la Cour qui n’approcha jamais Portland. Ce qu’il lui repondit etoit pure generosité pour le roi d’Angleterre. Ce prince, à la verité, disposoit quand il vouloit de la meute du Roi, mais il y avoit bien des temps qu’il ne chassoit point, et jamais à toutes les chasses. Il ne tenoit donc qu’à M. de La Rochefoucauld d’en donner à Portland tant qu’il auroit voulu, à [p. 99] coup sur, mais piqué de la prostitution publique à la vue de la Cour de Saint Germain, il ne put se refuser cette mortification au triomphant ambassadeur de l’usurpateur qui avoit attaché à son char jusqu’à M. de Lauzun, malgré ses engagements et son attachement au roi et à la reine d’Angleterre, et sans y pouvoir gagner que de la honte, pour suivre la mode et faire sa cour au Roi.
Enfin, Portland, comblé en toutes les manieres possibles, se resolut au depart. […] Sur son depart de Paris, il avoit affecté de repandre que tant que le roi Jacques seroit à Saint Germain, la reine d’Angleterre ne seroit point payée du douaire qui lui avoit eté accordé à la paix, et il tint parole.
[…]
[p. 416] [1700] L’archevêque de Reims présida l’assemblée du clergé qui se tient de cinq ans en cinq ans. […] [p. 417] Cette assemblée se tint à Saint Germain quoique le roi d’Angleterre occupat le château. M. de Reims y tenoit une grande table et avoit du vin de Champagne qu’on vanta fort. Le roi d’Angleterre, qui n’en buvoit guere d’autre, en entendit parler et en envoya demander à l’archeveque, qui lui envoya six bouteilles. Quelque temps apres, le roi d’Angleterre, qui l’en avoit remercié, et qui avoit trouvé ce vin fort bon, l’envoya prier de lui en envoyer encore. L’archeveque, plus avare encore de son vin que de son argent, lui manda tout net que son vin n’etoit point fou et ne couroit point les rues, et ne lui en envoya point. Quelque accoutumé qu’on fut aux brusqueries de l’archeveque, celle ci parut si etrange qu’il en fut beaucoup parlé, mais il n’en fut autre chose.
[…]
[t. 3, p. 37] [1700] Aussitôt après la déclaration [de l’acceptation du testament du roi d’Espagne], le Roi la manda par le premier ecuyer au roi et à la reine d’Espagne. […] Depuis cette declaration, le roi d’Espagne fut traité comme le roi d’Angleterre. Il avoit à souper un fauteuil et son cadenas à la droite du roi, Monseigneur et le reste de la famille royale des ployants au bout, et au retour de la table à l’ordinaire, pour boire, une soucoupe et un verre couvert, et l’essai comme pour le Roi. Ils ne se voyoient en public qu’à la chapelle, et pour y aller et en revenir, et à souper, au sortir duquel le Roi le conduisoit jusqu’à la porte de la galerie. Il vit le roi et la reine d’Angleterre à Versailles et à Saint Germain, et ils se traiterent comme le roi et le roi d’Angleterre en tout, mais les trois rois ne se trouverent jamais nulle part tous trois ensemble.
[…]
[p. 328] [1701] Le voyage du roi d’Angleterre lui avoit peu reussi, et il ne traina depuis qu’une vie languissante. Depusi la mi aout, elle s’affoiblit de plus en plus, et, vers le 8 septembre, il tomba dans un etat de paralysie et d’autres maux à n’en laisser rien esperer. Le Roi, madame de Maintenon, toutes les personnes royales le visiterent souvent. Il reçut les derniers sacrements avec une pieté qui repondit à l’edification de sa vie, et on n’attendoit plus que sa mort à tous les instants. Dans cette conjoncture, le Roi prit une resolution plus digne de la generosité de Louis XII et de François Ier que de sa sagesse. Il alla de Marly, où il etoit, à Saint Germain, le mardi 13 septembre. Le roi d’Angleterre etoit si mal que, lorsqu’on lui annonça le Roi, à peine ouvrit il les yeux un moment. Le Roi lui dit qu’il etoit venu l’assurer qu’il [p. 329] pouvoit mourir en repos sur le prince de Galles, et qu’il le reconnoitroit roi d’Angleterre, d’Ecosse et d’Irlande. Le peu d’Anglois qui se trouverent presents se jeterent à ses genoux, mais le roi d’Angleterre ne donna pas signe de vie. Aussitôt après, le Roi passez chez la reine d’Angleterre, à qui il donna la meme assurance. Ils envoyerent chercher le prince de Galles, à qui ils le dirent. On peut juger de la reconnoissance et des expressions de la mere et du fils. Revenu à Marly, le Roi declara à toute la Cour ce qu’il venoit de faire. Ce ne fut qu’applaudissement et que louanges. […]
[p. 330] Le roi d’Angleterre, dans le peu d’intervalles qu’il eut, parut fort sensible à ce que le Roi venoit de faire. Il lui avoit fait promettre de ne pas souffrir qu’il lui fut fait la moindre ceremonie apres sa mort, qui arriva sur les trois heures apres midi du 16 septembre de cette année 1701.
M. le prince de Conti s’etoit tenu tous ces derniers jours à Saint Germain sans en partie, parce que la reine d’Angleterre et lui etoient enfants des deux sœurs Martinozzi, desquelles la mere etoit sœur du cardinal Mazarin. Le nonce du pape s’y etoit pareillement tenu, par l’ordre anticipé duquel il reconnut et salua le prince de Galles comme roi d’Angleterre. Le soir du meme jour, la reine d’Angleterre s’en alla aux Filles de Sainte Marie de Chaillot, qu’elle aimait fort, et lendemain samedi, sur les sept heures du soir, le corps du roi d’Angleterre, fort legerement accompagné, et suivi de quelques carrosses remplis des principaux Anglois de Saint Germain, fut conduit aux Benedictins anglois à Paris, rue Saint Jacques, où il fut mis en depot dans une chapelle comme le plus simple particulier, jusqu’aux temps, apparemment du moins, fort éloignés qu’il puisse etre transporté [p. 331] en Angleterre ; et son cœur aux Filles de Sainte Marie de Chaillot.
Ce prince a eté si connu dans le monde duc d’York et roi d’Angleterre, que je me dispenserai d’en parler ici. Il s’etoit fort distingué par sa valeur et par sa bonté, beaucoup plus par la magnanimité constante avec laquelle il a supporté tous ses malheurs, enfin par une sainteté eminente.
Le mardi 20 septembre, le Roi alla à Saint Germain, et fut reçu et conduit par le nouveau roi d’Angleterre comme il l’avoit eté par le roi son pere la premiere fois qu’ils se virent ; il demeura peu chez lui, et passez chez la reine d’Angleterre. Le roi son fils etoit en grand manteau violet ; pour elle, elle n’etoit point en mante, et ne voulut point de ceremonie. toute la maison royale et toutes les princesses du sang vinrent en robe de chambre faire leur visite pendant que le Roi y etoit, qui y resta le dernier, et qui demeura toujours debout. Le lendemain mercredi, le roi d’Angleterre, en grand manteau violet, vint voir le roi à Versailles, qui le reçut et le conduisit comme il avoit fait la premiere fois le roi son pere au haut du degré, comme lui meme en avoit eté reçu et conduit.
[…]
[t. 4, p. 116] [1703] La reine d’Angleterre, fort incommodée d’une glande au sein, dont elle guerit à la longue par un regime tres severe, [p. 117] eut une nouvelle affliction : elle perdit la comtesse Dalmont, Italienne et Montecuculli, qu’elle avoit amenée et mariée en Angleterre, qui ne l’avoit jamais quittée, et pour qui elle avoit eu la plus grande amitié et la plus grande confiance toute sa vie. C’etoit une grande femme, tres bien faite et de beaucoup d’esprit, dont notre cour s’accommodoit extremement. La reine d’aimoit tant, qu’elle lui avoit fait donner un tabouret de grace, comme je crois l’avoir dejà remarqué ailleurs.
[…]
[t. 5, p. 397] [1707] [Le duc d’Orléans] n’ignoroit pas que le premier Fils de France qui ait eu un fauteuil devant une tete couronnée a eté Gaston, qui, etant lieutenant general de l’Etat dans la minorité de Louis XIV, profita de l’indigence, des malheurs et des besoins de la reine d’Angleterre sa sœur pour ses enfants et pour elle meme, refugiés en France apres l’etrange catastrophe du roi Charles Ier, son mari, dont l’exemple et une raison semblable valut le fateuil à Monsieur et à Madame, pere et mere de M. le duc d’Orleans, [de la part] du roi Jacques II et de la reine sa femme, refugiés pareillement en France en 1688 par l’invasion et l’usurpation du prince d’Orange, depuis dit le roi Guillaume III. Mais il savoit aussi que lui meme ne l’avoit pu obtenir. On lui avoit seulement souffert, à madame la duchesse d’Orleans, à Mademoiselle, sa sœur, depuis duchesse de Lorraine, et aux trois filles de Gaston, de ne voir le roi et la reine d’Angleterre qu’avec Monseigneur, Monsieur ou Madame, devant qui ils ne pretendoient qu’un tabouret ; et comme tout s’etend en France sans autre droit que de l’oser, les deux autres filles du Roi, toujours blessées du rang si superieur au leur de leur sœur cadette, se mirent sur le meme pied de ne voir la cour d’Angleterre qu’avec des Fils ou des Filles de France ; puis d’elles, qui etoient princesses du sang par leurs maris, les autres princesses du sang en ont toujours usé de meme. Le Roi le souffroit, et le roi et la reine d’Angleterre n’etoient pas en situation de s’en plaindre.
[…]
[t. 6, p. 191] [1708] On eut grand soin qu’il ne parut aucun mouvement à Saint Germain. On couvrit le peu d’equipages qu’on tint prets au roi d’Angleterre d’un voyage à Anet pour des parties de chasse. Il ne devoit etre suivi, comme en effet il le fut, que du duc de Perth qui avoit eté son gouverneur, de Scheldon qui avoit été son sous gouverneur, des deux Hamilton, de Middleton, et de fort peu d’autres.
Perth etoit Ecossois ; il avoit eté longtemps chancelier d’Ecosse, qui est la premiere dignité et la plus autorisée du pays, et qui est aussi militaire, toujours remplie par les premiers seigneurs. Ses gendres, ses neveux, ses plus proches y occupoient encore les premiers emplois, y avoient le principal credit, et etoient tous dans le secret et les plus ardents promoteurs de l’entreprise. Le sous gouverneur etoit un des plus beaux, des meilleurs et des plus etendus esprits de toute l’Angleterre, brave, pieux, sage, savant, excellent officier, et d’une fidelité à toute epreuve. Les Hamilton etoient freres de la comtesse de Grammont, des premiers seigneurs d’Ecosse, braves et pleins d’esprit, fideles. Ceux là, par leur sœur, etoient fort melés à la meilleure compagnie de notre Cour ; ils etoient pauvres et avoient leur bon coin de singularité. Middleton etoit le seul secretaire d’Etat, parce qu’il avoit coulé à fond le duc de Melford, frere du duc de Perth, qui etoit l’autre, qui n’en avoit plus que le nom depuis les exils où fort injustement, à ce que les Anglois de Saint Germain pretendoient, Middleton l’avoit fait chasse. Il n’habitoit meme plus Saint Germain. La femme de Middleton etoit gouvernante de la princesse d’Angleterre, et avoit toute la confiance de la reine. C’etoit une grande femme, bien faite, maigre, à mine devote [p. 192] et austere. Elle et son mari avoient de l’esprit et de l’intrigue comme deux demons ; et Middleton, par etre de fort bonne compagnie, voyoit familierement la meilleure de Versailles. Sa femme etoit catholique, lui protestant, tous deux de fort peu de chose, et les seuls de tout ce qui etoit à Saint Germain qui touchassent tous leurs revenus d’Angleterre. Le feu roi Jacques, en mourant, l’avoit fort exhorté à se faire catholique. C’etoit un athée de profession et d’effet, s’il peut y en avoir, au moins un franc deiste ; il s’en cachoit meme fort peu. Quelques mois apres la mort de Jacques, il fut un matin trouver la reine, et comme eperdu lui declara avec grande effusion de cœur qu’il devoit son salut à ses prieres, et protesta qu’il etoit catholique. La reine fut assez credule pour s’abandonner au transport de sa joie, Middleton fit une retraite qu’il termina par une abjuration, se mit dans la grande devotion, et à frequenter les sacrements. La confiance de la reine en luit n’eut plus de bornes ; il gouverna tout à Saint Germain. La Jarretiere lui fut offerte qu’il refusa par modestie, mais pour tout cela ses revenus d’Angleterre ne lui etoient pas moins fidelement remis. Plus d’une fois le projet d’Ecosse, proposé d’abord à Saint Germain, avoit eté rejeté par lui, et meprisé par la reine qu’il gouvernoit. Quand il se vit pleinement ancré, il quitta peu à peu la devotion, et peu à peu reprit son premier genre d vie sans que son credit en reçut de diminution. Cette fois, comme les precedentes, il fut de tout le secret ; mais comme notre Cour y entroit avec efficace, il n’osa le contredire, mais il s’y rendit mollement. Tel fut le seul et veritable mentor que la reine donna au roi son fils pour l’expedition d’Ecosse.
[…]
[p. 218] On etoit lors dans la plus grande inquietude de l’entreprise [p. 219] d’Ecosse, et le roi d’Angleterre arriva à Saint Germain le meme soir que Chamillart revint à Marly de Flandres [20 avril].
[…]
[p. 233] [30 avril] Le roi déclara les généraux de ses armées. […] Le roi déclara en meme temps que M. le duc de Berry, mais comme volontaire seulement, accompagneroit monseigneur son frere, et les trois seuls hommes de leur suite que j’ai dits. Il declara aussi que le roi d’Angleterre feroit la campagne en Flandre, mais dans un entier incognito, sous le nom de chevalier de Saint Georges.
[…]
[p. 435] Vienne, piquée d’avoir succombé, en voulut tirer une réparation tout à fait en la disposition du pape, et lui demanda un chapeau pour le prince de Lorraine. Le pape, qui en etoit avare, et qui craignoit d’accoutumer l’empereur à prescrire, differa tant qu’il put, et l’habile abbé de Polignac saisit la conjoncture pour se faire un asile peu honorable, et d’une planche, apres tant de naufrages, une route pour arriver à la pourpre. […] [p. 436] Le pape desiroit fort, sur l’exemple de La Tremoille, faire passer Polignac aux deux couronnes ensemble, pour compensation du prince de Lorraine. Mais la dexterité de l’abbé, ni le credit de ses amis, ne purent faire gouter cet expedient au Roi ; et l’empereur, enflé des prosperités de sa si grande alliance, declara nettement que, si le pape faisoit un sujet pour les deux couronnes avec le prince de Lorraine, il pretendoit avoir en meme temps un autre chapeau au nom de l’archiduc, comme roi d’Espagne. Cette pretention etoit absurde. L’archiduc n’etoit point roi d’Espagne, à Rome moins que partout ailleurs, où Philippe V etoit seul reconnu, avoit un legat à Naples, tenoit actuellement un ambassadeur à Rome, qui etoit le duc d’Uzeda, et avoit un nonce à Madrid. L’empereur d’ailleurs ne pouvoit contester au Roi un droit egal au sien, et il n’avoit pas le moindre pretexte de plainte que l’abbé de Polignac passat pour la France avec le prince de Lorraine pour lui, c’etoit le roi d’Espagne seul qui en auroit eté laissé. A cette difficulté, il s’en joignit une autre dans notre Cour. Madame de Lorraine, qui, pour etre depuis longtemps mourante et alors fort pres de sa fin, n’en etoit pas moins attentive à l’elevation des siens et à l’etablissement de ses enfants, fut bientôt informée de ce qui se passoit la dessus. Elle sentit combien une promotion de traverse eloigneroit celle des couronnes. Elle ecrivit donc au Roi, et lui demanda d’insister à ce que le prince de Lorraine passat comme couronne pour l’empereur. Le Roi n’eut garde de lui refuser cette complaisance, mais elle ne fit qu’augmenter la difficulté. […] [p. 437] Mais cependant l’abbé de Polignac prit un autre four. Il avoit toujours menagé la Cour de Saint Germain, en France et à Rome ; il se tourna vers elle pour avoir sa nomination. Cette marque de royauté etoit comme la seule qui restat au malheureux roi d’Angleterre, et Rome n’en pouvoit pas faire de difficulté à un prince qui perdoit tout pour la religion, qui n’avoit d’asile que Rome, et qui y etoit traité en roi. Avec toutes ces raisons, ce prince crut en avoir de bonnes raisons d’introduire l’exercice de ce droit par un sujet agreable au pape et protegé par la France. Torcy, qui, dans l’affaire de la nomination de Pologne, n’avoit pas voulu decider entre ses deux amis, et avoit remis le choix au Roi, sans porter l’un plus que l’autre, fut ravi d’une occasion de revenir sur l’abbé de Polignac, et le servit de toutes ses forces. Il obtint donc en ce temps ci la nomination du roi d’Angleterre pour la promotion des couronnes, et le pape, qui ne demandoit qu’un pretexte de le faire cardinal, l’agrea avec plaisir.
[…]
[t. 7, p. 16] Ce lendemain mardi 11 [décembre], le roi d’Angleterre arriva à Saint Germain, et vint voir le Roi le mercredi avec la reine sa mere.
[…]
[p. 18] Ce pauvre prince vivoit son incognito avec le meme respect avec les deux princes que s’il n’eut eté qu’un mediocre particulier. Eux aussi en abusoient avec la derniere indecence, sans la moindre des attentions que ce qu’il etoit exigé d’eux, à travers tous les voiles, jusqu’à le laisser tres ordinairement attendre parmi la foule dans les antichambres, et ne lui parloient presque point. Le scandale en fut d’autant plus grand qu’il dura toute la campagne, et que le chevalier de Saint Georges s’y etoit concilié l’estime et l’affection de toute l’armée par ses manieres et par toute sa conduite. Vers les derniers temps de la campagne, Gamaches, poussé à bout d’un procedé si constant, s’adressant aux deux princes devant tout le monde : « Est ce une gageure ? leur demanda t il tout à coup ; parlez franchement ; si c’en est une, vous l’avez gagnée, il n’y a rien à dire ; mais au moins, après cela, parlez un peu à M. le chevalier de Saint Georges, et le traitez un peu plus honnetement. » Toutes ces saillies eussent eté bonnes tete à tete, et fort à propos, mais en public, ce zele et ces verités [p. 19] n’en pouvoient couvrir l’indiscretion. On etoit accoutumé aux siennes, elles ne furent pas mal prises, mais elles ne servirent de rien.
[…]
[t. 9, p. 178] [1711] Le lendemain, mardi 21 avril, M. [le Dauphin] et madame la Dauphine, M. [le duc] et madame la duchesse de Berry, Madame, M. [le duc] et madame la duchesse d’Orleans allerent, l’apres dinée, en meme carrosse, à Saint Germain, tous en mante et en grand manteau. Ils allerent droit chez le roi d’Angleterre, où ils ne s’assirent point, ensuite chez la reine, où ils s’assirent dans six fauteuils, M. [le duc] et madame la duchesse d’Orleans et M. du Maine sur un ployant [p 179] chacun. Il etoit allé les y attendre pour jouir de cet honneur, et s’y egaler à un Petit Fils de France. La reine fit des excuses de n’etre pas en mante pour les recevoir, c’est à dire en petit voile, parce que, au moins en France, les veuves ne portent de mante en nulle occasion ; elle ajouta que le Roi le lui avoit defendu. Cette excuse fut le comble de la politesse. Le Roi, tres attentif à ne faire sentir à la reine d’Angleterre rien de sa triste situation, n’avoit garde de souffrir qu’elle prit une mante, ni le roi d’Angleterre un grand manteau, pour recevoir le grand deuil de ceremonie d’un Dauphin et qui n’etoit pas roi. En se levant, ils voulurent aller chez la princesse d’Angleterre, mais la reine les arreta et l’envoya chercher. Elle se contenta que la visite fut marquée. On ne se rassit point. La princesse, qui à cause de la reine sa mere etoit sans mante, ne pouvoit avoir de fauteuil devant elle, ni les Fils et Filles de France sans fauteuil devant la reine dans le sien, ni garder le leur en presence de la princesse d’Angleterre sur un ployant. La visite finit de la sorte. De toute la Cour de Saint Germain, aucune dame ne parut en mante, ni aucun homme en manteau long que le seul duc de Berwick, à cause de ses dignités françoises.
[…]
[p. 313] Le roi d’Angleterre partit, en ce meme temps, pour aller voyager par le royaume, ennuyé apparemment de ses tristes campagnes incognito, et plus encore de demeurer à Saint Germain pendant la guerre. On soupçonna du mystere en ce voyage, sans qu’il n’y en eut aucun. Il alla avec une petite suite d’abord à Dijon, puis en France Comté, en Alsace, et voir l’armée d’Allemagne ; de là par Lyon en Dauphiné, à l’armée du duc de Berwick, voir les ports de Provence, et revenir par le Languedoc et la Guyenne.
[…]
[t. 10, p. 16] Le roi Jacques revint aussi à Saint Germain, apres avoir employé tout l’eté à voir les principales provinces du royaume, quelques unes de nos armées et plusieurs de nos ports.
[…]
[t. 11, p. 32] [1714] M. de Lauzun fut arreté en decembre 1671, à Saint Germain, dans sa chambre, un soir qu’il revenoit de Paris rapporter des pierreries à madame de Montespan qui l’en avoit chargé. Il etoit capitaine des gardes, et fut arreté par le marquis de Rochefort, depuis marechal de France, qui l’etoit aussi, car un capitaine des gardes ne peut etre arreté [p. 3] que par un autre capitaine des gardes.
[…]
[p. 43] La reine d’Angleterre tomba malade à Saint Germain, et reçut tous les sacrements. Les medecins la condamnoient, et elle en etoit contente ; la vie n’avoit rien qui put l’attacher depuis bien des années, et elle faisoit le plus saint usage de ses malheurs. Le Roi lui rendit de grands soins pendant cette maladie, et madame de Maintenon aussi.
Le duc de Melford mourut à Saint Germain. Il avoit la Jarretiere, avoit eté secretaire d’Etat d’Ecosse, et etoit frere du duc de Perth, aussi chevalier de la Jarretiere. Il avoit essuyé des soupçons et des exils. On a vu que le feu roi Jacques avoit cru en mourant qu’ils avoient eté mal fondés, et qu’en reparation il l’avoit fait duc. Tout le monde à Saint Germain et à Versailles n’en fut pas aussi persuadé que ce prince.
[…]
[p. 174] Le lendemain lundi 28 [août 1714], la reine d’Angleterre vint de Chaillot, où elle etoit presque toujours, avec madame de Maintenon. Le Roi fut l’y trouver. Dès qu’il l’aperçut : « Madame, lui dit il en homme plein et faché, j’ai fait mon testament, on m’a tourmenté pour le faire ».
[…]
[t. 12, p. 57] [1715] Le Roi partit le mardi 12 juin pour Marly : ce fut son dernier voyage ; et la reine d’Angleterre partit le lendemain en litiere pour aller prendre les eaux de Plombieres, plus encore pour voir le roi son fils.
[…]
[p. 66] Nesmond, eveque de Bayeux, mourut aussi doyen de l’episcopat de France, à quatre vingt six ans. […] [p. 67] Tant que le roi Jacques vecut en France, il lui donnoit tous les ans dix mille ecus, et jamais on ne l’a su qu’apres la mort de l’eveque.
[…]
[p. 452] Plusieurs choses contribuerent à tirer pour toujours la Cour hors de Paris, et à la tenir sans interruption à la campagne. Les troubles de la minorité, dont cette ville fut le grand theatre, en avoient imprimé au roi l’aversion, et la persuasion encore que son sejour y etoit dangereux, et que la residence de la Cour ailleurs rendroit à Paris les cabales moins aisées par la distance des lieux, quelque peu eloignés [p. 453] qu’ils fussent, et en meme temps plus difficiles à cacher par les absences si aisées à remarquer. Il ne pouvoit pardonner à Paris sa sortie fugitive de cette ville la veille des Rois (1649), ni de l’avoir rendue, malgré lui, temoin de ses larmes, à la premiere retraite de madame de La Valliere. L’embarras des maitresses, et le danger de pousser de grands scandales au milieu d’une capitale si peuplée, et si remplie de tant de differents esprits, n’eut pas peu de part à l’en eloigner. Il s’y trouvoit importuné de la foule du peuple à chaque fois qu’il sortoit, qu’il rentroit, qu’il paroissoit dans les rues ; il ne l’etoit pas moins d’une autre sorte de foule de gens de la ville, et qui n’etoit pas pour aller assidument plus loin. Des inquietudes aussi, qui ne furent pas plutôt apercues que les plus familiers de ceux qui etoient commis à sa garde, le vieux Noailles, M. de Lauzun et quelques subalternes, firent leur cour de leur vigilance, et furent accusés de multiplier expres de faux avis qu’ils se faisoient donner, pour avoir occasion de se faire valoir et d’avoir plus souvent des particuliers avec le Roi ; le gout de la promenade et de la chasse, bien plus commodes à la campagne qu’à Paris, eloigné des forets et sterile en lieux de promenades ; celui des batiments qui vint apres, et peu à peu toujours croissant, ne lui en permettoit pas l’amusement dans une ville où il n’auroit pu eviter d’y etre continuellement en spectacle ; enfin l’idée de se rendre plus venerable en se derobant aux yeux de la multitude, et à l’habitude d’en etre vu tous les jours, toutes ces considerations fixerent le Roi à Saint Germain bientôt apres la mort de la Reine sa mere.
Ce fut là où il commença à attirer le monde par les fetes et les galanteries, et à faire sentir qu’il vouloit etre vu souvent.
L’amour de madame de La Valliere, qui fut d’abord un mystere, donna lieu à de frequentes promenades à Versailles, petit chateau de cartes alors, bati par Louis XIII ennuyé, et [p. 454] sa suite encore plus, d’y avoir souvent couché dans un mechant cabaret à rouliers et dans un moulin à vent, excedés de ses longues chasses dans la foret de Saint Leger et plus loin encore, loin alors de ces temps reservés à son fils où les routes, la vitesse des chiens et le nombre gagé des piqueurs et des chasseurs à cheval a rendu les chasses si aisées et si courtes. Ce monarque ne couchoit jamais ou bien rarement à Versailles qu’une nuit, et par necessité ; le Roi son fils, pour etre plus en particulier avec sa maitresse, plaisirs inconnus au Juste, au heros, digne fils de saint Louis, qui batit ce petit Versailles.
Ces petites parties de Louis XIV y firent naitre peu à peu ces batiments immenses qu’il y a faits, et leur commodité pour une nombreuse Cour, si differente des logements de Saint Germain, y transporta tout à fait sa demeure peu de temps avant la mort de la Reine. Il y fit des logements infinis, qu’on lui faisoit sa cour de lui demander, au lieu qu’à Saint Germain, presque tout le monde avoit l’incommodité d’etre à la ville, et le peu qui etoit logé au chateau y etoit etrangement à l’etroit.
Les fetes frequentes, les promenades particulieres à Versailles, les voyages furent des moyens que le Roi saisit pour distinguer et pour mortifier en nommant les personnes qui à chaque fois en devoient etre, et pour tenir chacun assidu et attentif à lui plaire. Il sentoit qu’il n’avoit pas à beaucoup pres assez de graces à repandre pour faire un effet continuel. Il en substitua donc aux veritables d’ideales, par la jalousie, les petites preferences qui se trouvoient tous les jours, et pour ainsi dire, à tous moments, par son art. Les esperances que ces petites preferences et ces distinctions faisoient naitre, et la consideration qui s’en tiroit, personne ne fut plus ingenieux que lui à inventer sans cesse ces sortes de choses. Marly, dans la suite, lui fut en cela d’un plus grand usage, et Trianon où tout le monde, à la verité, pouvoit lui aller faire sa cour, mais où les dames avoient l’honneur de manger [p. 455] avec lui, et où à chaque repas elles etoient choisies ; le bougeoir qu’il faisoit tenir tous les soirs à son coucher par un courtisan qu’il vouloit distinguer, et toujours entre les plus qualifiés de ceux qui s’y trouvoient, qu’il nommoit tout haut au sortir de sa priere. Les justaucorps à brevet fut une autre de ces inventions. Il etoit doublé de rouge avec les parements et la veste rouge, brodé d’un dessin magnifique or et un peu d’argent, particulier à ces habits. Il n’y en avoit qu’un nombre, dont le Roi, sa famille et les princes du sang etoient ; mais ceux-ci, comme le reste des [p. 456] courtisans, n’en avoient qu’à mesure qu’il en vaquoit. Les plus distingués de la Cour par eux-mêmes ou par la faveur les demandoient au Roi, et c’etoit une grace que d’en obtenir. Le secretaire d’Etat ayant la Maison du Roi en son departement en expedioit lebrevet, et nul d’eux n’etoit à portée d’en avoir. Ils furent imaginés pour ceux, en tres petit nombre, qui avoient la liberté de suivre le Roi aux promenades de Saint Germain à Versailles sans etre nommés, et depuis que cela cessa, ces habits ont cessé aussi de donner aucun privilege, excepté celui d’etre portés quoiqu’on fut en deuil de Cour ou de famille, pourvu que le deuil ne fut pas grand ou qu’il fut sur ces fins, et dans les temps encore où il etoit defendu de porter de l’or et de l’argent.
[…]
[p. 465] Rien, jusqu’à lui, n’a jamais approché du nombre et de la magnificence de ses equipages de chasse et de toutes ses autres sortes d’equipages. Ses batiments, qui les pourroit denombrer ? En meme temps, qui n’en deplorera pas l’orgeuil, le caprice, le mauvais gout ? Il abandonna Saint Germain [p. 466] et ne fit jamais à Paris ni ornement ni commodité que le pont Royal, par pure necessité, en quoi, avec son incomparable etendue, elle est si inferieure à tant de villes dans toutes les parties de l’Europe. […]
Saint Germain, lieu unique pour rassembler les merveilles de la vue, l’immense plain pied d’une foret toute joignante, unique encore par la beauté de ses arbres, de son terrain, de sa situation, l’avantage et la facilité des eaux de source sur cette elevation, les agrements admirables des jardins, des hauteurs et des terrasses, qui les unes sur les autres se pouvoient si aisement conduire dans toute l’etendue qu’on auroit voulu, les charmes et les commodités de la Seine, enfin, une ville toute faite et que sa position entretenoit par elle meme, il l’abandonna pour Versailles, le plus triste et le plus ingrat de tous les lieux, sans vue, sans bois, sans eau, sans terre, parce que tout y est sable mouvant ou marecage, sans air par consequent qui n’y peut etre bon.
[…]
[t. 13, p. 37] Reine en particulier, à l’exterieur pour le ton, le siege et la place en presence du roi, de Monseigneur, de Monsieur, de la cour d’Angleterre et de qui que ce fut, [madame de Maintenon] etoit tres simple particuliere au dehors, et toujours aux dernieres places. J’en ai vu les fins aux diners du Roi à Marly, mangeant avec lui et les dames, et à Fontainbleau en grand habit chez la reine d’Angleterre, comme je l’ai remarqué ailleurs, cedant absolument sa place, et se reculant partout pour les femmes titrées, meme pour des femmes de qualité distinguées.
[…]
[p. 50] Reine dans le particulier, madame de Maintenon n’etoit jamais que dans un fauteuil, et dans le lieu le plus commode de sa chambre, devant le Roi, devant toute la famille royale, meme devant la reine d’Angleterre. Elle se levoit tout au plus pour Monseigneur et pour Monsieur, parce qu’ils alloient [p. 51] rarement chez elle ; M. le duc d’Orleans, ni aucun prince du sang, jamais que par audiences, et comme jamais ; mais Monseigneur, messeigneurs ses fils, Monsieur et M. le duc de Chartres, toujours en partant pour l’armée, et le soir meme qu’ils en arrivoient, ou, s’il etoit trop tard, de bonne heure le lendemain. Pour aucun autre Fils de France, leurs epouses, ou les batards du Roi, elle ne se levoit point, ni pour personne, sinon un peu pour les personnes ordinaires avec qui elle n’avoit point de familiarité, et qui en obtenoient des audiences ; car modeste et polie, elle l’a toujours affecté à ces egards là.
[…]
[p. 101] Il ne se passoit guere quinze jours que le Roi n’allat à Saint Germain, meme apres la mort du roi Jacques II. La cour de Saint Germain venoit aussi à Versailles, mais plus souvent à Marly, et souvent y souper, et nulle fete de ceremonie ou de divertissement qu’elle n’y fut invitée, qu’elle vint et dont elle ne reçut tous les honneurs. Ils etoient reciproquement convenus de se recevoir et se conduire dans le [p. 102] milieu de leur appartement. A Marly, le Roi les recevoit et les conduisoit à la porte du petit salon du coté de la Perspective, et les y voyoit descendre et monter dans leur chaise à porteurs ; à Fontainebleau, tous les voyages, au haut de l’escalier à fer à cheval, depuis que le Roi leur eut accordé de ne les aller plus recevoir et conduire au bout de la foret. Rien n’etoit pareil aux soins, aux egards, à la politesse du Roi pour eux, ni à l’air de majesté et de galanterie avec lequel cela se passoit à chaque fois.
[…]
[p. 291] [1715] Le Prétendant partit deguisé de Bar, accompagné de trois ou quatre personnes seulement, vint à Chaillot où M. de Lauzun avoit une ancienne petite maison où il n’alloit jamais, et qu’il avoit gardée par fantaisie, quoiqu’il eut celle de Passy dont il faisoit beaucoup d’usage. Ce fut où le Pretendant coucha, et où il vit la reine sa mere, qui etoit souvent et longtemps aux Filles de Sainte Marie de Chaillot ; et de là partit pour aller s’embarquer en Bretagne par la route d’Alençon, dans une chaise de poste de Torcy.
Stairs decouvrit cette marche, et resolut de ne rien oublier pour delivrer son parti de ce reste unique des Stuarts. […] Nonancourt est une espece de petite villette sur ce chemin, à dix neuf lieues de Paris. […] [p. 293] C’etoit la chaise attendue, à qui, et à trois hommes qui l’accompagnoient à cheval, on fit, sans qu’elle sut pourquoi, prendre le petit pas. C’etoit le roi Jacques. Madame Lospital l’aborde, lui dit qu’il est attendu et perdu s’il n’y prend garde, mais qu’il ait à se fier à elle et à la [p. 294] suivre ; et les voilà allés chez l’amie. Là il apprend tout ce qui s’est passé, et on le cache le mieux qu’il est possible. […]
[p. 295] La reine d’Angleterre fit venir madame Lospital à Saint Germain, la remercia, la caressa comme elle le meritoit, et lui [p. 296] donna son portrait ; ce fut tout : le regent, quoi que ce soit ; et longtemps après, le roi Jacques lui ecrivit et lui envoya aussi son portrait.
[…]
[t. 15, p. 233] [1718] On a vu la brouillerie du duc de Noailles et de Law, le replâtrage qui s’y fit, le gré sensible que M. le duc d’Orleans sut au duc de Noailles de sa complaisance et de ses protestations à cet egard, et l’apreté avec laquelle il en sut profiter pour en tirer le gouvernement et la capitainerie de Saint Germain, qu’il avoit toute sa vie muguetée, et que la fortune lui livra precisement dans ce favorable instant par la prompt mort de Mornay sans enfants.
[…]
[p. 274] M. de Lorraine alla courre le cerf à Saint Germain avec les chiens du prince Charles. Le duc de Noailles n’eut garde de manquer cette occasion de faire sa cour au régent. Il donna à M. de Lorraine un grand retour de chasse au Val.
[…]
[p. 332] La reine d’Angleterre mourut le 7 mai à Saint Germain apres dix ou douze jours de maladie. Sa vie, depuis qu’elle fut en France, à la fin de 1688, n’a eté qu’une suite de malheurs qu’elle a heroiquement portés jusqu’à la fin, dans l’oblation à Dieu, le detachement, la penitence, la priere et les bonnes œuvres continuelles, et toutes les vertus qui consomment les saints. Parmi la plus grande sensibilité naturelle, beaucoup d’esprit et de hauteur naturelle, qu’elle sut captiver etroitement et humilier constamment, avec le plus grand air du monde, le plus majestueux, le plus imposant, avec cela doux et modeste. Sa mort fut aussi sainte qu’avoit eté sa vie. Sur les six cent mille livres que le Roi lui donnoit par an, elle s’epargnoit tout pour faire subsister les pauvres Anglois dont Saint Germain etoit rempli. Son corps fut porté le surlendemain aux Filles de Sainte Marie de [p. 333] Chaillot, où il est demeuré en depot, et où elle se retiroit souvent. La Cour ne prit aucun soin ni part en ses obseques. Le duc de Noailles alla à Saint Germain comme gouverneur du lieu et comme capitaine des gardes, pour ordonner seulement que tout y fut decent. Le deuil ne fut que de trois semaines.
[…]
[t. 17, p. 184] [1719] Le samedi au soir 15 avril, veille de la Quasimodo, mourut à Saint Cyr la celebre et fatale madame de Maintenon. […] [p. 185] Elle se retira à Saint Cyr au moment meme de la mort du roi, et eut le bon sens de s’y reputer morte au monde, et de n’avoir jamais mis le pied hors de la cloture de cette maison. […]
Une fois la semaine, quand la reine d’Angleterre etoit à Saint Germain, [elle] alloit diner avec elle, mais de Chaillot, où elle passoit des temps considerables, elle n’y alloit pas. Elles avoient chacune leur fauteuil égal, vis à vis l’une de l’autre. A l’heure du diner, on mettoit une table entre elles deux, leur couvert, les premiers plats et une cloche. C’etoit les jeunes demoiselles de la chambre qui faisoient tout ce menage, et qui leur servoit à boire, des assiettes et un nouveau service quand la cloche les appeloit ; la reine leur temoignoit toujours quelques bontés. Le repas fini, elles desservoient et otoient tout de la chambre, puis apportoient [p. 186] et rapportoient le café. La reine y passoit deux ou trois heures tete à tete, puis elles s’embrassoient ; madame de Maintenon faisoit trois ou quatre pas en la recevant et en la conduisant ; les demoiselles, qui etoient dans l’antichambre, l’accompagnoient à son carrosse, et l’aimoient fort, parce qu’elle leur etoit fort gracieuse. […]
[p. 187] Madame de Maintenon, comme à la Cour, se levoit matin et se couchoit de bonne heure. […] Son diner etoit simple, mais delicat et recherché dans sa simplicité, et tres abondant en tout. Le duc de Noailles, apres Mornay et Bloin, ne la laissoient pas manquer de gibier de Saint Germain et de Versailles, ni les Batiments de fruits.
[…]
[p. 247] [1719] Peu de jours apres, le duc de Richelieu sortit de la Bastille et alla coucher à Conflans chez le cardinal de Noailles. Il etoit veuf sans enfants de sa niece, mais, par son traité avec l’Espagne, il avoit voulu depouiller le duc de Guiche, autre neveu du cardinal de Noailles, du regiment des gardes, et l’avoir. Il devoit s’en aller à Richelieu ; il obtint d’aller faire une pause à Saint Germain, où il avoit une maison, puis d’y demeurer, apres d’etre à Paris sans voir le Roi ni le regent ; au bout de trois mois il eut permission de les saluer, et tout fut bientôt oublié.
[…]
[p. 451] [1720] Le duc de Perth mourut presque en meme temps dans le château de Saint Germain, où il etoit demeuré. C’etoit un seigneur qui avoit quitté de grands etablissements en Ecosse, par fidelité pour le roi Jacques, qui le fit gouverneur du prince de Galles. Sa femme etoit morte à Saint Germain, dame d’honneur de la reine d’Angleterre, dont il etoit grand ecuyer. C’etoit un homme d’honneur et de beaucoup de pieté, qui valoit bien mieux que le duc de Melford son frere. Le roi Jacques les fit ducs tous les deux, le dernier en mourant, comme on l’a vu en son lieu, et leur donna à tous deux la Jarretière.
[…]
[p. 473] L’abbé Gautier, dont il est si bien et si souvent parlé dans ce qui a été donné ici, d’après M. de Torcy, sur les negociations de la paix avec la reine Anne, et de celle d’Utrecht, mourut dans un appartement que le feu roi lui avoit donné dans le chateau neuf de Saint Germain, avec des pensions et une abbaye. Il s’y etoit retiré aussitôt apres ces negociations où il avoit eté si heureusement employé, apres en avoir ouvert lui-même le premier chemin, et rentra en home de bien modeste et humble, dans son etat naturel, et y vecut comme s’il ne se fut jamais melé de rien, avec une rare simplicité, et qui a peu d’exemples en des gens de sa sorte, qui, dans le maniement des affaires les plus importances et les plus secretes, dont lui-même avoit donné la premiere clef, sans s’intriguer, s’etoit concilié l’estime et l’affection du roi et de ses ministres, de la reine Anne et des siens, et des plenipotentiaires qui travaillerent à ces deux paix.
[…]
[t. 20, p. 39] [1723] Le duc de Lauzun etoit un petit homme, blondasse, bien fait dans sa taille, de physionomie haute, pleine d’esprit, qui imposoit, mais sans agrement dans le visage, à ce que j’ai ouï dire aux gens de son temps. […] Il vint à la Cour sans aucun bien, cadet de Gascogne fort jeune, debarquer de sa province sous le nom de marquis de Puyguilhem. […] [p. 40] Le duc Mazarin, dejà retiré de la Cour, en 1669 voulut se defaire de sa charge de grand maitre de l’artillerie ; Puyguilhem en eut le vent des premiers, il la demanda au Roi qui la lui promit, mais sous le secret pour quelques jours. Le jour venu que le Roi lui avoit dit qu’il le declareroit, Puyguilhem, qui avoit les entrées des premiers gentilshommes de la chambre, qu’on nomme aussi les grandes entrées, alla attendre la sortie du Roi du conseil des finances, dans une piece où personne n’entroit pendant le Conseil, entre celle où toute la Cour attendoit et celle où le Conseil se tenoit. Il y trouva Nyert, premier valet de chambre en quartier, qui lui demanda par quel hasard il y venoit ; Puyguilhem, sur de son affaire, crut se devouer ce premier valet de chambre en lui faisant confidence de ce qui alloit se declarer en sa faveur ; Nyert lui en temoigna sa joie, puis tira sa montre, et vit qu’il avoit encore le temps d’aller executer, disoit il, quelque chose de court et de pressé que le Roi lui avoit ordonné : il monte quatre à quatre un petit degré au haut duquel etoit le bureau où Louvois travailloit toute la journée, car à Saint Germain les logements etoient fort petits et fort rares, et les ministres et presque toute la Cour logeoient chacun chez soi, à la ville. Nyert entre dans le bureau de Louvois, et l’avertit qu’au sortir du conseil des finances, dont Louvois n’etoit point, Puyguilhem alloit etre declaré grand maitre de l’artillerie, et lui conte ce qu’il venoit d’apprendre de lui meme, et où il l’avoit laissé.
Louvois haissoit Puyguilhem, ami de Colbert, son emule, [p. 41] et il craignoit la faveur et les hauteurs dans une charge qui avoit tant de rapports necessaires avec son departement de la guerre, et de laquelle il envahissoit les fonctions et l’autorité tant qu’il pouvoit, ce qu’il sentoit que Puyguilhem ne seroit ni d’humeur ni de faveur à souffrir. Il embrasse Nyert, le remercie, le renvoie au plus vite, prend quelque papier pour lui servir d’introduction, descend, et trouve Puyguilhem et Nyert dans cette piece ci devant dire. Nyert fait le surpris de voir arriver Louvois, et lui dit que le Conseil n’est pas levé. « N’importe, repondit Louvois, je veux entrer, j’ai quelque chose de pressé à dire au Roi », et tout de suite entre ; le Roi, surpris de le voir, lui demande ce qui l’amene, et lui dit qu’il sait qu’il va declarer Puyguilhem grand maitre de l’artillerie, qu’il l’attend à la sortie du Conseil dans la piece voisine, que Sa Majesté est pleinement maitresse de ses graces et de ses choix, mais qu’il a cru de son service de lui representer l’incompatibilité qu’il est entre Puyguilhem et lui, ses caprices, ses hauteurs ; qu’il voudra tout faire et tout changer dans l’artillerie ; que cette charge a une si necessaire connexion avec le departement de la guerre, qu’il est impossible que le service s’y fasse parmi des entreprises et des fantaisies continuelles, et la mesintelligence declarée entre le grand maitre et le secretaire d’Etat, dont le moindre inconvenient sera d’importuner Sa Majesté tous les jours de leurs querelles et de leurs reciproques pretentions, dont il faudra qu’Elle soit juge à tous moments.
Le Roi se sentit extremement piqué de voir son secret su à celui à qui principalement il le vouloit cacher, repond à Louvois d’un air fort serieux que cela n’est pas fait encore, le congedie et va se rasseoir au Conseil. Un moment apres qu’il fut levé, le Roi sort pour aller à la messe, voit Puyguilhem et passe sans lui rien dire. Puyguilhem, fort etonné, attend le reste de la journée, et voyant que la declaration [p. 42] promise ne venoit point, en parle au Roi à son petit coucher. Le Roi lui repond que cela ne se peut encore, et qu’il verra : l’ambiguité de la reponse et son ton sec alarment Puyguilhem ; il avoit le vol des dames et le jargon de la galanterie ; il va trouver madame de Montespan, à qui il conte son inquietude, et qu’il conjure de la faire cesser. Elle lui promet merveilles et l’amuse ainsi plusieurs jours.
Las de tout ce manege et ne pouvant deviner d’où lui vient son mal, il prend une resolution incroyable si elle n’etoit attestée de toute la Cour d’alors. Il couchoit avec une femme de chambre favorite de madame de Montespan, car tout lui etoit bon pour etre averti et protegé, et vient à bout de la plus hasardeuse hardiesse dont on ait jamais ouï parler. Parmi tous ses amours, le Roi ne decoucha jamais d’avec la Reine, souvent tard, sans y manquer, tellement que pour etre plus à son aise, il se mettoit les apres dinées entre deux draps chez ses maitresses. Puyguilhem se fit cacher par cette femme de chambre sous le lit dans lequel le Roi s’alloit mettre avec madame de Montespan, et par leur conversation, y apprit l’obstacle que Louvois avoit mis à sa charge, la colere du Roi de ce que son secret avoit eté eventé, sa resolution de ne lui point donner l’artillerie par ce depit, et pour eviter les querelles et l’importunité continuelle d’avoir à les decider entre Puyguilhem et Louvois. Il y entendit tous les propos qui se tinrent de lui entre le Roi et sa maitresse, et que celle ci, qui lui avoit promis tous ses bons offices, lui en rendit tous les mauvais qu’elle put. Une toux, le moindre mouvement, le plus leger hasard pouvoit deceler ce temeraire, et alors que seroit il devenu ? Ce sont de ces choses dont le recit etouffe et epouvante à la fois.
Il fut plus heureux que sage, et ne fut point decouvert. Le Roi et sa maitresse sortirent enfin de ce lit ; le Roi se rhabilla et s’en alla chez lui, madame de Montespan se mit à sa toilette pour aller à la repetition d’un ballet où le Roi, la Reine et toute la Cour devoit aller. La femme de chambre tira [p. 43] Puyguilhem de dessous ce lit, qui apparemment n’eut pas un moindre besoin d’aller se rajuster chez lui. De là il s’en vint se coller à la porte de la chambre de madame de Montespan.
Lorsqu’elle en sortit pour aller à la repetition du ballet, il lui presenta la main, et lui demanda avec un air plein de douceur et de respect, s’il pouvoit se flatter qu’elle eut daigné se souvenir de lui aupres du Roi. Elle l’assura qu’elle n’y avoit pas manqué, et lui composa comme il lui plut tous les services qu’elle venoit de lui rendre. Par ci, par là, il l’interrompit credulement de questions pour la mieux enferrer, puis s’approchant de son oreille, il lui dit qu’elle etoit une menteuse, une friponne, une coquine, une p… à chien, et lui repeta mot pour mot toute la conversation du Roi et d’elle. Madame de Montespan en fut si troublée qu’elle n’eut pas la force de lui repondre en un seul mot, et à peine de gagner le lieu où elle alloit, avec grande difficulté à surmonter et à cacher le tremblement de ses jambes et de tout son corps, en sorte qu’en arrivant dans le lieu de la repetition du ballet, elle s’evanouit. Toute la Cour y etoit déjà. Le Roi tout effrayé vint à elle, on eut de la peine à la faire revenir. Le soir elle conta au Roi ce qui lui etoit arrivé, et ne doutoit pas que ce ne fut le diable qui eut sitot et si precisement informé Puyguilhem de tout ce qu’ils avoient dit de lui dans ce lit. Le Roi fut extremement irrité de toutes les injures que madame de Montespan en avoit essuyées, et fort en peine comme Puyguilhem avoit [pu] etre si exactement et si subitement instruit.
Puyguilhem, de son coté, etoit furieux de manquer l’artillerie, de sorte que le Roi et lui se trouvoient dans une etrange contrainte ensemble. Cela ne put durer que quelques jours. Puyguilhem, avec ses grandes entrées, epia un tete à tete avec le Roi et le saisit. Il lui parla de l’artillerie et le somma audacieusement de sa parole. Le Roi lui repondit qu’il n’en etoit plus tenu, puisqu’il ne la lui avoit donnée [p. 44] que sous le secret, et qu’il y avoit manquée. La dessus Puyguilhem s’eloigne de quelques pas, tourne le dos au Roi, tire son epée, en casse la lame avec son pied, et s’ecrie en fureur qu’il ne servira plus de sa vie un prince qui manque si vilainement de parole. Le Roi, transporté de colere, fit peut etre dans ce moment la plus belle action de sa vie. Il se tourne à l’instant, ouvre la fenetre, jette sa canne dehors, dit qu’il seroit faché d’avoir frappé un homme de qualité, et sort.
Le lendemain matin, Puyguilhem, qui n’avoit osé se montrer depuis, fut arreté dans sa chambre et conduit à la Bastille. Il etoit ami intime de Guitry, favori du Roi, pour lequel il avoit créé la charge de grand maitre de la garde robe. Il osa parler au Roi en sa faveur, et tacher de rappeler ce gout infini qu’il avoit pris pour lui. Il reussit à toucher le Roi d’avoir fait tourner la tete à Puyguilhem par le refus d’une assi grande charge, sur laquelle il avoit cru devoir compter sur sa parole, tellement que le Roi voulut reparer ce refus. Il donna l’artillerie au comte du Lude, chevalier de l’ordre en 1661, qu’il aimoit fort par habitude et par la conformité du gout de la galanterie et de la chasse. Il etoit capitaine et gouverneur de Saint Germain, et premier gentilhomme de la chambre. Il le fit duc non verifié ou à brevet en 1675. La duchesse du Lude, dame d’honneur de madame la Dauphine-Savoie, etoit sa seconde femme et veuve sans enfants. Il vendit sa charge de premier gentilhomme de la chambre, pour payer l’artillerie, au duc de Gesvres, qui etoit capitaine des gardes du corps, et le Roi fit offrir cette derniere charge en dedommagement à Puyguilhem, dans la Bastille. Puyguilhem, voyant cet incroyable et prompt retour du Roi pour lui, reprit assez d’audace por se flatter d’en tirer un plus grand parti, et refusa. Le Roi ne s’en rebuta point. Guitry alla precher son ami dans la Bastille, et obtint à grand peine qu’il auroit la bonté d’accepter l’offre du Roi. Des qu’il eut accepté, il sortit de la Bastille, alla [p. 45] saluer le Roi, et preter serment de sa nouvelle charge, et vendit les dragons. »

Saint-Simon, Louis de Rouvroy (duc de)

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la Cour d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, lundi 10 janvier 1689
[…] L’abbé Tetu est dans une insomnie qui fait tout craindre. Les medecins ne voudroient pas repondre de son esprit ; il sent son etat et c’est une douleur : il ne subsiste que par l’opium ; il tache de se divertir, de se dissiper, il cherche des spectacles. Nous voulons l’envoyer à Saint Germain pour y voir le roi, la reine d’Angleterre et le prince de Galles : peut on voir un evenement plus grand et plus digne de faire de grandes diversions ? Pour la fuite du roi, il paroit que le prince [d’Orange] l’a bien voulu. Le roi fut envoyé à Excester où il avoit dessein d’aller : il etoit fort bien gardé par le devant de sa maison, et toutes les portes de derriere etoient ouvertes. Le prince n’a point songé à faire perir son beau père ; il est dans Londres à la place du roi, sans en prendre le nom, ne voulant que retablir une religion qu’il croit bonne et maintenir les loix du pays sans qu’il en coute une goutte de sang : voilà l’envers tout juste de ce que nous pensons de lui ; ce sont des points de vue bien differents. Cependant, le Roi fait pour ces Majesté angloises des choses toutes divines ; car n’est ce point etre l’image du Tout Puissant que de soutenir un roi chassé, trahi, abandonné ? La belle ame du Roi se plait à jouer ce grand role. Il fut au devant de la reine avec toute sa maison et cent carrosses à six chevaux. Quand il aperçut le carrosse du prince de Galles, il descendit et l’embrassa tendrement, puis il courut au devant de la reine qui etoit descendue, il la salua, lui parla quelque tems, la mit à sa droite dans son carrosse, lui presenta Monseigneur et Monsieur, qui furent aussi dans le carrosse, et la mena à Saint Germain, où elle se trouva toute servie comme la reine, de toutes sortes de hardes, parmi lesquelles etoit une cassette tres riche avec six mille louis d’or. Le lendemain, il fut question de l’arrivee du roi d’Angleterre à Saint Germain, où le Roi l’attendoit : il arriva tard ; Sa Majesté alla au bout de la salle des gardes au devant de lui ; le roi d’Angleterre se baissa fort, comme s’il eut voulu embrasser ses genoux ; le Roi l’en empecha et l’embrassa à trois ou quatre reprises fort cordialement. Ils se parlerent bas un quart d’heure ; le Roi lui presenta Monseigneur, Monsieur, les princes du sang et le cardinal de Bonzi ; il le conduisit à l’appartement de la Reine, qui eut peine à retenir ses larmes. Apres une conversation de quelques instans, Sa Majesté les mena chez le prince de Galles, où ils furent encore quelque tems à causer, et les y laissa, ne voulant point etre reconduit, et disant au roi : « Voici votre maison, quand j’y viendrai vous m’en ferez les honneurs, et je vous les ferai quand vous viendrez à Versailles ». Le lendemain, qui etoit hier, madame la Dauphine y aller, et toute la Cour. Je ne sais comme on aura reglé les chaises de ces princesses, car elles en eurent à la reine d’Espagne, et la reine mere d’Angleterre etoit traitée comme fille de France : je vous manderai ce detail. Le Roy envoya dix mille louis d’or au roi d’Angleterre. Ce dernier paroit vieilli et fatigué, la reine maigre et des yeux qui ont pleuré, mais beaux et noirs, un beau teint un peu pale, la bouche grande, de belles dents, une belle taille et bien de l’esprit ; tout cela compose une personne qui plait fort. Voilà de quoi subsister longtems dans les conversations publiques. »

Récit par le nonce Gualterio de la mort de Jacques II à Saint-Germain-en-Laye

« Su l’avviso che giunse la notte de 12 del corrente dello stato pericolossimo in cui si trovava il Re britannico stimo il nunzio a proposito di traferirsi la matina seguente alla corte de San Germano. Vi trovo S. M.tà con febre, che gli ripligliava per fino a tre volte il giorno con una prostratione totale di forze, e con una sonnolenza gravissima, la quale lo faceva continuamente dormire senza pero impedirgli di riscuotersi ogni volta che volevano dirgli qualche cosa e di rispondere adattatamente con uso di ragione che ha conservato sempre intierissimo per fino all’ultimo. I medici lo facevano fino d’allora disperato, onde il nunzio predetto credette che per edificazione delle due corti e per dimostratione di riconoscenza ad un prencipe ch’era stato coisi fedele alla Chiesa gli corresse debito di assistergli per fino all’ ultimo respiro, si come ha fatto in effetti non abbandonandolo né giorno né notte dal martedi matina perfino al venerdi sera in cui rese l’anima a Dio. Continuo è stato altresi il concorso d’' prencipi della case reale e de gran signori che sono andati a sapere di mano in mano lo stato della sua salute, mà tra gli altri si è distinto con particolari marche d’affetto il sig. prencipe di Conti che per essere cugino germano della Regina ha voluto usare con essa particolari finezze restendo tutti que’ giorni dalla matina per fino alla sera in San Germano. Il Re ha mandato ogni giorno più signori della prima sfera ad informasi dello stato delle cose, et il mercordi dopo desinare vi venne egli stesso in persona. Il nunzio si ritrovava nella stanza della Regina quando fù portato l’avviso della sua venuta. S. M.tà gli disse che non haverebbe voluto che il Re Christianissimo passasse per la stanza dell’infermo, dubitando che si come s’erano sempre teneramente amati cosi potesse seguire una vicendevole commotione in vedersi, e lo incarico di procurare d’indure S. M.tà a passare per un picciolo balcone al di fuori. Il nunzio prego il sig. duca di Lauson [Lauzun] ad insinuarlo a S. M.tà, il quale non fece difficoltà di prendere quella strada mà trovato poi esso nunzio sul medesimo balcone gl’espresse un sommo desiderio di vedere onninamente il Re Britannico, in maniera che si concerto che cio sarebbe seguito appresso la visita della Regina. Entrata S. M.tà nella di lei stanza, fece instanza che si chiamasse il prencipe di Galles. Venuto questi rimasero tutti tre soli, mà si è poi saputo per bocca del Re medesimo che il picciolo prencipe si come era stato un tempo considerabile senza vedere la madre cosi subito che fù entrato nella camera senza riguardo del Re presente gli si getto al collo e ivi con molte lagrime s’abbracciarono cosi teneramente che il Re dice d’havere havuto della pena a distaccarli l’uno dell’alltra. La Regina a cui tratanto il. Re haveva communicato la propria intentione notifico al prencipe la risoluzione presa da S. M.tà di riconoscerlo e trattarlo da Re ogni volte che venisse a mancare il Re suo padre. Il fanciullo che non havea notizia alcuna dell’avvenimento e che non poteva havere ne tampoco sepranza nientedimeno riceve tal avviso come se vi fosse stato preparato, e gettandosi a i piedi del Re gli desse queste precise parole: Io non mi scodero mai che sete voi che mi fate Re, e qualsivolglia cosa che mi succeda impiergaro questa dignità a farvi conoscere la mia riconoscenza. Il Re gli disse che lo faceva volontieri mà sotto conditione che conservasse sempre immutabile le religione cattolica, in cui era stato educato, mentre se fosse stato mai possibile ch’egli l’abandonnasse o volesse anche solamente nasconderla non solo perderebbe affatto la sua amicitia mà sarebbe risguardato con horrore di tutti gl’huomini da bene che sono nel mondo e come l’ultimo e il più vile degl’huomini. A che il prencipe rispose con le proteste della maggiore costanza. Più altre cose furono dette vicendevolmente sopra lo stesso argomento; dopo di che il prencipe si ritirà et essendo uscito dalla camera dirottamente piangendo dette motivo a milord Perth suo governatore di dimandargli che cosa gl’havesse detto il Re di Francia: mà gli rispose che ne haveva promesso il segreto a S. M.tà e che non poteva violarlo. In effetti non vole dirle cosa alcuna. Bensi tornato al suo appartamente si rinchiuse nel gabinetto e si pose a scrivere e domandatogli dal governatore medesimo cio che notasse disse senz’ altro ch’era il discorso tenutogli dal Re Christianissimo, il quale voleva poter rileggere tutti i giorni della sua vita.
S. M.tà fini tratanto la visita della Regina et accostandosi al letto del Re infermo gli fece i più cordiali complimenti. L’altro assopito nella sua sonnolenza habbe sul principio qualche difficoltà a riconoscerlo e l’andava ricercando quasi sospeso con gl’occhi, mà rivoltosi finalmente alla parte ove il Re era, tosto che l’hebbe veduto pose la bocca al riso e dimostro un estremo piacere. La ringratio poi di tutte le finezze le quali qu’usava e singolarmente d’havergli mandato il giorno antecedente il suo primo medico. Dopo varie espressioni d’affetto il Re Christianissimo disse che haverebbe voluto parlare di qualche negozio a S. M.tà Britannica. Ciascheduno volea ritirasi per rispetto mà il Re comando che tutti si fermassero et alzando la voce disse che volea assicurarlo che quando Dio havesse fatto altro di lui, haverebbe presa cura particolare del principe di Galles, e non minore di quella che potesse haverne esso stesso se fosse vivo; che dopo la sua morte lo riconoscerebbe per Re e lo trattarebbe nella medesima forma con cui haveva trattato lui medesimo. Cio che gli rispondesse il Re Britannico non pote udirsi perchè l’Inglesi, de’ quali era piena la camera e che non solamente non s’attendevano ad una tale dichiaratione mà per il contrario haveano probabilità tali da credere tutto l’opposto dettero tutti un’alto grido di Viva il Re di Franci, e gettandosi a i piedi di S.M.tà gli testimoniaronon la loro gratitudine d’une maniera che quanto era più viva et in un certo modo lontana dal rispetto ordinario tanto maggiormente mostrava i sentimenti de loro cuori. Il nunzio dopo haver dato luogo a tal transporto di gioia in quelle genti s’accosto ancor’egli a S. M.tà e gli disse che lo ringratiava a nom di tutta la Chiesa dell’atto eroïco il qual veniva di fare, pregando Dio a volerglielo ricompenzare con altretante fecilità. S. M.tà rispose allora con somma benignità e poi esso nunzio essendo andato servendolo per fino alla carrozza lo richiamo per strada e gli soggiunse ch’egli ben sapeva di quale importanza poteva essere tale risoluzione e conosceva le difficoltà che potevano esservi state mà che il rispetto della religione havea sorpoassato ogni cosa e ve lo haveva unicamente determinato. Si sa poi S. M.tà haver detto in appresso che ben conosceva tutti gli pregiuditii che poteva recargli una cosi fatta determinazione, la quale haverebbe dato pretesto al prencipe d’Oranges d fare de’ strepiti in Inghilterra di suscitargli contro il Parlemento e forse di caggionargli la guerra mà che havea voluto che gl’interessi della religione passassero innazi a tutte le altre cose, lasciando a Dio la cura del resto. In effetti si penetra che la maggior parte del Consiglio fosse di contraria opinione e che l’operato si debbia al solo arbitrio del Re. E’vero che i prencipi della casa reale erano stati di tal desiderio et hanno dimostrato una somma sodisfazione del successo; il duca di Borgogna particolarmente, che se n’espresse ne’ termini più forti che possino imaginarsi.
Ritornando al Re defonto è certo che questa è stata la maggiore consolazione che potesse havere morendo, mentre altro affare temporale non gl’occupava la mente. Ne ha dati altresi gli contrassegni maggiori mentre ordino subito che il prencipe si traferisse a Marli per ringraziarne S. M.tà se bene la Regina non giudico poi d’inviarvelo havendosi mandato in sua vece milord Midleton suo primo ministro. La matina seguente si fece chiamare di bel nuovo esso prencipe e parlandogli del medesimo affare gli ricordo la fedeltà a Dio, l’ubidienza alla madre e la riconoscenza al Re Christianissimo. Né poi ha parlato con alcun prencipe o signore della corte di Francia che non gl’habbia tenuto ragionmento sopra di cio et espressegli le grandi obligazioni che sentiva sù tale soggetto. Queste sono state le sole parole ch’egli habbia impiegate negl’affari del mondo. Tutto il rimanente non ha risguardolo che il Cielo, eccitando di tempo in tempo i preti e i religiosi che l’assistevano a dire delle orazioni, scegliendo esso stesso quelle che maggiormente desiderava e sopra tutto mostrando un sommo desiderio et una somma divozione della messa, recitandosi la quale egli che nel rimanente del tempo soleva essere addormentato si è sempre tenuto con gl’occhi aperti e facendo con la testa tutti que’ segni di venerazione che la sua positione e la sua debolezza potevano permettergli all’elevazione. Fino agl’ultimi respiri è stato udito recitare delle preghiere et allorché gli manco la voce fù veduto movere a tal ogetto le labra. Oltre di cio ha dimostrata una tranquilità d’animo infinita et una rassegnatione eroica al divino volere: consolandro egli stesso la Regina del dolore che dimostrava per la sua perdita. Ha finalmente dell’infermità et havendo sempre riposto che stava bene. Ha habuto una esatta ubidienza alle ordinationi de’ medici et ha preso senza replica tutto quello che hanno voluto dargli benche vi havesse per altro ripugnanza. Finalmente ha havuto sempre il giuditio sanissimo e la mente etiandio più pronta e più libera di quella che l’havesse per molti mesi antecedenti. Gli è durato de lunedi fino al venerdi sempre in una specie d’agonia patendo varii accidenti che di tanto in tanto facevano crederlo vicino a morire e risorgendo un momento appresso. Gl’ultimi singulti della morte furono brevi e non durarono lo spatio d’un hora e mezza ancor’essi assai miti e cher per quanto pote osservarsi non gl’erano un gran tormento. Spiro venerdi alle tre e mezza della sera pianto con caldissime lagrime da suoi tanto cattolici che protestanti, i quali l’hanno tutti per tanti giorni servito con un’amore et attenzione indicibile. La Regina non ha fatto un tutto questo tempo che piangere mà senza pero abandonare la cura degl’affari correnti. Morto il Re le più grandi angoscie mà persuasa alla fine di lasciarsi mettere in carrozza si è trasferta ad un convento delle monache della Visitatione posto in un villaggio vicino a Parigi per nome Challiot ove si tratterrà fino lunedi sera. Il Re s’era offerto di accompagnarvela in persona mà non ha voluto permetterglielo. Si ritroverà bene a S. Germano nel ritorno che S. M.tà vi farà per riporla nel suo appartamento, et allora si crede che visitarà la prima volta il successore in qualità di Re.
Il nunzio credette di non dover frapporre indulgio alcuno a far questa parte per dare un’esempio autentico agl’ altri ministri e per dimostrare tant maggiormente al nuovo Re la benevolenza della Sede Apolostica, onde passo subito a complimentarlo nel sup appartamento, dicendogli che nel gravissimo dolore che la Chiesa sentiva per la perdita d’un membro cosi principale qual era il Re defunto non poteva invenire maggiore consolazione di quella che gli proveniva dal riconoscerne S. M.tà per successore, non dubitendo che dovesse essere herede ugualmente delle virtù che delle corone del Padre e particolarmnte in cio che risguarda la costanza nella religionez per cui quel principe era stato cotanto glorioso. Rispose che S. S.tà poteva essere certa di haverlo sempre altretanto ubidiente quanto sia stato suo padre. Le disposizioni venture di quella corte non sono per ancora mote mà si avviseranno in appresso. In quanto alle ossequie S. M.tà Christianissima voleva fargliela fare reali a sue spese mà il Re defonto raccommando d’essere sepolto senze pompa e la Regina ha poi talmente insisito sopra la medesima istanza che si à rimasto di far transportare il cadavere senza pompa alle benedittine inglesi per tenervelo in deposito per fino a tanto che piaccia a Dio di disporre le cose in maniera da poterlo riportare nel sepolcro de suoi maggiori in Inghilterra. Ha bensi S. M.tà fatto fare un cuore d’argento dorato coronato alla reale per rinchiudervi quello del del defonto già trasferito segretamente a Challiot per essere risposto vicino a quello della Regina sua madre che si conserva nel medesimo luogo. Pensa inoltre a tutto cio che possa essere di sollievo, di conforto e di commodità alla Regina e procura d’usargli tutte le finezze possibili per consolarla. Il che si rende più necessario quanto l’afflittione dell’animo reca alla medesima pregiudizio anche nel corpo, trovandosi hoggi travagliata da mali di stomaco e da una straordinaria debolezza benche speri che le cose non siano per passare più oltre. »

Gualterio, Filippo Antonio

Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans les souvenirs de la comtesse de Caylus

« [p. 479] Nous arrivames ensemble à Paris, où madame de Maintenon vint aussitôt me chercher et m’emmena seule à Saint Germain. Je pleurai d’abord beaucoup, mais je trouvai le lendemain la messe du Roi si belle que je consentis à me faire catholique, à condition que je l’entendrois tous les jours, et qu’on me garantiroit du fouet. C’est là toute la controverse qu’on employa et la seule abjuration que je fis.
M. de Cheteau Regnault eut ordre d’envoyer mon frere à la Cour. Il y arriva presque aussitôt que moi et fit une plus longue resistance. Mais enfin il se rendit, on le mit à l’academie et il quitta la marine.
[…]
[p. 481] J’arriva à Saint Germain au mois de janvier 1681. La Reine vivoit, monseigneur le Dauphin etoit marié depuis un an, et madame de Maintenon, dans une faveur eclatante, paroissoit aussi bien avec la Reine qu’avec le Roi. Cette princesse attribuoit à la nouvelle favorite les bons procedés que le Roi avoit pour elle depuis quelque temps, et elle la regardoit avec raison sur un pied bien different des autres.
Mais, avant de parler des choses que j’ai vues, il est bon de raconter celles que j’ai entendu dire.
J’ai pu voir madame de Fontanges mais, ou je ne l’ai pas vue, ou il ne m’en souvient pas. Je me souviens seulement d’avoir vu pendant quelque temps, à Saint Germain, le Roi passer du chateau vieux au neuf pour l’aller voir tous les soirs : on disoit qu’elle etoit malade, et en effet elle partit quelques mois apres pour aller mourir à Port Royal de Paris. Il courut beaucoup de bruits sur cette mort, au desavantage de madame de Montespan, mais je suis convaincue qu’ils etoient sans fondement. […]
Je me souviens aussi d’avoir souvent entendu parler de madame de La Vallière. On sait qu’elle a precedé madame de Montespan, et ce n’est pas l’histoire de chaque maitresse que je pretends faire, je veux seulement ecrire les faits qui me sont demeurés plus particulierement dans l’esprit, soit que j’aie eté temoin, ou que je les aie entendu raconter par madame de Maintenon.
Le Roi prit donc de l’amour pour madame de Montespan dans le temps qu’il vivoit avec madame de La Valliere en maitresse declarée ; et madame de Montespan, en maitresse peu delicate, vivoit avec elle : meme table et presque meme maison. Elle aima mieux d’abord qu’il en usat ainsi, soit qu’elle esperat par là abuser le public et son mari, soit qu’elle ne s’en souciat pas, ou que son orgueil lui fit plus gouter le plaisir de voir à tous les instans humilier sa rivale, que la delicatesse de sa passion ne la portoit à la crainte de ses charmes. Quoi qu’il en soit, c’est un fait certain. Mais un jour, fâchée contre le Roi pour quelque autre sujet (ce qui lui arrivoit souvent), elle se plaignit de cette communauté avec une amertume qu’elle ne sentoit pas : elle y trouvoit, disoit elle, peu de delicatesse de la part du Roi. Ce prince, pour l’apaiser, repondit avec beaucoup de douceur et de tendresse, et finit par lui dire que cet etablissement s’etoit fait insensiblement. « Insensiblement pour vous, reprit madame de Montespan, mais tres sensiblement pour moi. »
[…]
[p. 489] Un jour que le carrosse de madame de Montespan passa sur le corps d’un pauvre homme sur le pont de Saint Germain, madame de Montausier, madame de Richelieu, madame de Maintenon et quelques autres qui etoient avec elle en furent effrayées et saisies comme on l’est d’ordinaire en pareille occasion : la seule madame de Montespan ne s’en emut pas et elle reprocha meme à ces dames leur foiblesse. « Si c’etoit, leur disoit elle, un effet de la bonté de votre cœur et une veritable compassion, vous auriez le meme sentiment en apprenant que cette aventure est arrivée loin comme pres de vous. »
[…]
[p. 508] La guerre commença en 1688 par le siege de Philisbourg et le roi d’Angleterre fut chassé de son trone l’hiver d’apres. La reine d’Angleterre se sauva la premiere avec le prince de Galles son fils, et la fortune singuliere de Lauzun fit qu’il se trouva precisement en Angleterre dans ce temps là. On lui sut gré ici d’avoir contribué à une fuite à laquelle le prince d’Orange n’auroit eu garde de s’opposer. Le Roi cependant l’en recompensa comme d’un grand service rendu aux deux couronnes. A la priere du roi et de la reine d’Angleterre, il le fit duc et lui permit de revenir à la Cour où il n’avoit paru qu’une fois apres sa prison. M. le Prince, en le voyant revenir, dit que c’etoit une bombe qui tomboit sur tous les courtisans.
Si le prince d’Orange n’avoit pas eté faché de voir partir d’Angleterre la reine et le prince de Galles, il fut encore plus soulagé d’etre defait de son beau pere.
Le Roi les vint recevoir avec toute la politesse d’un seigneur particulier qui sait bien vivre, et il a eu la meme conduite avec eux jusqu’au dernier moment de sa vie.
M. de Montchevreuil etoit gouverneur de Saint Germain, et comme je quittois peu madame de Montchevreuil, je voyois avec elle cette Cour de pres. Il ne faut donc pas s’etonner si, ayant vu croitre le prince de Galles, naitre la princesse sa sœur et reçut beaucoup d’honnetetés du roi et de la reine d’Angleterre, je suis demeurée jacobite, malgré les grands changemens qui sont arrivés en ce pays ci par rapport à cette cause.
La reine d’Angleterre s’etoit fait hair, disoit on, par sa hauteur, autant que par la religion qu’elle professoit en Italienne, c’est à dire qu’elle y ajoutoit une infinité de petites pratiques inutiles partout et beaucoup mal placées en Angleterre. Cette princesse avoir pourtant de l’esprit et de bonnes qualités, qui lui attirerent de la part de madame de Maintenon une estime et un attachement qui n’ont fini qu’avec leurs vies
Il est vrai que madame de Maintenon souffroit impatiemment le peu de secret qu’ils gardoient dans leurs affaires, car on n’a jamais fait de projet pour leur retablissement qu’il n’ait eté aussitôt su en Angleterre qu’imaginé à Versailles. Mais ce n’etoit pas la faute de ces malheureuses Majestés : ils etoient environnés à Saint Germain de gens qui les trahissoient, jusqu’à une femme de la Reine et pour laquelle elle avoit une bonté particuliere, qui prenoit dans ses proches les lettres que le Roi ou madame de Maintenon lui ecrivoient, les copioit pendant que la reine dormoit et les envoyoit en Angleterre. Cette femme s’appeloit madame Strickland, mere d’un petit abbé Strickland qui, dans ces derniers temps, digne heritier de madame sa mere, a pretendu au cardinalat par son manege. »

Le Valois de Villette de Murçay, Marthe-Marguerite

Acte de baptême de Louise Marie d’Angleterre dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, Louis XIV étant son parrain

« Ce jourd’hui vingt troisieme d’aoust mil six cent quattre vingt douze, ont estez suppleez les ceremonies du baptesme dans la chapelle du chasteau vieil de Saint Germain en Laye à Louise Marie, princesse d’Angleterre, fille de tres haut et tres puissant et tres excellent prince Jacques second, par la grace de Dieu roy de la Grande Bretagne, et de tres hautte, tres puissante et tres excellente princesse Marie Eleonor d’Est, princesse de Modene, son espouze, née audit chasteau de Saint Germain en Laye le vingt huitieme juin de la presente année, aiant estée ondoyé en la chambre de laditte reine par un de ses aumoniers, et lesdittes ceremonies du baptesme lui ont estez suppleez par monseigneur l’eminentissime cardinal de Bouillon, grand aumonier de France, en presence de messire François Converset, prestre, docteur de Sorbonne, abbé de Nostre Dame de Sully, prieur et curé dudit Saint Germain, lequel a porté les saintes huilles revestu de surplis et d’estolle, le parrain tres haut, tres puissant et tres excellent prince Louis quatorze, par la grace de Dieu roy de France et de Navarre, la marainne tres haute et tres puissante princesse Elizabeth Charlotte, princesse palatine du Rhin, duchesse de Baviere, espouse de tres haut et tres puissant prince Philippes de France, frere unique du Roy, duc d’Orleans, de Valois, de Chartres et de Nemours, lesquels ont signé.
Louis, Jacques R., Maria R.
Elisabeth Charlotte
Le card. de Bouillon, l’abbé Converset »

Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans les mémoires du marquis de Sourches

« [tome 1, p. 48] 12 novembre 1681. Voilà dans quel état se trouvoient les affaires de France quand le Roi, songeant à venir se délasser à Saint Germain en Laye des fatigues de son voyage, partit de Soissons et, ayant diné à Verte Feuillée, vint coucher à Villers Cotterets […].
[p. 50] [13-14 novembre 1681] De Villers Cotterets, le Roi vint diner à Nanteuil, gros château qui appartient à la maison d’Estrées, et de là coucher à Dammartin, d’où il partit le lendemain de bonne heure pour venir diner au Bourget et se rendre à Saint Germain sans passer dans Paris, ce qu’il executa heureusement.
La premiere scene qui parut apres son retour à Saint Germain fut la reconnaissance des deux enfants qu’il avoit de madame de Montespan qui n’etoient pas encore connus. Le garçon se nomma M. le comte de Toulouse, la fille porta le nom de mademoiselle de Blois. […]
[p. 55] [novembre-décembre 1681] La cour étant à Saint Germain, où elle devoit passer l’hiver, commençoit à voir des comedies et des divertissements melés de musique. Mais l’inquietude qu’on eut d’une indisposition de madame la Dauphine, qui faisoit appréhender pour sa grossesse, suspendit les plaisirs des courtisans pour quelques jours, au bout desquels, la grosses de madame la Dauphine se confirmant, ils recommencerent à nouveau, et monseigneur le Dauphin, pour complaire à madame la princesse de Conti, qui aimoit la danse [p. 56] passionnément et qui y reussissoit au dessus de toutes les personnes de son siecle, dansa plusieurs entrees avec elle, et d’autres hommes et dames de la cour, dans les entr’actes des comédies de Pourceaugnac et de Jourdain.
[…]
[p. 65] 1er janvier 1682. Le premier jour de l’année 1682, le Roi fit monseigneur le Dauphin chevalier de l’ordre du Saint Esprit, avec les ceremonies accoutumées. Sa Majesté, comme grand maitre de l’ordre, assembla, selon les statuts, le chapitre dans [p. 66] son cabinet, et proposa le nouveau chevalier, qu’on n’eut point de peine à recevoir. Le Roi, ni les chevaliers, n’etoient point dans leur grand habit de ceremonie, mais seulement en habit de ville, c’est à dire en manteau noir, et les prelats en rochet et camail ; pour Monseigneur, comme c’étoit pour lui que la cérémonie se faisoit, il avoit son habit de novice. Son capot de velours noir étoit chamarré de toutes les pierreries de la Couronne, hormis d’un diamant qui se nommoit le grand Sancy ; il en avoit aussi une magnifique enseigne au retroussis de sa toque de velours. La messe fut chantée par M. l’archevêque d’Auch, commandeur de l’ordre, en présence de tous les commandeurs et chevaliers qui se trouvoient à la cour et qui purent marcher, et des grands et petits officiers de l’ordre. Les grands étoient : M. le cardinal de Bouillon, grand aumonier de l’ordre ; M. de Louvois, chancelier ; M. le president de Mesmes, prevot ou maitre des ceremonies de l’ordre ; M. de Seignelay, tresorier ; et M. de Chateauneuf, greffier ou secretaire.
Après que Monseigneur eut eté fait chevalier et qu’il en eut [p. 67] preté le serment entre les mains du Roi à la fin de la messe, il revint avec Sa Majesté, en ceremonie, comme il etoit venu, jusques à la chambre du Roi, hormis que, au lieu de son capot de velours noir chamarré de pierreries, il etoit revetu de son grand manteau de l’ordre, qu’il avoit bien de la peine à porter.
[…]
[p. 67] Janvier 1682. Cependant la cour commençait à voir les representations de [p. 68] l’opera d’Atys, dont les vers etoient de la composition de Quinault et la musique de celle de Lulli. Monseigneur le Dauphin y dansoit deux entrées avec madame la princesse de Conti ; mais cette princesse, qui en faisoit tout l’ornement, tomba malade d’une fievre continue, avec des redoublements, qui lui dura trois semaines, ce qui n’empecha pas qu’on continuat à representer l’opera, quoiqu’avec de moindres acclamations.
Peu de jours apres arriverent les ambassadeurs du roi du Maroc : ils etoient deux ambassadeurs, suivis seulement de six ou sept autres personnes. Le premier ambassadeur, qui etoit gouverneur de la province de Tetonan, etoit un homme de quarante cinq ans ; il avoit une belle physionomie et une grande barbe grise, un peu plus arrondie que n’est celle d’un capuçin. Il etoit de la race de ces Morisques qui furent chassés d’Espagne sous le regne de Philippe II, et se vantoit d’etre de la maison des fameux Abencerages. L’autre etoit gouverneur de Salé : il avoit une mine sombre et desagreable, et passoit pour un saint parmi les siens, qui disoient meme qu’il faisoit des miracles. Leurs habits n’etoient point magnifiques, n’y ayant ni or ni soir, parce que les peuples de Maroc sont les plus reformés de tous les mahometans et qu’il ne leur est permis de porter aucune etoffe de soie ni aucune chose qui soit d’or. Quand ces ambassadeurs vinrent à l’audience, les compagnies des regiments des gardes suisses et françoises n’etoient pas sous les armes, mais les armes etoient arrangées dans la cour, et les soldats se promenoient [p. 69] derriere ; les gardes de la porte etoient en haie, sans armes ; les gardes de la prevoté etoient en haie dans la cour, sans mettre leurs mousquetons à l’epaule ; les Cent Suisses etoient rangés le long du degré, sans hallebardes ; et les gardes du corps etoient sans armes en haie dans leur salle.
Le Roi reçut les ambassadeurs assis et couvert dans sa chambre, où la Reine, madame la Dauphine et Madame, suivies de toutes les dames de la cour, etoient incognito. Le premier des ambassadeurs fit en sa langue une tres courte harangue au Roi, à laquelle Sa Majesté ne repondit que par des demonstrations d’honneteté, ensuite desquelles l’ambassadeur lui presenta une lettre de la part du roi, son maitre. Ensuite les ambassadeurs s’en retournerent de la meme manière qu’ils etoient venus.
Le lendemain, on leur fit voir l’opera, dont le spectacle les surprit agreablement.
Ils proposoient une ligue offensive et defensive avec la France et ne parloient que d’entrer avec deux cent mille hommes en Espagne. On leur fit dire de traiter avec M. de Seignelay à son retour de Dunkerque, où il etoit allé voir en quel etat etoit le port, qu’on avoit extremement accomodé depuis peu. Ils avoient amené avec eux des animaux de leur pays pour en faire present au Roi, qui etoient des lions, des autruches, et entre autres une tigresse privée que tout le monde alloit voir par rareté. […]
[p. 71] Ce fut à peu près dans les mêmes jours que, monseigneur le Dauphin etant allé chasser un loup sur l’Otie, cet animal se fit chasser si longtemps et s’en alla si loin, quoiqu’on eut tiré plusieurs coups sur lui dont il etoit blessé, qu’une heure avant la nuit Monseigneur se trouva à Gisors, qui est à douze lieues de Saint Germain. Il prit donc la resolution de quitter la chasse et de s’en revenir ; mais comme son cheval etoit rendu, il prit un cheval de poste à Magny, sur lequel il arriva à Saint Germain à dix heures du soir, suivi seulement du comte de Brionne, du comte de Marsan, de Chamarande, de deux officiers de ses gardes et d’un de ses ecuyers, lesquels portoient tour à tour un flambeau devant lui ; mais comme il s’eteignit, parce qu’il pleuvoit et qu’il faisoit un vent epouvantable, ils furent obligés de se servir d’une lanterne pendant quatre lieues. M. le prince de La Roche sur Yon et M. le duc de Vendome, qui s’opiniatrerent à suivre la chasse, furent contraints [p. 72] de faire rompre les chiens à la nuit sans avoir pris le loup, se coucherent dans un village, sans avoir un seul valet avec eux, et ne revinrent à Saint Germain que le jour suivant, sur les dix heures du matin.
[…]
[p. 77] [février 1682] Les ambassadeurs du roi du Maroc ayant traité avec M. de Seignelay et ayant signé une paix pour six années, vinrent prendre leur audience de congé au Roi, en la meme manière qu’ils avoient eu leur premiere audience, et ce fut alors qu’ils amenerent leurs presents et qu’on vit leur tigresse privee dans [p. 78] la chambre de la Reine au milieu de toutes les dames de la cour.
Peu de jours apres, les deputés du clergé en corps vinrent remercier le Roi de la bonté qu’il avoit eue d’accorder à l’Eglise de France, au sujet de la regale, plus qu’elle n’avoit osé esperer. Ce fut M. l’archeveque de Paris, president de l’assemblée, qui se tenoit dans cette capitale du royaume, lequel porta la parole et fit au roi une harangue digne de son savoir et de sa reputation.
La grossesse de madame la Dauphine continuoit toujours, au grand contentement de toute la France, et le Roi, qui devoit quitter Saint Germain au deuxieme de mars pour s’aller etablir à son chateau de Versailles, avoit changé de resolution et pris le parti de n’aller à Versailles qu’apres Pâques. On croyoit meme qu’il iroit auparavant passer un mois à Saint Cloud dans la maison de Monsieur, son frere unique, comme il l’avoit fait l’année derniere.
[…]
[p. 99] 20 avril 1682. Le 20e d’avril, le Roi quitta Saint Germain, dont les batiments qu’il y faisoit [1 : Il y faisoit faire cinq pavillons en saillie, au vieux chateau bati par François Ier, pour agrandir les appartements.] commençoient de rendre le sejour incommode, et vint s’etablir à Saint Cloud, dans la belle maison de Monsieur, son frere unique, avec dessein d’y rester jusqu’à ce que tous les appartements de Versailles fussent en etat d’etre habités. Madame la Dauphine se fit apporter en chaise à Saint Cloud, de peur que le mouvement du carrosse ne fit tort à sa grossesse.
[…]
[p. 172] 21 janvier 1685. Le bruit couroit en ce temps là que le Roi iroit passer le careme à Saint Germain, au lieu de faire le voyage de Compiegne, parce qu’il avoit eu dessein d’aller de Compiegne à Luxembourg et que Vauban lui avoit assuré depuis peu que cette place ne pouvoit pas etre de longtemps en etat de lui donner du plaisir à la voir ; mais cette nouvelle paroissoit encore peu certaine.
[…]
[p. 249] 6 juin 1685. M. l’archeveque de Paris vint, à la tete du clergé de France, dont les deputés etoient assemblés depuis trois jours à Saint Germain en Laye, selon la coutume, et il fit au Roi une tres belle harangue, apres laquelle il alla en faire autant chez Monseigneur et chez madame la Dauphine.
[…]
[p. 300] 29 août 1685. Cette mort fut suivie, de bien près, de celle de M. le duc du Lude, grand maître de l’artillerie de France, chevalier des ordres du Roi et capitaine de Saint Germain en Laye. Il laissoit une grosse depouille à la nomination du Roi. Mais elle servit, des le [p. 301] meme jour, à faire voir combien il etoit avantageux d’avoir la protection de madame de Maintenon, car le Roi donna au marquis de Montchevreuil la capitainerie de Saint Germain, et comme il y avoit un brevet de cent mille livres affecté dessus, il le transferra sur la charge de grand maitre. Il lui donna aussi les coches du Pecq, que le feu duc du Lude avoit obtenus pour en jouir pendant sa vie, et qui pouvoient valoir quatre mille livres de rente. Il paya toutes ses dettes, qui pouvoient monter à cinquante mille ecus. Il donna douze mille livres de pension à son fils, avec la survivance de la capitainerie de Saint Germain ; et deux jours apres, il lui fit epouser mademoiselle de La Marseliere, fille du feu marquis de Combourg de Coetquin, laquelle devoit avoir plus de sept cent mille livres de bien.
[…]
[p. 349] 2 janvier 1686. Le deuxième de janvier, il arriva une affaire qui fut pendant quelques jours l’entretien des courtisans.
Il y avoit à Saint Germain en Laye un curé nommé Cagnyé, natif du lieu meme, et frere d’un controleur de la maison du Roi. Cet homme avoit de tres bonnes qualités, et entre autres il faisoit de grandes aumones dans sa paroisse. Cela lui avoit attiré l’amitié de la defunte reine Marie Therese d’Autriche, à la priere de laquelle le Roi lui avoit nommé une petite abbaye nommée Royalpré ; mais comme il n’en put obtenir les bulles du Pape, parce qu’elle devoit etre possedée par un religieux, il la remit entre les mains du Roi, qui tira des mains d’un nommé Sauleus [p. 350] Sibourg (Silbour de Soleux) le prieuré de Saint Germain en Laye, qui valoit quatre à cinq mille livres de rente, moyennant des pensions qu’il lui donna sur d’autres benefices, et le donna au curé.
Quand il fut en possession, comme ce benefice avoit de fort beaux droits, il les soutint peut etre avec un peu trop de vigueur, et meme il plaida contre le Roi pour la seigneurie de la meilleure partie de Saint Germain en Laye, et contre les marguilliers de la paroisse, pretendant etre seigneur spirituel et temporel de l’eglise.
Les plaintes, qui en furent portées au Roi par un d’entre eux, nommé Antoine, qui avoit eté garçon de sa chambre et etoit alors son porte arquebuse, et les autres qui lui furent faites par plusieurs de ses officiers, obligerent Sa Majesté de renvoyer tous ces differends au jugement de M. l’archeveque de Paris. Mais comme il trouva beaucoup de difficultés à les terminer, le Roi trouva un expedient, pour n’en entendre plus parler de sa vie, qui fut de tirer du curé la demission de sa cure et de son prieuré, moyennant deux abbayes qu’il lui donna, lesquelles valoient douze mille livres de rente.
Le Roi, en faisant cela, avoit le dessein de dedommager l’abbé de Coulombs, qui etoit presentateur du prieuré et de la cure de Saint Germain, et s’attribuer la presentation à la cure et du prieuré avec tels droits qu’il jugeroit à propos ; ce qu’il pouvoit aisement faire dans toutes les regles prescrites par les canons.
La chose etant en cet etat, les habitans de Saint Germain apprirent que leur curé les alloit quitter, et comme ils lui etoient fort affectionnés, ils en furent touchés sensiblement.
Le vicaire, qui se nommoit de La Vertu, voyant, le premier jour de l’an, la plupart des habitants assemblés dans l’eglise pour entendre le sermon, monta en chaire un moment avant le predicateur ; et, leur ayant exposé la grandeur de la perte qu’ils alloient faire en perdant leur curé, il leur assura que le Roi n’avoit pris la resolution de le leur oter que par les mauvais offices que des gens malintentionnés lui avoient rendus aupres de Sa Majesté, les conviant d’aller à Versailles les supplier de vouloir leur rendre leur pasteur.
[p. 351] Apres cette harangue, il s’emut un assez grand bruit dans l’assemblée, lequel ayant fait croire à la femme et aux enfants d’Antoine qu’ils n’y etoient pas en securité, ils se retirerent precipitamment de l’eglise.
Cependant, le bruit s’apaisa ; le predicateur monta en chaire, et tout le monde l’ecouta paisiblement. Mais, apres le sermon, le vicaire de La Vertu y remonta et dit au peuple que, quelque chose qui lui en put arriver, il ne l’abandonneroit point ; qu’il iroit, à sa tete, parler au Roi à Versailles et lui redemander son curé, et qu’au reste il protestoit qu’il faistoit tout cela de son propre mouvement et sans que le curé en eut parlé.
Dès le soir meme, M. de Montchevreuil, capitaine de Saint Germain, en fut averti et en rendit compte au Roi, lui assurant meme qu’il avoit des avis certains que ces habitants, mal conseillés, devoient venir en foule le lendemain l’importuner. Mais, comme il etoit tard, le Roi ne lui ordonna que d’y aller le lendemain pour y mettre ordre.
Il le fit effectivement et, y etant arrivé devant le jour, à peine y eut il eté quelques moments qu’il entendit sonner le tocsin pour l’assemblée des paroissiens. Il courut en meme temps à l’eglise et, etant venu au pied du clocher, il y trouva un pretre qui lui nia fortement que l’on sonnat par son ordre ; mais, ayant frappé inutilement à la porte du clocher, qui etoit fermée, il la fit enfoncer et monta en haut, où il arreta deux hommes qui sonnoient. Ces miserables lui dirent qu’ils le faisoient par l’ordre du pretre qu’il avoit trouvé au pied du clocher. C’est pourquoi, etant descendu et l’y ayant encore trouvé, il l’arreta et le fit conduire avec les deux sonneurs à la prison.
Cela n’empecha pas les habitants de s’assembler, et ils vinrent le meme jour à Versailles, au nombre de six à sept cents, ayant à leur tete leur vicaire et huit autres pretres. Le Roi, les ayant vus dans sa cour, envoya querir le grand prevot pour les faire arreter ; mais, s’etant trouvé incommodé et ayant envoyé un de ses lieutenants prendre l’ordre du Roi, Sa Majesté lui commanda d’en faire arreter une trentaine des plus considerables, ce qu’il executa facilement, sur le pretexte que le Roi lui avoit ordonné d’entendre leurs raisons ; et ils se battoient à qui entreroit chez lui, par preference, pour se faire arreter.
Les huit pretres furent arretés comme les autres ; mais le [p. 352] vicaire de La Vertu ne s’y trouva pas. Cependant, étant allé le lendemain à Paris chez M. l’archeveque pour se justifier, il le fit mettre à l’officialité, où le Roi envoya aussi, deux jours apres, les autres neuf pretres qui etoient arretés. En meme temps, le Roi ordonna au prevot de Saint Germain d’informer contre ceux qui avoient formenté cette sedition, resolu de les chatier, et particulierement ceux qui se trouveroient etre officiers de sa maison ; et il decreta contre deux seulement, le Roi ayant bien voulu faire mettre les autres en liberté apres deux jours de prison.
[…]
[tome 3, p. 4] 3 janvier 1689. On sut, en ce temps là, que le Roi avoit trouvé à propos de choisir son chateau de Saint Germain en Laye pour le sejour de la reine d’Angleterre, au lieu de celui de Vincennes, qu’il lui avoit destiné d’abord, quand il sut son arrivée en France.
[…]
[p. 6] 6 janvier 1689. Le 6, la reine d’Angleterre arriva à Saint Germain avec le prince de Galles, son fils ; le Roi alla au devant d’elle jusqu’aupres de Chatou, suivi d’un grand cortege de carrosses pleins de courtisans. Quand les carrosses de la reine commencerent à paraitre, le Roi descendit du sien avec Monseigneur et Monsieur, qui l’accompagnoient, et, ayant fait arrêter le premier carrosse, dans lequel etoit le prince de Galles, il embrassa plusieurs fois ce jeune prince avec beaucoup de temoignages de tendresse. Cependant, la reine d’Angleterre, ayant eté avertie que le Roi avoit mis pied à terre, descendit aussi de son carrosse, et ils marcherent au devant l’un de l’autre avec empressement.
Le Roi la salua, aussi bien que Monseigneur et Monsieur, que le Roi lui presenta, et, apres beaucoup de marques d’amitié de part et d’autre, le Roi remit la reine dans son carrosse, dans lequel il se plaça à sa gauche, malgré toute la resistance qu’elle y fit ; Monseigneur et Monsieur se mirent dans le devant du [p. 7] carrosse, et madame de Montecuculli, dame d’honneur de la reine, avec madame Powits, gouvernante du prince de Galles, dans les deux portieres. Les carrosses arriverent en cet ordre à Saint Germain, où le Roi conduisit la reine dans l’appartement qu’il lui avoit destiné, qui etoit l’appartement de la defunte Reine, sa femme, mais augmenté de beaucoup par les batiments neufs qu’il y avoit faits. Apres quelques moments de conversation, le Roi dit à la reine qu’il vouloit aller voir le prince de Galles, et, cette princesse lui ayant offert de l’y suivre, il lui donna la main et la conduisit à l’appartement du jeune prince, où, entre autres choses, elle lui dit qu’en passant la mer elle se disoit en elle-même qu’il etoit bien heureux d’etre trop jeune pour connoitre son malheur ; mais que presentement elle le trouvoit bien malheureux de n’etre pas en etat de connoitre tutes les bontés qu’il lui temoignoit. Le Roi, n’ayant oublié aucune des honnetetés qu’il pouvoit temoigner à la reine d’Angleterre, et ne doutant pas qu’elle n’eut besoin de se reposer des fatigues du voyage, prit congé d’elle et s’en revint à Versailles, d’où il luy envoya une magnifique toilette, accompagnée de six mille louis d’or qui lui etoient bien necessaires, vu le denument où elle se trouvoit de toutes choses.
Le 7, le Roi, sachant que le roi d’Angleterre devoit arriver ce jour là à Saint Germain, parce qu’il avoit pris la poste en chaise roulante, il partit aussitot apres son diner pour l’aller attendre chez la reine d’Angleterre ; il la trouva dans son lit, qui se reposoit de la fatigue du voyage, et il s’assit à sa ruelle dans un fauteuil unique qu’on y avoit mis ; pour Monseigneur et Monsieur, qu’il avoit menés avec lui, ils se tinrent debout. Ensuite, le Roi ordonna à M. le duc de Beauvilliers d’aller se mettre en quelque endroit où il put voir arriver le roi d’Angleterre, afin de le venir avertir aussitot qu’il paroitroit. Quelques temps apres, M. de Beauvilliers vint l’avertit que le roi d’Angleterre venoit d’entrer dans la cour ; en meme temps, il se leva et, faisant une reverence à la reine d’Angleterre, il marcha au devant [p. 8] du roi, son epoux, jusqu’à la porte de la salle des gardes, qui donne sur le degré, où il l’attendit environné de toute sa cour. Le roi d’Angleterre ayant monté le degré et ayant aperçu le Roi, ils coururent tous deux d’un meme temps s’embrasser, ce qu’ils firent tres longuement et avec de grandes marques de tendresse. Le Roi dit au roi d’Angleterre : « Monsieur mon frere, que j’ai de joie de vous voir ici ! Je ne me sens pas de joie de vous voir en sureté. » Le roi d’Angleterre lui repondit par un discours moins suivi et plus entrecoupé. Apres cela, le Roi lui dit qu’il vouloit le conduire chez la reine, son epouse, et, passant à toutes les portes devant lui, il le mena effectivement chez la reine et voulut absolument qu’il la saluat dans son lit en sa presence. Les deux rois demeurerent quelque temps debout dans la ruelle de son lit ; ensuite de quoi le Roi proposa d’envoyer querir le prince de Galles ; mais comme il étoit longtemps à venir, le Roi prit le roi d’Angleterre par la main et le conduisit à l’appartement du prince, son fils, lui donnant alors la main partout. Apres qu’ils eurent eté quelque temps chez le prince de Galles, le Roi prit congé du roi d’Angleterre, lequel le voulant reconduire, il ne voulut pas le souffrir et se separa de lui en lui disant : « Je suis aujourd’hui chez moi ; demain, vous serez chez vous, et vous ferez ce que vous voudrez ». Quelques heures apres, le Roi envoya aussi une toilette au roi d’Angleterre et dix mille louis d’or pour ses necessités, jusqu’à temps qu’il lui eut fait un fonds reglé, qu’on disoit devoir aller à deux millions quatre cent mille livres par ans.
Le 8 de janvier […] [p. 9] le roi d’Angleterre vint pour la premiere fois voir le Roi à Versailles, où il reçut tous les honneurs qui etoient dus à son rang. Les regiments des gardes battirent au champ ; les gardes de la porte et de la prevoté se tinrent sous les armes dans leurs postes ; les Cent Suisses borderent le degré ; les gardes du corps se posterent sous les armes, comme quand le Roi arrive. Le Roi alla au devant de lui jusqu’au delà de la salle des gardes, où il le reçut avec toute sa cour, et le conduisit jusque dans son cabinet, dans lequel il fut assez longtemps enfermé avec lui. Après cela, il le conduisit chez madame la Dauphine, où il le laissa. Le roi d’Angleterre, y ayant eté quelque temps, alla aussi voir Monseigneur, Monsieur et madame, chez tous lesquels il ne s’assit point, parce qu’on ne savoit encore comment il les voudroit traiter ; cependant, comme la chose avoit dejà eté agitée, le Roi lui en avoit fait entendre quelques mots, et il lui avoit repondu fort honnetement qu’il l’en faisoit absolument le maitre, sur quoi le Roi lui avoit reparti que, puisuq’il en usoit de cette manière avec lui, il se declaroit en sa faveur, meme contre les princes de sa maison ; et, en effet, il regla deux jours apres que le roi et la reine d’Angleterre donneroient des fauteuils à Monseigneur, à madame la Dauphine, à Monsieur et à Madame seulement, et qu’ils ne donneroient aux autres princes et princesses de la maison royale que des sieges pliants ; en quoi il sembloit que M. le duc de Chartres et les trois filles de feu M. le duc d’Orleans se trouvoient un peu lesés car, comme ils avoient partout ailleurs de grandes prerogatives au dessus des princes et princesses du sang, comme etant petit fils et petites filles de roi, on [p. 10] auroit cru qu’ils auroient aussi du avoir en cette occasion quelque marque de distinction au dessus d’eux ; mais on ne put pas trouver moyen de leur en donner, parce que les rois ne donnent en France que des fauteuils ou des sieges pliants, et qu’ils n’admettent point les chaises à dos qui n’ont point de bras, lesquelles on avoit proposées comme un temperament en cette occasion. […]
Le 9, […] les carrosses de Madame et des princesses demeurerent pendant toute l’apres dinée dans la cour du chateau de Versailles, et l’on attendoit à tout moment qu’elles partissent pour aller à Saint Germain voir la reine d’Angleterre ; mais enfin elles ne partirent point, parce qu’on ne savoit pas encore quel traitement elle voudroit leur faire. […]
[p. 11] Le 10, Madame, madame la grande duchesse, madame de Guise et toutes les princesses du sang, tant legitimes que du coté gauche, allerent à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre ; elles ne s’assirent point chez le roi, qui les reçut debout ; mais elles s’assirent chez la reine. On mit deux fauteuils aux pieds du lit, comme dans une place indifferente ; celui [p. 12] de la droite fut occupé par Madame, celui de la gauche par la reine, et toutes les princesses s’assirent à droit et à gauche sur des sieges pliants. La visite etant faite, la reine d’Angleterre reconduisit Madame jusqu’à la porte de sa chambre, comme elle etoit venue au devant d’elle jusqu’au meme endroit ; mais il y eut une chose qui scandalisa un peu les princesses, qui fut que la reine d’Angleterre fit asseoir aupres d’elle madame de Montecuculli, sa dame d’honneur. On sut, le meme jour, que le Roi avoit decidé le traitement que la reine d’Angleterre feroit aux duchesses, qui pretendoient qu’elle les baiseroit, parce qu’elle baisoit les duchesses d’Angleterre, et qu’elles seroient assises, comme elles ont le droit de l’etre en France ; mais la reine d’Angleterre leur avoit donné le choix d’etre traitées à l’angloise ou à la françoise, c’est à dire qu’elle les baiseroit et qu’elles se tiendroient debout, comme faisoient les duchesses d’Angleterre devant elle, ou bien qu’elle ne les baiseroit point et qu’elles seroient assises, comme elles l’etoient en France. Elles s’assemblerent pour deliberer sur ce choix, et, comme elles opterent d’etre traitées à la françoise, le Roi regla qu’elles ne baiseroient pas la reine d’Angleterre et qu’elles seroient assises devant elle. […]
[p. 14] [11 janvier] On disoit aussi que le roi d’Angleterre pourroit venir demeurer au chateau de Clagny, proche de Versailles, afin d’etre plus à portée de conferer tous les jours avec le Roi ; mais il n’y avoit guere d’apparence à cette nouvelle, parce que ce chateau etoit trop petit pour loger le roi avec tous ses gens, que Versailles en etoit assez eloigné pour que le roi et la reine d’Angleterre fussent incommodés si on y avoit logé leurs domestiques, outre ce qu’il en auroit couté au Roi pour les loyers, et qu’il auroit fallu deloger tous les domestiques de M. le duc du Maine et de M. le comte de Toulouse, dont le logement auroit encore couté de grandes sommes dans Versailles. […]
[p. 15] Ce fut encore le meme jour que M. l’archeveque de Paris, etant allé à Saint Germain pour faire sa cour au roi d’Angleterre, se trouva extremement mal dans sa chambre, d’où etant sorti il tomba une seconde fois en faiblesse dans la salle des gardes, mais de telle manière qu’il perdit entierement connaissance et meme qu’il eut peur de mourir. Cependant on le transporta dans un appartement, où il revint peu à peu, et le meme jour il s’en retourna à Paris. […]
Le 12, le roi d’Angleterre fit milord Powis duc, afin que sa femme, qui etoit gouvernante du prince de Galles, put etre assise devant madame la Dauphine, car pour devant la reine d’Angleterre, les duchesses angloises ne s’y asseyoient jamais ; et ceci etoit une nouveauté, parce que les duchesses [p. 16] françoises s’asseyant devant la reine d’Angleterre, elle voulut que madame Powis eut aussi le droit de s’y asseoir, seulement quand les princesses et duchesses françoises s’y trouveroient ; et à la verité milord Powis et sa femme meritoient bien ce degré d’honneyr, puisqu’ils avoient quitté, pour la religion catholique et pour suivre le roi, leur maitre, cinquante mille ecus de rente et cinq enfants qu’ils avoient laissés dans un extreme danger. […]
[p. 17] Le 13, […] Monsieur, frère, du Roi, et MM. les princes du sang allerent voir le roi et la reine d’Angleterre ; Monsieur y alla le matin, et ils lui donnerent un fauteuil, comme ils avoient fait à Monseigneur. MM. les princes y allerent l’apres dinée, et ils n’eurent que des sieges pliants.
Le meme jour encore, la reine d’Angleterre vint à Versailles voir le Roi. Il alla au devant d’elle jusqu’au haut de son grand degré, où, l’ayant reçue, il la prit par la main et la conduisit au travers de son appartement jusqu’au salon, dans lequel, s’étant chauffés quelques moments, il s’allerent asseoir dans deux fauteuils preparés à cet effet, le Roi donnant la droite à la reine d’Angleterre. Ensuite, il ordonna qu’on apportat des sieges pliants pour Monseigneur et pour Monsieur, et en fit aussi apporter pour madame de Montecuculli et pour madame la duchesse de Powis. La conversation ayant duré un gros quart d’heure de cette manière, la reine se leva, et le Roi lui donna la main pour la mener chez madame la Dauphine par la grande galerie, et quand elle fut entrée dans la chambre de madame la Dauphine, il prit congé d’elle et se retira à son appartement. La reine fit sa visite, de meme qu’elle l’avoit faite au Roi, c’est à dire qu’elles s’assirent chacune dans un fauteuil et que les princesses et duchesses qui s’y trouverent furent assises sur des sieges pliants. Apres cela, la reine d’Angleterre alla aussi faire sa visite à Monseigneur, à Monsieur et à Madame, chez lesquels les memes ceremonies furent observées. […]
[p. 20] Le 15, […] [p. 21] le Roi alla voir le roi d’Angleterre, qui vint au devant de lui jusqu’à la porte de la salle des gardes, et lui donna de grandes marques d’empressement et même de deference. Apres un moment de conversation publique, les deux rois entrerent dans un cabinet, où ils furent enfermés pres d’une heure et demie, pendant laquelle Monseigneur alla rendre visite à la reine, que les courtisans commencerent à connoitre plus que jamais pour une princesse d’un grand cœur et d’un bon esprit, qualités qui ne lui servoient alors qu’à lui faire sentir plus vivement ses malheurs. Le Roi ayant achevé sa visite, le roi d’Angleterre voulut absolument le reconduire ; mais, sur ce que le Roi ne le vouloit pas souffrir, ils convinrent que ce jour là termineroit pour toujours entre eux toutes les ceremonies.
[…]
[p. 24] Le 21, [le roi d’Angleterre] courut le cerf avec Monseigneur dans la forêt de Saint Germain, avec l’équipage de M. le duc du Maine ; mais il n’y eut pas beaucoup de plaisir, tant à cause d’un vent de nord très froid et très violent, qui dura tout le jour, que parce qu’on ne prit point le cerf.
Le 22, le Roi alla rendre visite au roi d’Angleterre, aussi bien qu’à la reine et au prince de Galles, et puis il revint à Versailles.
[…]
[p. 30] [1er février] La première nouvelle du mois de février fut que les presbytériens d’Angleterre, c’est à dire ceux qui font profession de la religion du royaume, armoient de tous les côtés, et qu’on espéroit voir former assez de partis différents dans cet [p. 31] Etat pour n’appréhender pas qu’ils pussent faire grand tort à la France. […] On apprit aussi que deux cents hommes de troupes réglées avec leurs officiers étoient venus d’Angleterre débarquer à Dunkerque.
Ce fut alors qu’arriva aussi à Saint Germain milord Dumbarton, qu’on avoit connu en France sous le nom de milord Douglas, et qui y avoit même été lieutenant général.
Le même jour, le roi d’Angleterre cessa d’être servi par les officiers de la Bouche et du Gobelet du Roi, et commença d’être servi par les siens ; cependant le Roi lui laissa encore ses gardes du corps, de la prévôté de l’Hôtel et de la Porte, et le détachement des Cent Suisses, parce qu’il n’avoit pas encore de gens pour le garder.
[…]
[p. 32] Le 4, le roi et la reine d’Angleterre allèrent à l’abbaye royale de Saint Cyr voir la représentation de la tragédie d’Esther, composée par Racine ; elle étoit représentée par les petites pensionnaires, qui chantoient même des entractes de musique de la composition d’un nommé Moreau ; c’étoit in spectacle fort agréable, et aussi bien exécuté qu’il le pouvoit être par de jeunes enfants ; mais, le jour que le roi d’Angleterre y alla, madame la comtesse de Caylus joua le rôle d’Esther et s’attira l’admiration de tout le monde.
[…]
[p. 35] Le 10 de février, le roi d’Angleterre fit arrêter à Saint Germain par M. de Saint Viance, lieutenant des gardes du corps qui servoit auprès de lui, un Anglois nommé Barnoel, qui s’étoit venu rendre auprès de lui depuis peu de jours ; cet homme, à ce qu’on disoit, avoit changé trois ou quatre fois de religion suivant les différentes occurrences, et l’on assuroit qu’il s’étoit déchainé en invectives contre le roi, depuis son départ d’Angleterre, en présence de plusieurs personnes, dont quelques unes étoient arrivées devant lui à Saint Germain ; ensuite, n’ayant pas trouvé auprès du prince d’Orange le traitement qu’il en avoit espéré, il avoit passé en France pour se rendre auprès du roi d’Angleterre, et ce prince fit très sagement de faire arrêter un homme d’un caractère si dangereux.
[…]
[p. 37] [11 février] Ce fut en ce temps là que mourut à Saint Germain M. de Treamigny, gentilhomme des environs de Beauvais, chef du vol de la chambre pour pie, mais qui, par son assiduité et son savoir faire, avoit trouvé moyen de se faire donner par le Roi un vol pour les champs pour lièvre, pour corneille et pou milan, tous lesquels le Roi lui payoit par extraordinaire. Il avoit été longtemps forte à la mode ; mais, quoiqu’il fut un peu déchu, le Roi ne laissa pas de traiter sa famille favorablement, donnant à son fils la charge du vol de la chambre pour pie avec deux mille livres de pension, quoiqu’il n’eût que dix ou douze ans ; à l’égard [p. 38] des autres vols par commission, le Roi le révoqua, et c’étoit autant de dépense épargnée, considération fort pressante en ce temps là.
[…]
[p. 40] Le 22, le roi d’Angleterre fit arrêter et conduire [p. 41] à la Bastille milord Miljoy, grand maître de l’artillerie d’Irlande, qui avoit passé en France avec Pointis. Milord Tyrconnel, croyant avoir de grands sujets de se défier de sa fidélité, et même l’accusant d’avoir dégarni tout exprès les arsenaux d’Irlande, lui avoit dit que, comme il étoit parfaitement instruit de l’état de toutes choses, il étoit à propos qu’il vint en France en rendre compte au roi, et lui avoit donné pour cet effet une lettre de créance ; amis il en donna en même temps une toute contraire à Pointis, pour la rendre au roi secrètement, par laquelle il lui mandoit la vérité de la chose, et ce fut sur cet avis que ce prince fit arrêter milord Miljoy. Comme Pointis étoit homme d’esprit et fort intelligent dans ce qui regardoit l’artillerie, ayant même inventé la manière de jeter les bombes de dessus les barques, ce qui avoit si bien réussi à Gênes et à Alger, le Roi le donna au roi d’Angleterre pour commander son artillerie.
[…]
[p. 43] Le 25, le roi d’Angleterre alla communier publiquement dans l’église de Notre Dame de Paris, où il donna l’ordre de la Jarretière à M. de Lauzun, pour récompense des importants services qu’il lui avoit rendus, et l’après dînée il vint à Versailles prendre congé du Roi, car il devoit partir le 27, et le Roi devoit aussi le lendemain lui aller dire adieu à Saint Germain ; mais, comme il différa son départ d’un jour, le Roi différa de même ses adieux.
[…]
[p. 46] [28 février] Ce fut encore le même jour que le roi d’Angleterre partit de Saint Germain en poste pour aller s’embarquer à Brest, n’ayant pas en tout plus de vingt personnes avec lui, car M. d’Avaux avait pris les devants, aussi bien que les officiers anglois qui n’étoient pas nécessaires au roi le long de la route.
[…]
[p. 56] Le 18 [mars], la reine d’Angleterre fut attaquée d’une fièvre continue, qui ne lui dura que trois ou quatre jours, et l’on peut dire qu’elle en fut quitte à bon marché, après toutes les agitations du corps et d’esprit qu’elle supportoit depuis quelque temps.
[…]
[p. 63] [30 mars] On sut que la reine d’Angleterre venoit passer quelques jours de retraite au monastère des religieuses de la Visitation qui est à Chaillot, dans lequel la défunte reine, sa belle mère, avoit aussi accoutumé de se retirer pendant ses malheurs.
[…]
[p. 79] Le 25 [avril], le Roi cassa le comte d’Hautefort et ordonna à M. de Luxembourg de lui proposer des gens pour remplir sa place. La reine d’Angleterre, à laquelle le Roi alla ce jour là rendre visite, lui demanda sa grâce, parce qu’il avoit été le premier exempt qui eût servi auprès d’elle ; mais le Roi s’en excusa et lui fit entendre que c’étoit un homme perdu.
[…]
[p. 81] Le 29, Monseigneur, duc de Bourgogne, fit le premier voyage de sa vie, car il alla entendre la messe et dîner à Nanterre, pour y accomplir quelque vœu qu’on avoit fait pour sa santé, et de là il alla à Saint Germain rendre visite à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 244] Le 4 [juin], M. l’archevêque de Paris, qui présidoit l’assemblée générale du clergé de France, laquelle se tenoit alors à Saint Germain en Laye, vint, selon la coutume, avec tous les députés haranguer le Roi à Versailles, et il lui fit un magnifique discours qui ne lui coûta guère, étant un des plus éloquents et des plus savants hommes de son temps.
[…]
[p. 245] Le 8, M. de Torcy, secrétaire d’Etat en survivance de M. de Croissy, son père, accompagné de M. de Pontchartrain, contrôleur général, de M. de Pussort et de M. d’Argouges, conseillers d’Etat, et du conseil royal des Finances, allèrent, suivant la coutume, à Saint Germain faire de la part du Roi à MM. de l’assemblée du clergé la demande du don gratuit, qu’ils fixèrent à douze millions ; quoique cette somme fût beaucoup au dessus de celles que le clergé avoit accoutumé d’accorder, les nécessités de l’Etat étoient si bien connues, et l’affection du clergé pour le Roi si sincère, que tous les députés voulurent accorder ce que le Roi demandoit sans opiner ; mais M. l’archevêque de Paris, qui présidoit, leur représenta qu’il falloit opiner pour que la [p. 246] chose fût dans les formes, et ainsi chacun opina d’accorder les douze millions, et même davantage, si le Roi le souhaitoit. En même temps, l’assemblée députa au roi M. l’abbé de Phélypeaux, l’un des deux anciens agents qui faisoit la fonction de secrétaire de l’assemblée, pour venir apprendre à Sa Majesté qu’elle avoit fait tout ce qu’elle avoit souhaité de son service, et certainement il fut très bien reçu du Roi, qui étoit alors en son château de Marly.
Le même jour, l’assemblée du clergé envoya douze de ses députés saluer en corps la reine d’Angleterre, et ce fut M. l’archevêque d’Arles qui porta la parole, et qui fit un discours si pathétique sur l’état présent des affaires, qu’il tira les larmes des yeux de tous les Anglois qui étoient présents.
[…]
[p. 271] [22 juillet] La nouvelle qui arriva le 22 au soir déconcertoit bien tous ces beaux projets : ce fut celle de la défaite du roi d’Angleterre, n’ayant pas voulu étendre son armée pour occuper un pont qui étoit sur une rivière, laquelle séparoit son armée de celle des ennemis, et ayant oublié de le faire rompre, le prince d’Orange avoit fait défiler toute la nuit son armée sur ce pont, avoit attaqué l’armée du roi à la pointe du jour et l’avoit battue facilement, parce que tous les Irlandois avoient mis les armes bas ; que M. de Lauzun, voyant la bataille perdue, avoit envoyé M. de Léry dire au roi d’Angleterre qu’il se sauvât au plus tôt, et que pour lui il alloit faire de son mieux avec le reste de ses troupes ; et qu’effectivement le roi s’étoit retiré avec Lery, L’Estrade et quelques autres, et qu’il étoit arrivé à Brest […].
[p. 273] Aussitôt que le Roi sut ces mauvaises nouvelles, il fit partir M. de Bouillon avec trois de ses carrosses pour aller au devant du roi d’Angleterre jusqu’où il pourroit le rencontrer.
[…]
Le 25 au soir, le roi d’Angleterre arriva à Saint Germain en Laye, et le lendemain le Roi alla lui rendre visite.
[…]
[p. 332] Le [26 novembre], le roi d’Angleterre partit de Saint Germain avec M. le maréchal de Bellefonds pour aller à la célèbre abbaye de la Trappe, dont l’abbé et les religieux vivoient avec une si grande austérité qu’elle retraçoit vivement la vie de saint Bernard, leur fondateur.
[…]
[p. 343] Le 6 [janvier 1691], le roi et la reine d’Angleterre arrivèrent avec toute leur cour à Versailles, sur les six heures du roi.
[…]
[p. 359] [25 février] Il arriva ce jour-là une chose bien étrange à Saint Germain, entre deux milords anglois, frères cadres du milord Salisbury ; ils prirent querelle sur un sujet de rien, étant le soir dans leur chambre, tous deux en robe de chambre, et prêts à se mettre au lit, et la colère s’empara si fort de leurs esprits qu’ils se jetèrent à leurs épées, se battirent, et, n’ayant pas voulu ouvrir à leurs gens qui frappoient à la porte pour les séparer, ils se donnèrent l’un à l’autre plusieurs coups d’épée, dont il y en eut un qui mourut peu de jours après ; et quand on eut enfoncé la porte, on les trouva tous deux qui demandoient pardon l’un à l’autre ; et depuis, l’aîné étant mort, le cadet en eut un tel désespoir qu’il arracha tous les bandages et les emplâtres qu’on avoit mis sur ses blessures.
[…]
[p. 420] Le 15 [mai], on sut qu’il étoit arrivé à Saint Germain en Laye un envoyé d’Ecosse qui assuroit qu’il y avoit dans les montagnes quatre mille cinq cents hommes sous les armes, et qui venoit demander pour eux un secours de blé et d’argent.
[…]
[p. 443] Le même jour encore [27 juillet], le Roi ayant appris que, la nuit précédente, [le roi d’Angleterre] avoit été fort mal d’une très grande colique, il alla à Saint Germain lui rendre visite.
[…]
[tome 4, p. 4] Le [17 janvier 1692], le roi d’Angleterre, qui étoit arrivé la veille à Saint Germain, vint rendre visite au Roi à Versailles, et fut pendant quelque temps enfermé avec lui.
[…]
Le 21 [février], on sut que la reine douairière d’Angleterre devoit passer bientôt en Portugal, soit qu’elle fût devenue suspecte au prince d’Orange, soit qu’elle ne pût se résoudre à souffrir plus longtemps la domination d’un usurpateur, soit qu’elle n’eût plus l’exercice de sa religion ; et depuis elle changea de dessein, et l’on sut qu’elle devoit venir débarquer à Calais, passer à Saint Germain et y faire quelque séjour incognito, et ensuite prendre son chemin pour aller à Rome.
[…]
Le 22 [mars], milord Dumbarton, ci devant le marquis de Douglas, lieutenant général des armées du Roi et premier gentilhomme de la chambre du roi d’Angleterre, mourut d’apoplexie à Saint Germain en Laye, universellement regretté de tous les honnêtes gens, qui connoissoient sa valeur et son inviolable fidélité pour son maître.
[…]
Le 14 [avril], on sut de certitude que le roi d’Angleterre s’en alloit au premier jour en Normandie, et tout le monde crut deviner juste en disant qu’il n’y alloit que pour visiter les troupes irlandises.
Le 15, le Roi fut, au bout du pont du Pecq, la revue de ses deux compagnies de gendarmes et des chevau légers de sa garde ; le roi d’Angleterre y vint, et Leurs Majestés trouvèrent ces deux célèbres troupes parfaitement belles.
[…]
[p. 27] Le 19, on sut que le roi d’Angleterre avoit fait trois nouveaux chevaliers de la Jarretière, qui étoient le prince de Galles, son fils, milord Melfort et le duc de Powitz.
Le 20, le Roi alla dire adieu au roi d’Angleterre, et rien ne pouvoit égaler la joie de tous les Anglois qui étoient auprès de lui, car ils croyoient indubitablement qu’avec les troupes que le Roi donnoit au roi, leur maître, il alloit dans peu de jours reconquérir l’Angleterre.
Le lendemain, ce prince partir pour aller à la Trappe et de là passer en Normandie.
[…]
[p. 84] [27 juin] On eut nouvelle, ce jour là, que le roi d’Angleterre etait arrivé le 24 à Saint Germain en Laye.
[…]
[p. 90] Le premier jour de juillet, au matin, le Roi eut nouvelle que la reine d’Angleterre etoit accouchée d’une fille, et qu’elle avoit eté si peu de temps en travail que les princesses ni les ministres n’avoient pu y arriver assez tot.
[…]
[p. 99] Le 18, le Roi alla voir le roi et la reine d’Angleterre à Saint Germain et, le lendemain, il alla à Paris voir Monsieur.
[…]
[p. 114] Le 23 [août], le Roi alla à Saint Germain en Laye, où il tint avec Madame sur les fonds de bapteme la fille du roi d’Angleterre.
[…]
[p. 137] Le 11 [novembre], le grand prieur de France et le comte de Brionne tirent une course de chevaux aupres de Saint Germain ; le roi et la reine d’Angleterre, Monseigneur et tous les princes allerent la voir, et le grand prieur gagna le prix.
[…]
[p. 166] Le 3 [mars 1693], le Roi alla à Saint Germain dire adieu au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 190] Le 23 [avril], […] [p. 191] le Roi, qui etoit à Marly, alla à Saint Germain rendre visite au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 322] Le 11 [avril 1694], on apprit que quelqu’un ayant mis le feu dans la forêt de Saint Germain en Laye, on avoit eu assez de peine à l’eteindre.
[…]
[p. 420] Le 16 [janvier 1695], le Roi alla voir le roi et la reine d’Angleterre au sujet de la mort de la princesse d’Orange, et, à son retour, on sut que le roi d’Angleterre avait demandé qu’on ne lui fit point de compliments sur la mort de sa fille et qu’on n’en prit point le deuil.
[…]
[p. 453] Le 12 [mai], jour de l’Ascension […] [p. 454] on sut ce jour là que le roi d’Angleterre avoit eu deux accès de fievre.
[…]
[p. 460] Le 29, on fit à Saint Germain en Laye l’ouverture de l’assemblée ordinaire du clergé de France.
[…]
[p. 464] Le 12 [juin], l’archeveque de Paris vint de Saint Germain en Laye faire sa cour au Roi, et travailla longtemps avec Sa Majesté.
[…]
[p. 470] Le 23, le roi d’Angleterre ayant couru le cerf sans avoir mangé, parce qu’il etoit jour de jeune, et s’etant trouvé au salut avec la reine dans les eglises de Saint Germain, il y eut deux faiblesses consecutives, dont la derniere alla presque jusqu’à l’evanouissement.
[…]
[p. 472] [28 juin] On sut encore que le marquis de Montchevreuil etoit assez malade à Saint Germain, d’un rhumatisme accompagné de fievre.
[…]
[tome 5, p. 94] Le 4 [janvier 1696], on sut que […] Sa Majesté avoit donné la dignité de chef d’escadre de ses armées navales au milord grand prieur, fils naturel du roi d’Angleterre, sous le nom de duc d’Albermarle, qui lui convenoit mieux que celui de grand prieur dans la conjoncture des affaires.
[…]
[p. 102] Le 27, on sut que la reine d’Angleterre avoit la fièvre assez violente.
[….]
[p. 112] Le 27 [février], le Roi alla à Saint Germain voir le roi d’Angleterre et lui faire ses adieux, et ce fut alors qu’on apprit que le maréchal de Boufflers travailloit en diligence à Dunkerque à faire un embarquement de douze mille hommes pour passer en Angleterre, où on assuroit qu’il y avoit des apparences considérables de révolte contre le prince d’Orange, aussi bien qu’en Ecosse ; que le duc de Berwick étoit à Londres et qu’il mandoit qu’il y avoit un parti considérable formé pour recevoir le roi Jacques ; que ce seroit le marquis d’Harcourt qui commanderoit les troupes de l’embarquement et qu’il étoit parti le même jour à cet effet ; que le duc de Berwick serviroit sous lui en qualité de lieutenant général, le comte de Pracomtal et Albergotti, en qualité de maréchaux de camp, Barzun, en qualité de commandant de la cavalerie, le marquis de Mornay, le duc d’Humières et le marquis de Biron en qualité de brigadiers d’infanterie ; que Lanson, enseigne des gardes du corps, serviroit auprès du roi d’Angleterre et qu’enfin on croyoit avoir trouvé la conjoncture fatale au prince d’Orange, parce qu’il n’avoit point de flotte ni de troupes et que l’affaire du changement des monnoies faisoit beaucoup de mécontents en Angleterre.
[…]
[p. 113] Le 29, on sut que le roi d’Angleterre étoit parti le soir précédent, qu’il s’est arrêté à Saint Denis pour y faire une protestation par devant notaires comme il partoit dans le dessein d’aller rentrera dans son royaume, où il étoit rappelé par les prieres de ses peuples. On ajoutoit qu’on avoit fait partir cent mille louis d’or pour Calais, où ce prince devoit s’embarquer.
On apprit aussi le détail des troupes qui s’embarquoient, qui étoit dix huit bataillons : les deux régiments de Poitou, celui de Crussol, les deux de Languedoc, les deux d’Humières, celui du Vexin, celui de la Marche, celui de Santerre, celui [p. 114] d’Orléanois, les deux d’Artois, les deux de Vermandois, celui d’Agenois, celui de Montferrat et celui de Saint Second ; trois régiments de cavalerie qui étoient le régiment du Roi, celui d’Anjou et celui de Berry ; et deux régiments de dragons, le Colonel général et celui de Frontenay. On disoit encore que Gabaret commanderoit cet embarquement et que sa flotte seroit composée de neuf gros vaisseaux et de vingt frégates. Il y avoit beaucoup de gens qui croyoient que cet armement alloit descendre en Ecosse ; cependant Monsieur, frère du Roi, assura ce jou là qu’il alloit droit en Angleterre ; et la chose auroit été facile, s’il avoit été vrai, comme on le disoit, que la flotte angloise commandée par Spithal, qui portoit à Cadix des matelots et des provisions, fût sortie de la Manche.
[…]
[p. 116] Le 6 [mars], on assuroit que la flotte de Spithal avoit eté repoussé par les vents dans les ports d’Angleterre, ce qui etoit fort contraire aux desseins du roi Jacques. On assuroit cependant que le Roi lui avoit encore envoyé deux cent mille livres, et que la reine, son epouse, engageoit toutes ses pierreries pour lui envoyer de l’argent.
[…]
[p. 120] Le 20, […] on apprit aussi que le roi d’Angleterre etoit encore à Calais et que l’on avoit fait partir sa chambre et sa vaisselle d’argent pour qu’il eut toutes ses commodités au lieu où il sejourneroit.
[…]
[p. 137] Le 5 [mai], le roi d’Angleterre arriva à Saint Germain, et, selon les apparences, ce n’etoit pas pour en partir sitot. […]
Le 6, […] l’après dinée, le Roi alla visite le roi d’Angleterre à Saint Germain.
[…]
[p. 145] Le 2 [juin], le roi et la reine d’Angleterre partirent de Saint Germain en Laye pour aller à Chartres, où ils devoient sejourner un jour pour y faire leurs devotions, et de là passer à la celebre abbaye de la Trappe, où ils devoient faire un pareil sejour, et de là venir coucher à Anet, d’où ils devoient revenir à Saint Germain.
[…]
[p. 146] Le 5, on sut que le prince de Galles avoit la rougeole, ce qui etoit capable de donner de grandes inquietudes au roi et à la reine d’Angleterre pendant leur voyage de devotion à Chartres et à la Trappe, mais cette maladie n’eut pas de suites facheuses.
[…]
[p. 159] Le 27, […] l’on sut que la reine d’Angleterre avoit depuis deux jours une grosse fievre. Mais le lendemain, on apprit qu’elle l’avoit quittée par l’habileté de son premier medecin, qui l’avoit purgée au fort de son mal.
[…]
[p. 163] Le 12 [juillet], l’on sut que le milord duc de Powits, chevalier de l’ordre de la Jarretière et sans contredit un des plus fideles serviteurs du roi d’Angleterre, etoit mort à Saint Germain en Laye, n’ayant point eu de santé depuis un vomissement de sang qui lui avoit pris à Bologne pendant qu’il y etoit avec le roi, son maitre.
[…]
[p. 234] Le 19 [janvier 1697], on sut que le roi et la reine d’Angleterre, le prince de Galles et la princesse, sa sœur, etoient tombés malades tous à la fois.
[…]
[p. 235] Le 21, on sut que toute la maison royale d’Angleterre etoit guerie, et que le roi d’Angleterre avoit dit qu’il n’etoit pas vrai, comme le prince d’Orange l’avoit publié, que le Roi fut convenu de le reconnoitre pour roi d’Angleterre.
[…]
[p. 343] [26 septembre] On sut certainement ce jour là que le Roi avaoit accordé au roi et à la reine d’Angleterre son château de Saint Germain pour [p. 344] demeure fixe et qu’ils n’iroient point demeurer à Blois comme le bruit en avoit couru.
[…]
[tome 6, p. 31] Le 8 [mai 1698], […] on sut que le roi et la reine d’Angleterre se portoient mieux, car ils avoient eu l’un et l’autre dans le même temps quelque attaque de fièvre.
[…]
Le 11, […] [p. 32] le soir, le Roi, qui etoit à Marly pour quelques jours, alla rendre visite au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 42] Le 26 [juin], on disoit que la reine d’Angleterre avoit eu un violent accès de fievre qui avoit empeché le roi, son epoux, de partir pour aller à la Trappe, comme il l’avoit resolu.
[…]
[p. 147] [Le 18 avril 1699], on sut encore, le meme jour, que le chevalier de Gassion, lieutenant general et lieutenant des gardes du corps de quartier, etoit tombé malade assez considerablement à Saint Germain, où il servoit aupres du roi d’Angleterre, avoit eté obligé de se faire transporter à Paris.
Le 19, on disoit que, la reine d’Angleterre ayant reçu des avis qu’on vouloit attenter à la vie du prince de Galles, on lui avoit donné des gardes du corps pour le suivre en plus grand nombre qu’à l’ordinaire.
[…]
[p. 168] Le 28 [juin], [le Roi] alla dire adieu au roi d’Angleterre, qui alloit faire un voyage à la Trappe, pendant lequel la reine devoit se mettre dans le couvent de Sainte Marie de Chaillot.
[…]
[p. 192] Le 10 [octobre], on apprit que Ruzé, contrôleur des Bâtiments, qui faisoit cette charge à Marly et à Saint Germain depuis dix sept ans, avec l’approbation de la Cour, avoit été renvoyé à Saint Germain, avec les appointements qu’il avoit à Marly, et que le Roi avoit mis à sa place un nommé Dujardin, parent de Mansard.
[…]
[p. 206] Le 26 [novembre], le Roi envoya le marquis de Beringhen, son premier écuyer, à Saint-Germain-en-Laye, complimenter le roi d’Angleterre et s’informer de sa santé, parce qu’il avoit au croupion un anthrax, qui lui dura très longtemps.
[…]
[p. 265] Le 14 [juin 1700], Pomereu, comme l’ancien du conseil royal de finance, alla à Saint Germain, escorté de trois autres conseillers d’Etat, faire le compliment au clergé, et son discours ne fut si bien suivi ni si bien raisonné que la réponse que lui fit l’archevêque de Reims, avec beaucoup d’esprit et beaucoup d’art.
[…]
[p. 302] Le 10 [novembre], […] le Roi dépêcha Saint Olon, gentilhomme ordinaire, pour aller à Saint Germain apprendre au roi et à la reine d’Angleterre la mort du roi d’Espagne et le reste des nouvelles.
[…]
[p. 325] Le 4 [décembre], […] [p. 327] le roi Jacques vint prier le Roi de lui donner une garde plus forte, parce qu’il avoit eu avis que les Anglois vouloient enlever le prince de Galles et le faire élever dans la religion anglicane.
[…]
[p. 337] Le 18 [décembre], on disoit que le roi d’Angleterre étoit plus incommodé que jamais, et cette maladie, si elle avoit été véritable, étoit une nouvelle bien importante.
[…]
[tome 7, p. 29] Le 4 [mars 1701], […] on apprit encore que le roi Jacques d’Angleterre avoit eu une grande foiblesse pendant la messe, qu’on avoit été obligé de le remener dans son appartement, et qu’on attribuoit cet accident à ses jeunes et à ses autres austérités.
[…]
[p. 31] [Le 11 mars], le roi d’Angleterre eut une seconde attaque d’apoplexie, bien plus forte que la première, de laquelle il resta paralytique de tout le côté droit.
[…]
[p. 33] [Le 16 mars], le Roi alla visiter le roi d’Angleterre, qui vint au-devant de lui avec la reine jusqu’à la porte de sa grande chambre, s’appuyant assez bien sur la jambe droite et commençant à porter le bras droit jusqu’à sa tête et à s’aider de ses deux doigts ; mais cela n’empêchoit pas qu’il n’eût pris la résolution de partir la semaine de Pâques pour aller à Bourbon.
[…]
Le 18 [mars], le Roi fit dans la plaine d’Houilles la revue de ses deux régiments des gardes, qu’il trouva plus beaux que jamais. Le prince de Galles y vint, et apprit à Sa Majesté que le roi son père avoit encore pris, le soir précédent, de l’émétique, qui lui avoit fait un très bon effet.
[…]
[p. 36] Le 24 [mars], qui étoit le jour du jeudi saint, […] [p. 37] le Roi dit au marquis d’Urfé qu’il l’avoit choisi pour aller conduire le roi d’Angleterre à Bourbon et lui faire rendre, en allant et en revenant, les honneurs qui lui étoeint dus, et pour les frais de son voyage, il lui fit donc de dix mille francs.
[…]
[p. 39] Le 28 [mars], […] la reine d’Angleterre vint prendre congé du Roi, de Monseigneur et de la duchesse de Bourgogne, devant partie deux jours après pour suivre le roi son époux à Bourbon.
[…]
[p. 49] Le 17 [avril], […] [p. 50] on sut aussi ce jour là que le roi Jacques d’Angleterre avoit été retenu par la goutte à la Charité sur Loire, et que Le Pelletier, ci devant ministre d’Etat, étoit fort malade à Paris d’une fièvre continue, pour laquelle on l’avoit fait saigner quatre fois, quoiqu’il eut soixante et onze ans.
[…]
[p. 73] Le 7 [juin], le roi et la reine d’Angleterre arrivèrent à [p. 74] Saint Germain en Laye, revenant de Bourbon, et l’on vit à Marly le marquis d’Urfé, qui les y avoit escortés.
Le 8 [juin], Monsieur étant venu dîner avec le Roi à Marly, il saigna du nez à table. […] L’après dînée, il alla avec beaucoup de dames faire sa visite à Leurs Majestés de la Grande Bretagne, et il saigna encore du nez chez la reine. Un moment après, le Roi et tous les princes et princesses arrivèrent à Saint Germain, et, après avoir fait sa visite, chacun s’en retourna dans son carrosse à Marly. […]
[…]
[p. 97] Le premier d’août, […] la duchesse de Bourgogne alla se baigner dans la rivière de Seine au dessus de Saint Germain en Laye, le Roi ayant fait tendre exprès en cet endroit les tentes du duc de Bourgogne.
[…]
[p. 111] Le 26 [août], on sut […] qu’il s’étoit fait un dépôt d’humeur sur les jambes et sur le col du pied du roi Jacques d’Angleterre.
[…]
[p. 113] Le 2 [septembre], le roi Jacques d’Angleterre eut une grande foiblesse en sortant de la messe, et il fut longtemps sans connoissance. Cette attaque redoubla, et on commença à appréhender qu’il ne passât pas la journée.
[...]
[p. 114] Le 4 [septembre], […] Fagon, premier médecin du Roi, alla en diligence à Saint Germain en Laye pour essayer de secourir le roi Jacques d’Angleterre, qui étoit à l’extrémité. On apprit, à son retour, que le prince avoit reçu tous les sacrements à deux heures et demie après midi, que les remèdes qu’on lui avoit fait prendre lui avoient fait jeter une grande quantité de sang caillé et puant qui étoit extravasé dans sa poitrine, et qu’une saignée qu’on lui avoit faite l’avoit soulagé.
[…]
[p. 115] Le 6 [septembre], l’envoyé de Hesse Cassel, dans une audience publique, assura le Roi que son maître n’embrassoit point le parti de l’Empereur. […] Cependant, le roi Jacques d’Angleterre avoit de fréquentes foiblesses ; il avoit la fièvre avec des redoublements, mais il ne vomissoit plus le sang avec tant d’abondance.
Le 7 [septembre], on lui donna le quinquina, qui fit son effet : sa fièvre parut moins forte, mais on n’en espéroit rien de bon. […]
Le 8 [septembre], le Roi alla s’établir à Marly pour dix jours. En arrivant, on sut que le roi Jacques d’Angleterre avoit encore eu son redoublement, mais que son sang s’étoit arrêté et qu’il restoit encore quelque légère espérance.
[…]
[p. 116] Le 11 [septembre], le Roi alla à Saint Germain voir le roi d’Angleterre, qui étoit au plus mal. Il le trouva dans un grand assoupissement, et demeura une heure auprès de lui, pendant laquelle la duchesse de Bourgogne y vint aussi et n’y demeura qu’un quart d’heure ; mais on ne croyoit pas que ce pauvre prince pût encore passer la semaine.
[…]
[p. 117] Le 13 [septembre], on apprit que le roi d’Angleterre étoit fort mal, qu’il ne pouvoit pas passer la journée, et qu’il avoit déclaré publiquement qu’il pardonnoit au prince d’Orange et à ses filles et à l’Empereur. En même temps, le Roi envoya Fagon, lequel rapporta qu’il n’y avoit plus d’espérance. L’après dînée, le Roi y alla et le laissa à l’extrémité ; mais, auparavant que de partir de Saint Germain, il fit appeler le prince de Galles et lui déclara, en présence de tous les Anglois, qu’après la mort du roi son père il le reconnoitroit pour roi d’Angleterre, et comme le nonce du Pape étoit présent, n’ayant pas abandonné le roi d’Angleterre depuis son mal, le Roi lui dit qu’il voyoit de quelle manière il en usoit avec le roi d’Angleterre et qu’il le prioit de le mander au Pape.
Le 14 [septembre], on eut nouvelle que le jeune Mathan, colonel de Bugey, étoit mort. […] [p. 118] Le soir, on sut que le roi d’Angleterre avoit entièrement perdu la vue ; le duc de Bourgogne alla le voir et, quand il entra dans sa chambre, on disoit pour la cinquième fois les prières des agonisants, et comme on les suspendit à cause de la présence du duc, le roi le pria de trouver bon qu’on les continuât. Enfin, on pouvoit dire que ce prince mouroit de la mort des justes, et les Anglois se flattoient que sa mort changeroit en bien le sort du prince de Galles.
Le 16 [septembre], le roi d’Angleterre mourut à trois heures et demie du matin, et la reine partie en même temps pour s’aller enfermer au monastère de Chaillot. Pour le jeune roi et la princesse, ils restèrent à Saint Germain.
[…]
[p. 119] Le 18 [septembre], […] les princes et les princesses allèrent donner de l’eau bénite au corps du roi d’Angleterre, et, le soir, on l’emporta à Paris à l’église des Bénédictins anglois du faubourg Saint Jacques, où il devoit rester en dépôt jusqu’à ce qu’on pût le porter au tombeau de ses ancêtres, le roi n’ayant pas jugé à propos qu’on l’enterrât dans l’église paroissiale de Saint Germain en Laye, comme il l’avoit souhaité par humilité et même proposé au Roi peu de jours avant sa mort.
Le 19 au soir, la reine d’Angleterre revint à Saint Germain, et, le lendemain, le Roi et toute la Cour allèrent la voir sans cérémonie, parce qu’elle l’avoit souhaité, et elle les reçut dans son lit.
[…]
[p. 123] Le 2 [octobre], on disoit que la flotte angloise étoit rentrée dans ses ports, et qu’elle y avoit été rappelée sur la nouvelle de la mort du roi Jacques ; mais il n’y avoit guère d’apparence que cela pût être, et que, depuis la mort de ce prince, on eût pu envoyer cet ordre à la flotte, qui étoit trop éloignée. On ajoutoit que la reconnoissance du prince de Galles faisoit grand bruit en Angleterre, qu’on y avoit depuis longtemps son portrait presque dans toutes les maisons, qu’on y avoit publié la relation de la mort du roi Jacques, laquelle s’étoit débitée par merveilles, que les régents en avoient fait saisir les exemplaires et fait mettre en prison les colporteurs, mais qu’ils les avoient ensuite fait relâcher. […]
Le 3 [octobre], le bruit couroit que quelques milords étoient venus à Saint Germain trouver le

Bouchet, Louis-François (du)

Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans les mémoires du marquis de Dangeau

« [tome 1, p. 73] Mercredi 22 [novembre 1684]. […] Monseigneur alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 76] Vendredi 1er décembre. Le Roi alla faire la revue de ses gardes du corps ; il y avoit plus d’un an qu’il ne les avoit vus. Il les trouva en fort bon état malgré leur fatigue. En revenant de la plaine d’Ouille, où il avoit fait la revue, il passa au château de Saint Germain, et il revint très content de tous les bâtiments qu’on y avoit faits.
[…]
[p. 79] Lundi 11. […] Monseigneur alla courre le cerf à Saint Germain.
[…]
[p. 114] Lundi 29 [janvier 1685], à Versailles. […] Monseigneur alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 116] Jeudi 1er février, à Versailles. […] Monseigneur alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 117] Lundi 5, à Versailles. […] Monseigneur alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 119] Samedi 10, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 121] Jeudi 15, à Versailles. […] [p. 122] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 123] Lundi 19, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 124] Mercredi 21, à Versailles. […] Monseigneur vouloit aller courir le sanglier dans la forêt de Saint Germain, mais il n’y en avoit point de détourné. […]
[p. 125] Jeudi 22, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 127] Lundi 26, à Versailles. […] Monseigneur courut la bague et les têtes, puis alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 129] Vendredi 2 [mars], à Versailles. [….] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain, avec les chiens de M. de Furstemberg. On donna les relais à l’envers ; c’est une manière de chasser extraordinaire. On ne laissa pas de prendre le cerf et même fort vite.
[…]
[p. 131] Mardi 6 [mars], à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 137] Lundi 19, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain avec l’équipage de M. de Furstemberf et fit une fort belle chasse.
[…]
[p. 143] Vendredi 30, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. de Furstemberg, qui firent une fort belle chasse ; ce [p. 144] sera la dernière. Ils ont pris les sept cerfs qu’ils ont courus, et ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est qu’ils donneur leurs relais à l’envers : leurs vieux chiens sont à la meute, et les chiens les plus vites sont au dernier relais. Madame étoit à la chasse avec Monseigneur.
[…]
[p. 149] Vendredi 6 [avril], à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf avec les chiens du roi, qui étaient revenus de Saint Germain à Versailles.
[…]
[p. 180] Lundi 28 [mai], à Versailles. […] L’assemblée du clergé doit commencer aujourd’hui à Saint Germain, l’archevêque présidant.
[…]
[p. 188] Vendredi 8 [juin], à Versailles. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 191] Jeudi 14, à Versailles. […] Monseigneur chassa dans la forêt de Saint Germain. Il y tua un gros sanglier et un loup, et revint encore d’assez bonne humeur pour le salut.
[…]
[p. 193] Lundi 18, à Versailles. […] L’assemblée du clergé, qui se tient à Saint Germain, accorda au Roi 3000000 de don gratuit, que Sa Majesté leur avoit demandés, et ces 3000000 ont été accordés d’un consentement unanime.
[…]
[p. 196] Mardi 26, à Versailles. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain. […]
[p. 197] Mercredi 27, à Versailles. […] Monseigneur alla dans la forêt de Saint Germain pour y prendre des loups qui sont dans le parc, et fouilla toute la forêt sans les trouver.
[…]
[p. 213] Jeudi 30 [août], à Versailles. […] [p. 214] Le duc du Lude, grand maître de l’artillerie, mourut à Paris. Il étoit chevalier de l’Ordre, il avoit le justaucorps bleu et étoit capitaine de Saint Germain. Sa femme aura la plus grande partie de son bien. Le duc de Roquelaure et la duchesse de Foix, enfants de sa sœur, sont ses héritiers. La capitainerie de Saint Germain fut donnée à M. le marquis de Montchevreuil. On lui donna aussi la survivance pour son fils, qui épouse mademoiselle de Coetquen, fille de feu Combourg.
[…]
[p. 274] Mercredi 2 [janvier 1686], à Versailles. […] J’appris que le Roi avoit fort diminué le fonds des dépenses pour ses bâtiments ; il lui en a coûté l’année passée plus de 15000000 et il n’en veut dépenser celle ci que 4 tout au plus, tant pour les bâtiments que pour la conduite de la rivière Eure. […] Il y eut une manière de sédition à Saint Germain sur ce que les habitants se soulevèrent pour demander que le curé ne quittât point ; les habitants tinrent des discours un peut trop forts ; le Roi en fit mettre plusieurs en prison et interdit beaucoup de prêtres, et on a exilé le curé à Rouen.
[…]
[p. 380] Mercredi 4 [septembre], à Marly. Le Roi vouloit aller tirer dans Vézinet, au dessous de Saint Germain ; le vilain temps l’en empêcha.
[…]
[p. 433] Jeudi 19 [décembre]. […] Monseigneur courut le lièvre dans le parc de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine. Madame la princesse de Conty, madame de Mortemart, madame de Bellefonds et mademoiselle d’Humières étoient à cheval avec Monseigneur.
[…]
[tome 2, p. 68] Jeudi 20 [novembre 1687], à Marly. […] Monseigneur et les princesses allèrent courre le daim dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. le duc du Maine. Madame la Dauphine, qui est demeurée à Versailles, envoya trois de ses filles pour monter à cheval avec les princesses, mesdemoiselles de La Force, de Séméac et de Bellefonds.
[…]
[p. 69] Lundi 24, à Versailles. […] M. le duc du Maine a souhaité d’avoir un équipage pour courre le cerf. Le Roi lui donne 10000 écus pour le mettre sur pied et ordonne 10000 écus par an pour l’entretien. Le chevalier d’Aunay commandera l’équipage et on lui donne pour cela 1000 écus d’appointements.
[…]
[p. 71] Vendredi 28 à Versailles. […] Monseigneur et Madame coururent le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine et revint d’assez bonne heure pour être à la répétition.
[…]
[p. 80] Mardi 16 [décembre], à Marly. Le Roi, après son dîner, monta en carrosse avec mesdames les princesses, Monseigneur et Madame ; il alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 94] Mercredi 14 [janvier 1688], à Marly. Le Roi alla à Saint Germain. Il s’y promena pour voir ce qu’il fait couper dans son parc, les changements qu’il fait dans ses jardins et la cour des cuisines qu’il fait abattre pour en bâtir une magnifique pour loger les secrétaires d’Etat.
[…]
[p. 98] Vendredi 23, à Versailles. […] Monseigneur alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 104] Jeudi 5 [février] à Versailles. […] Le Roi donna à M. de Montchevreuil la charge de maître des Eaux et forêts de Saint Germain.
[…]
[p. 106] Lundi 9, à Versailles. […] Monseigneur courut trois cerfs dans la forêt de Saint Germain avec l’équipage de M. du Maine, malgré la gelée, qui est fort grande.
[…]
Vendredi 13, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 109] Jeudi 19, à Marly. Le Roi et Monseigneur allèrent [p. 110] dans la forêt de Saint Germain, d’où ils firent sortir deux cents cerfs qu’on avoit renfermés dans une petite enceinte. Il y en avoit trop dans la forêt. Le Roi prit assez de plaisir à cette manière de chasser.[…]
Vendredi 20 février, à Marly. Le Roi alla dans l’après-dînée courre le cerf avec les chiens de M. du Maine dans la forêt de Saint Germain. Monseigneur vint l’y trouver et avoit couru le loup dès le matin. […]
[p. 111] Samedi 21, à Versailles. Le Roi courut encore le cerf avec les chiens de M. du Maine dans la forêt de Saint Germain. Il avoit manqué celui d’hier, et en a pris deux aujourd’hui.
[…]
[p. 114] Mercredi 3 [mars], à Versailles. […] L’après dînée, le Roi partit de bonne heure et alla à Saint Germain voir sortir du parc quantité de cerfs et de daims qu’on en ôte, et ensuite revint à Marly.
[…]
[p. 289] Jeudi 6 [janvier 1689], à Versailles. Le Roi, après son dîner, partit d’ici avec Monseigneur et Monsieur dans son carrosse et vint jusqu’auprès de Chatou, où il attendit la reine d’Angleterre, qui arriva un quart d’heure après. Dès qu’on vit paraître les carrosses qui la menoient, le Roi, [p. 290] Monseigneur et Monsieur mirent pied à terre. Le Roi fit arrêter le carrosse qui marchoit devant celui de la Reine, où étoit le prince de Galles, et l’embrassa. Pendant ce temps là, la reine d’Angleterre descendit de carrosse et fit au Roi un compliment fort plein de reconnaissance pour elle et pour le roi son mari. Le Roi lui répondit qu’il leur rendoit un triste service en cette occasion, mais qu’il espéroit être en état de leur en rendre de plus utiles dans la suite. Le Roi avoit avec lui ses gardes, ses chevau légers et ses mousquetaires, et tous les courtisans l’avoient accompagné. Le Roi monta en carrosse avec la reine ; Monseigneur et Monsieur s’y mirent aussi. Cela avoit été concerté dès le jour précédent, c’est pourquoi elle n’avoit avec elle que madame de Powits et la signora Anna Victoria Montecuculli, une Italienne qu’elle aimoit fort. Ils descendirent au château de Saint Germain, qui étoit meublé fort magnifiquement et où l’on trouva toutes les commodités imaginables pour le prince de Galles. Tourolle, tapissier du Roi, donna à la reine la clef d’un petit coffre où il y avoit 6000 pistoles. Monsieur et madame de Montchevreuil sont à Saint Germain pour faire à la reine les honneurs du gouvernement. Le roi d’Angleterre couche aujourd’hui à Breteuil. Le duc de Berwick, son fils, est venu devant pour apporter de ses nouvelles à la reine. Madame de Portsmouth avoit voulu venir au devant de la reine, mais M. de Lauzun lui manda qu’elle ne verroit personne qu’après être arrivée à Saint Germain. Les bruits qu’on a fait courre sur ce qu’elle a dit n’ont pas laissé de faire impression sur la reine, mais elle s’en justifie fort bien. […]
[p. 291] Vendredi 7, à Versailles. […] [p. 292] Entre cinq et six heures, le Roi monta en carrosse avec Monseigneur et M. de Chartres et alla descendre au château de Saint Germain. Il trouva la reine d’Angleterre au lit. Il causa une demi heure avec elle et la quitta quand on vint lui dire que le roi d’Angleterre étoit entré dans la cour du château ; le Roi alla au devant de lui jusqu’à la porte de la salle des gardes. Le roi d’Angleterre se baissa jusqu’à ses genoux ; le Roi l’embrassa et ils demeurèrent longtemps à s’entr’embrasser. Et ensuite, le Roi, lui tenant toujours la main, le mena dans la chambre de la reine sa femme, et le lui présenta, lui disant : « Je vous amène un homme que vous serez bien aise de voir ». Le roi d’Angleterre demeura longtemps dans les bras de la reine, et ensuite le Roi lui présenta Monseigneur, M. de Chartres, les princes du sang, le cardinal de Bonzy et quelques uns des courtisans que le roi d’Angleterre connaissoit. Puis le Roi mena le roi d’Angleterre chez le prince de Galles, et après l’avoir ramené chez la reine, en se séparant il lui dit : « Je ne veux point que vous me conduisiez ; vous êtes encore aujourd’hui chez moi. Demain vous me viendrez voir à Versailles comme nous en sommes convenus, je vous en ferai les honneurs, et vous me les ferez de Saint Germain la première fois que j’y viendrai, et ensuite nous vivrons sans façon ». […]
[p. 293] Samedi 8, à Versailles. Le Roi envoya le matin M. de La Trémouille à Saint Germain pour savoir des nouvelles du roi d’Angleterre, de la reine et du prince de Galles. Le roi d’Angleterre vint ici sur les quatre heures. […]
[p. 294] Dimanche 9, à Versailles. […] Monseigneur, en sortant de table, alla à Saint Germain. Le roi d’Angleterre vint le recevoir au bout de sa chambre, mais il ne sortit point. Ils causèrent longtemps debout, et ensuite Monseigneur alla voir la reine, qui lui donna un fauteuil, mais au dessous d’elle. En sortant de chez la reine, Monseigneur alla chez le prince de Galles, puis retourna à Versailles. Les maréchales d’Humières, de Lorges, d’Estrées ont été faire leur cour à la reine d’Angleterre, qui ne les a point baisées. Elle ne baisa point non plus la duchesse de Nevers, qui étoit allée au devant d’elle à Beaumont. Le Roi a réglé ce qu’il donnera au roi d’Angleterre pour sa dépense : il lui donnera 50000 écus pour se remettre en équipage et 50000 [p. 295] francs par mois. Le roi d’Angleterre n’en vouloit que la moitié. La reine d’Angleterre dit qu’elle traitera les dames ou comme les reines les traitent en Angleterre, ou comme les reines les traitent en France ; elle en laisse le choix au Roi, et ne veut rien faire que ce qui lui sera le plus agréable. Les reines en Angleterre baisent les princesses et les duchesses et ne les font point asseoir, et ici les reines font asseoir les princesses et les duchesses et ne les baisent point. La feue reine mère d’Angleterre, quand elle étoit ici, baisoit les duchesses, les maréchales de France, la femme du chevalier d’honneur et les dames d’atour. La reine dit à Monseigneur qu’elle n’attendoit qu’un habit pour aller à Versailles faire sa cour au Roi et voir madame la Dauphine.
Lundi 10, à Versailles. Madame alla sur les quatre heures à Saint Germain. Mademoiselle sa fille, madame de Guise et toutes les princes du sang y allèrent aussi. La reine d’Angleterre les salua toutes et donna un fauteuil à Madame et des sièges pliants aux princesses. Elle fit asseoir la duchesse de Portsmouth et la signora Anna Victoria Montecuculli, ce qu’on trouva extraordinaire car elle n’est point duchesse ; apparemment c’est comme étant sa dame d’honneur et on la priera de s’expliquer là-dessus.
[…]
[p. 297] Mercredi 12, à Versailles. […] Il y avoit encore quelque difficulté à régler sur le cérémonial pour la manière dont les princes du sang doivent être traités de LL. MM. BB. On est convenu, aujourd’hui, que les princes du sang se couvriront quand le roi d’Angleterre se couvrira et que la reine leur donnera des sièges ployants et les baisera. La feue reine, notre maîtresse, ne les faisoit pas asseoir, mais ils s’étoient toujours assis devant la reine mère. Le feu roi d’Angleterre, à Bruxelles, donna un fauteuil à feu M. le Prince. L’Empereur en fit offrir à MM. les princes de Conty quand ils passèrent à Vienne et il y a beaucoup d’exemple que les princes du sang de France ont reçu de plus grands honneurs que ceux qu’ils ont en cette occasion ; mais le Roi veut qu’on rende plus de respect encore au roi d’Angleterre malheureux que s’il étoit dans la prospérité. […] Le roi d’Angleterre a fait milord Powits duc. Il a quitté plus de 50000 écus de rente pour suivre le roi son maître, et est homme de grande qualité. […]
[p. 298] Jeudi 13, à Versailles. La reine d’Angleterre vint ici sur les quatre heures.
[…]
[p. 301] Samedi 15, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain avec Monseigneur. Le roi d’Angleterre le vint recevoir au bout de la salle des gardes. Après avoir été quelque temps enfermés ensemble, ils allèrent chez la reine, où il y avoit trois fauteuils, mais le roi d’Angleterre ne voulut point s’asseoir et alla auprès de la cheminée causer avec Monseigneur, qui étoit debout, disant au Roi : « Nous sommes convenus que nous ne ferions plus de façons après cette visite ci ; je veux commencer dès ce soir ». Sur les six heures, le Roi en repartit et Monseigneur revint à la comédie.
[…]
[p. 306] Vendredi 21, à Marly. […] Monseigneur alla à Saint Germain ; il vouloit y courre le loup, mais n’en trouva point. Il y courut le cerf avec les chiens de M. du Maine. Le roi d’Angleterre étoit à la chasse et fut toujours à la tête des chiens ; il faisoit un temps terrible, et l’on manqua le cerf. […]
[p. 307] Samedi 22, à Versailles. Le Roi, après son dîner, partit de Marly et alla à Saint Germain voir le roi d’Angleterre. Il demeura assez longtemps enfermé avec lui, puis ils allèrent chez la reine, qui étoit au lit, et ensuite passèrent chez le prince de Galles.
[…]
[p. 309] Lundi 24, à Versailles. […] Le nonce d’Adda est arrivé à Saint Germain depuis quelques jours et s’en retourne à Rome, où il espère qu’on lui donnera le chapeau de cardinal. Nous n’avons pas été trop contents ici de la conduite qu’il a eue en Angleterre, et l’aimons mieux en Italie que dans ces pays ci. Le roi d’Angleterre a permis par un brevet au duc de Berwick, son fils, de porter l’étoile de l’ordre de la Jarretière sur ses habits, quoi qu’il n’ait pas été reçu à la chapelle de Windsor.
[…]
[p. 319] Mardi 1er février, à Versailles. […] [p. 320] Le Roi a dîné à son petit couvert, et après dîner est allé tirer, et de là à Marly, puis à Saint Germain pour voir le roi et la reine d’Angleterre. Monseigneur, après le chapitre, est allé à la forêt de Marly, où il avoit donné rendez vous au roi d’Angleterre. Ils ont couru le cerf et en ont pris deux. […] Il devoit y avoir appartement ce soir, mais le Roi l’a remis à demain, à cause qu’il a bien cru qu’il reviendroit trop tard de Saint Germain.
[…]
[p. 325] Mardi 8 [février], à Marly. […] Monseigneur alla à Saint Germain. Le roi d’Angleterre et lui coururent le cerf avec les chiens de M. du Maine. […]
[p. 326] Mercredi 9, à Marly. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain. M. le prince d’Orange renvoie au roi d’Angleterre ses carrosses, ses chevaux, ses équipages et sa vaisselle. […] Le roi d’Angleterre a fait arrêter à Saint Germain le major du régiment de Péterborough. C’est un homme qui a changé souvent de religion et de parti, et qu’on soupçonne d’avoir été envoyé ici par le prince d’Orange. On croit qu’on découvrira quelque chose par cet homme là.
[…]
[p. 328] Vendredi 11, à Marly. […] [p. 329] Monseigneur a couru le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine ; il a été prendre le roi d’Angleterre. Madame la princesse de Conty étoit à la chasse, et mesdames de Mongon et de Dangeau l’y accompagnoient. La princesse de Conty a monté chez la reine d’Angleterre, qui souhaitoit la voir en habit de chasse.
Samedi 12, à Versailles. […] Hier au soir, deux députés d’Irlande arrivèrent à Saint Germain auprès du roi d’Angleterre. L’un est milord de Montjoye, protestant, et l’autre est catholique et milord chef de justice ; il s’appelle Reys. L’Irlande est toujours fort fidèle au roi. Ils n’ont été que deux jours sur mer et six jours à venir de Brest à Saint Germain.
[…]
[p. 331] Mercredi 16, à Versailles. […] Monseigneur est allé à Saint Germain pour y courre le loup avec le roi d’Angleterre ; mais ils n’en ont pas trouvé et sont revenus sans chasser. Il avoit convié le roi d’Angleterre, de la part du Roi, de venir ici demain voir les jardins, mais le roi d’Angleterre n’y viendra [p. 332] que vendredi parce qu’il s’est engagé d’aller demain dîner à Maubuisson.
[…]
[p. 335] Lundi 21, à Versailles. […] Monseigneur courut le loup à Lauthie et, au retour, à Saint Germain, il vit le roi et la reine d’Angleterre. […] [p. 336] Le roi d’Angleterre a fait arrêter à Saint Germain milord Montjoye, qui étoit député d’Irlande. Milord Tyrconnel a mandé au roi son maître qu’il feroit bien de s’en assurer. M. de Ponty, qui vient d’Irlande, assure que tout va à merveille en ce pays là. Il est arrivé aujourd’hui et dit qu’il y a dans ce royaume là quarante mille hommes sous les armes. Le roi d’Angleterre y fait passer trois cents officiers et quinze cents soldats, dragons ou cavaliers, et à mesure qu’il en arrive à Saint Germain on les envoie.
[…]
[p. 337] Mercredi 23, jour des Cendres, à Versailles. […] Je viens d’apprendre, ce soir au coucher, qu’il y a des chevaux de poste avec des chaises placées sur toute la route d’ici à Brest pour le roi d’Angleterre et les principales personnes qui l’accompagneront. Les milords Powits, Dumbarton, Melfort et Georges Howard suivront S. M. B. La reine et le prince de Galles demeureront à Saint Germain. Le roi donne beaucoup d’argent au roi d’Angleterre pour ce voyage là, et M. d’Avaux y va et demeurera en Irlande ambassadeur du Roi auprès de lui.
[…]
[p. 338] Vendredi 25, à Versailles. […] Le roi d’Angleterre, le matin, à Saint Germain, fit M. de Lauzun chevalier de la Jarretière, en la place du duc d’Albemarle, mort depuis peu de temps. Ensuite S. M. B. alla à Paris, descendit à Notre Dame, où il fit ses dévotions, alla dîner chez M. de Lauzun, puis chez les religieuses angloises, et au Luxembourg voir la grande Mademoiselle, repassa par Chaillot, où est le cœur de la reine sa mère, alla ensuite à Saint Cloud voir Monsieur et Madame, qui y étoient venus le matin [p. 339] s’y promener, et arriva sue les sept heures ici, où le Roi l’attendoit de meilleure heure. Les deux rois furent longtemps enfermés, et puis vinrent chez madame la Dauphine, où le roi d’Angleterre prit congé d’elle. Le Roi lui dit : « Je souhaite, Monsieur, ne vous revoir jamais. Cependant, si la fortune veut que nous nous revoyions, vous me trouverez toujours tel que vous m’avez trouvé. » Le Roi ira encore lui dire adieu à Saint Germain avant qu’il parte. […]
[p. 339] Samedi 26, à Versailles. Monsieur et Madame ont été à Saint Germain dire adieu au roi d’Angleterre ; Madame et toutes les dames étoient en mante. Le roi d’Angleterre les reçut chez la reine sa femme qui, après avoir été quelque temps debout, s’assit, disant qu’elle se trouvoit un peu mal. Le roi d’Angleterre baisa Madame et toutes les princesses du sang. […]
[p. 340] Dimanche 27, à Versailles. Le Roi et Monseigneur sont allés dire adieu au roi d’Angleterre, qui part demain matin sans faute.
[…]
[p. 344] Jeudi 3 [mars], à Marly. […] La reine d’Angleterre, pour être plus en repos, a réglé que tous les lundis elle recevroit tous ceux qui voudroient venir lui faire leur cour. Les autres jours, elle ne verra que la maison royale. On avoit parlé de la faire venir à Clagny, et même à Versailles, à l’aile neuve ; mais on croit qu’elle aime mieux demeurer à Saint Germain, où elle est plus retirée. […]
Vendredi 4, à Marly. […] Monsieur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui est toujours fort triste et assez incommodée. […]
[p. 346] Samedi 5, à Versailles. […] Le roi partit de Marly sur les cinq heures. […] En partant de Marly, il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre et revint tard à Versailles.
[…]
[p. 349] Jeudi 10, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et y mena madame la princesse de Conty. […]
[p. 350] Vendredi 11, à Versailles. […] Le Roi, après le sermon, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 359] Jeudi 24, à Versailles. Le Roi dîna à son petit couvert et alla à Saint Germain l’après dînée voir la reine d’Angleterre. Il devoit aller à la volerie, mais le vilain temps l’en empêcha. […]
Vendredi 25, à Versailles. […] Monseigneur, après le sermon, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui a été malade tous ces jours passés.
[…]
[p. 363] Mercredi 30, à Marly. […] Le Roi joua hier en arrivant, et après son souper, aux portiques. Aujourd’hui, il a joué encore après son dîner et puis, à six heures, il est allé voir la reine d’Angleterre à Saint Germain.
[…]
[p. 367] Mardi 5 [avril], à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf à Saint Germain avec les chiens de M. le duc du Maine. […]
[p. 368] Mercredi 6, à Versailles. […] La reine d’Angleterre alla hier aux religieuses de Chaillot, où elle passera toute la semaine. Le Roi lui a fait meubler un appartement.
[…]
[p. 370] Dimanche 10, jour de Pâques, à Versailles. […] [p. 371] La reine d’Angleterre est sortie ce soir du couvent de Chaillot et est retournée à Saint Germain. Le Roi lui a envoyé proposer de venir demain souper à Marly.
[…]
[p. 373] Jeudi 14, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint-Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 378] Jeudi 21, à Versailles. […] La reine d’Angleterre est allée coucher aux filles Sainte Marie, à Chaillot. […]
Vendredi 22, à Versailles. […] La reine d’Angleterre alla à Paris, et communia [p. 379] à Notre Dame. L’archevêque la reçut à la porte à la tête du chapitre.
[…]
[p. 381] Mardi 26, à Versailles. Le Roi alla dîner à Marly […]. Après son dîner, il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui est revenue de Chaillot, où elle a passé quelques jours, pendant lesquels elle a été deux fois à Paris.
[…]
[p. 383] Vendredi 29, à Versailles. […] Messeigneurs les ducs de Bourgogne, d’Anjou et de Berry allèrent pour la première fois à Saint Germain voir la reine d’Angleterre et le duc d’York. La reine les vint recevoir à la porte de sa chambre, et leur donna des fauteuils. Chez M. le prince de Galles, on mit quatre fauteuils, et les trois princes étoient au dessus de lui.
[…]
[p. 384] Dimanche 1er mai, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 388] Vendredi 6, à Marly. […] Monsieur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 390] Lundi 9, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre et y mena Mademoiselle et madame de Guise ; les petites filles de France n’y vont point si le Roi, Monseigneur, Monsieur ou Madame n’y vont, parce qu’elles n’ont qu’un siège ployant. Il y a quatre dames de la reine d’Angleterre qu’elle fait asseoir quand il y a quelque princesse ou duchesse françoise : madame Powits, comme duchesse angloise, madame de Montecuculli, qu’on a fait comtesse d’Almont, comme sa dame d’honneur, et mesdames de Sussex et de Waldegrave, comme fille de roi. C’est le Roi notre maître qui leur a donné ce [p. 391] rang là, car elles n’en ont aucun en Angleterre. […]
Mardi 10, à Versailles. Le Roi travailla l’après dînée jusqu’à cinq heures avec M. de Seignelay et puis alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 394] Dimanche 15, à Versailles. […] Monseigneur alla l’après dînée à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. […]
Lundi 16, à Versailles. Le Roi dîna à Marly et [p. 395] l’après dînée il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. Le prince de Galles vint ici voir madame la Dauphine et messeigneurs ses enfants.
[…]
[p. 399] Lundi 23, à Versailles. Le Roi travailla l’après dînée jusqu’à quatre heures avec M. de Seignelay, et puis alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 407] Lundi 6 [juin], à Versailles. […] Monseigneur a été à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 408] Mercredi 8, à Versailles. […] Le Roi alla dîner à Marly […]. L’après dînée, il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 412] Mercredi 15, à Versailles. […] Monseigneur suivit le Roi à cheval à la portière de son carrosse, à son [p. 413] retour de Saint Germain où il avoit été voir la reine d’Angleterre.
[…]
Vendredi 17, à Marly. […] [p. 414] La reine d’Angleterre est allée à Chaillot, où elle demeurera jusqu’à dimanche au soir. Demain elle ira dans deux ou trois couvents à Paris, comme elle a accoutumé à tous les petits voyages qu’elle y fait.
[…]
[p. 415] Lundi 20, à Versailles. […] La reine d’Angleterre a fait une petite fête à Saint Germain pour le jour de la naissance de M. le duc d’York, qui a aujourd’hui un an.
[…]
[p. 416] Mercredi 22, à Marly. Le Roi alla sur les quatre heures à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint ici.
[…]
[p. 417] Vendredi 24, à Marly. […] Monseigneur s’alla promener, le soir, avec madame la princesse de Conty, dans les prairies qui sont au dessous de Saint Germain. […]
[p. 418] Samedi 25, à Versailles. […] Monseigneur, après les portiques, alla à Saint Germain avec madame la princesse de Conty. Ils demeurèrent une heure avec la reine d’Angleterre et puis revinrent ici.
[…]
[p. 424] Mercredi 6 [juillet], à Marly. Le Roi après son dîner alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint ici. […]
Jeudi 7, à Marly. Le Roi, après son dîner, monta [p. 425] en carrosse pour aller courre le cerf dans la forêt de Marly. Il y avoit donné rendez vous à la reine d’Angleterre. Il la trouva dans la grande route. Elle se mit en calèche avec lui. Ils virent souvent la chasse, qui fut fort belle, et puis le Roi revint ici et la reine retourna à Saint Germain. Monseigneur, Madame et les princesses coururent à cheval.
[…]
[p. 427] Lundi 11, à Versailles. […] La reine d’Angleterre alla à Saint Cyr, où madame de Maintenon la reçut. Il n’y eut de femmes de la cour que madame la comtesse de Grammont.
[…]
[p. 428] Mercredi 13, à Versailles. Le Roi alla à quatre heures à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint à Marly changer d’habit et revint par son grand parc en tirant. Monseigneur alla aussi à Saint Germain et en repartit avant que le Roi y arrivât.
[…]
[p. 430] Samedi 16, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui lui avoit mandé qu’elle souhaitoit venir à Versailles pour lui parler. Le Roi fut assez longtemps avec elle, puis il vint à Trianon, où il passa toute la soirée.
[…]
[p. 437] Vendredi 29, à Versailles. Le Roi alla sur les quatre heures à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. Monseigneur y étoit allé en sortant de table et en repartit quand le Roi y arriva.
[…]
[p. 443] Lundi 8 [août], à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint à Marly.
[p. 446] Samedi 13, à Versailles. […] Milord Douvre est arrivé, et est allé trouver la reine d’Angleterre à Chaillot.
[…]
[p. 449] Mercredi 17, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint à Marly où il se promena longtemps.
[…]
[p. 457] Dimanche 28, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, puis revint à Trianon faire collation avec madame la princesse de Conty.
[p. 460] Mardi 30, à Versailles. Le Roi, après dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 465] Mardi 6 [septembre], à Versailles. Le Roi alla après son dîner à Saint Germain, voir la reine d’Angleterre, et puis revint à Trianon.
[…]
[p. 467] Samedi 10, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis revint à Marly.
[…]
[p. 468] Lundi 12, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. […]
[p. 469] Mardi 13, à Versailles. Le Roi, après dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 477] Mardi 27, à Versailles. Le Roi, après dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[tome 3, p. 2] Mardi 4 [octobre], à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain [p. 3] dire adieu à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 13] Lundi 24, à Versailles. Le Roi, Monseigneur et Monsieur allèrent tous trois séparément voir la reine d’Angleterre à Saint Germain.
[…]
[p. 15] Dimanche 30, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui est fort aise de voir qu’on envoie un secours considérable en Irlande. On ne dit point encore quels sont les bataillons qu’on envoie en ce pays là, mais les ordres sont partis pour les faire marcher.
[…]
[p. 17] Jeudi 3 [novembre], à Marly. […] Monseigneur alla courre le loup à Saint Germain.
[…]
[p. 19] Lundi 7, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf à Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 20] Mercredi 9, à Versailles. […] Le Roi alla, après son dîner, à Marly. Il y demeura quelque temps à voir planter, puis il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 24] Samedi 12, à Versailles. […] Le Roi, après don dîner, alla à Marly, où il s’amusa à faire planter. Monseigneur l’y vint trouver après avoir couru le cerf avec les chiens de M. du Maine à Saint Germain.
[…]
[p. 26] Samedi 19, à Versailles. Le Roi revint ici après avoir été à Saint Germain vers la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 29] Samedi 26, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. Monsieur y alla aussi, et y mena Mademoiselle, madame de Guise et madame la grande duchesse. Les princesses n’y vont jamais sans Monsieur ou Madame, parce que la reine d’Angleterre ne leur donne qu’un tabouret.
[…]
[p. 33] Samedi 3 [décembre], à Versailles. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 34] Lundi 5, à Versailles. […] M. Porter est arrivé à Saint Germain. Le roi d’Angleterre l’avoit fait partir d’Irlande pour aller de sa part à Rome. Mais le Roi, ayant jugé [p. 35] à propos qu’il y eût à Rome un ministre du roi d’Angleterre, y avoit déjà envoyé milord Melford. Ainsi M. Porter demeurera en France et se tiendra auprès de la reine d’Angleterre. […]
Mardi 6, à Versailles. […] Monseigneur alla l’après dînée à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 38] Mercredi 14, à Marly. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre et arriva à Marly de bonne heure.
[…]
[p. 43] Mercredi 28, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui a passé les fêtes à Chaillot.
[…]
[p. 54] Mardi 17 [janvier 1690], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 55] Jeudi 19, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Cyr voir représenter Esther. La reine d’Angleterre y vint de Saint Germain. Elle versa en carrosse. Son cocher qui le menoit avoit été cocher de Cromwell.
[…]
[p. 58] Mardi 24, à Versailles. […] Milord Waldegrave est mort à Saint Germain. Il avoit épousé une fille du roi d’Angleterre et de mademoiselle Churchill, et c’est lui que le roi d’Angleterre avoit laissé auprès de la reine sa femme, avec toute sa confiance en ses affaires. […]
Mercredi 25, à Marly. Le Roi, après don dîner, partit de Versailles et alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. Il revint sur les six heures à Marly.
[…]
[p. 62] Samedi 4 [février], à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine. […] La reine d’Angleterre, qui étoit à Chaillot, est revenue à Saint Germain ; mais les eaux sont tellement débordées qu’elle a été contrainte d’aller de Chaillot à Montmartre, de Montmartre à Paris, de Paris passer par Versailles pour aller à Saint Germain.
[…]
[p. 66] Lundi 13, à Versailles. […] Monseigneur alla l’après dînée avec madame la princesse de Conty à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 69] Lundi 20, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf à Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 70] Samedi 25, à Versailles. Le Roi fut à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. Monseigneur y alla aussi avec Monsieur, la grande Mademoiselle et madame de Guise.
[…]
[p. 74] Jeudi 9 [mars], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 76] Samedi 11, à Versailles. Le Roi alla tirer, et puis passa à Marly pour se rhabiller, et de là il fut à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 77] Lundi 13, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 85] Mercredi 29, à Versailles. Le Roi dîna à son petit couvert, alla tirer, puis passa à Marly pour changer d’habit. Et de là, il alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 86] Vendredi 31, à Versailles. […] Monseigneur dîna chez lui avec madame la princesse de Conty, et puis alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre. […]
Samedi 1er avril, à Versailles. Le Roi a dîné à son petit couvert et est allé tirer. Monseigneur a courut le loup dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine.
[…]
[p. 97] Mercredi 12 [avril], à Marly. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et puis vint ici où il se promena longtemps.
[…]
[p. 99] Dimanche 16, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 118] Dimanche 7 [mai], à Versailles. […] Le Roi a été voir la reine d’Angleterre. Monseigneur y a été ensuite et y a mené dans son carrosse M. le duc de Bourgogne ; il y fit monter M. de Beauvilliers. La reine d’Angleterre demanda à Monseigneur s’il ne falloit point donner un fauteuil à M. le duc de Bourgogne et lui en fit donner un. Ensuite Monsieur et Madame vinrent et eurent des fauteuils. M. de Chartres n’eut qu’un pliant. Madame la maréchalle de La Mothe y mena aussi M. le duc d’Anjou et M. le duc de Berry après que Monseigneur en fut sorti.
[…]
[p. 123] Lundi 15, à Versailles. […] Monseigneur alla à Chaillot dire adieu à la reine d’Angleterre, qui y passera la semaine pour y faire son jubilé.
[…]
[p. 237] Vendredi 20 [octobre], à Fontainebleau. M. de Lauzun et M. de La Hoguette ont eu chacun séparément une grande audience du Roi, et puis M. de Lauzun est allé à Saint Germain trouver le roi d’Angleterre.
[…]
[p. 239] Vendredi 27, à Versailles. […] Le duc de Tyrconnel est arrivé à Saint Germain ; le roi d’Angleterre le vouloit amener au Roi, mais le Roi l’a prié d’attendre jusqu’à dimanche, parce qu’il le vouloit entretenir à loisir, et que demain il a beaucoup d’affaires. On a déjà envoyé deux barques en Irlande pour assurer les Irlandois qui demeurent fidèles au roi leur maître que le Roi leur enverra les secours qui leur sont nécessaires.
[…]
[p. 242] Jeudi 2 [novembre], à Marly. […] Monseigneur a couru le cerf à Saint Germain avec les chiens de M. du Maine, et arriva ici un peu après le Roi. Monsieur et Madame vinrent ici de Saint Cloud et passèrent par Saint Germain pour voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 247] Samedi 11, à Versailles. […] Monseigneur donna à dîner à [p. 248] madame la princesse de Conty, et puis alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 249] Mardi 14, à Versailles. […] Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. Le duc de Tyrconnel repart incessamment pour l’Irlande, mais on n’a pas déclaré les officiers qui partent avec lui.
[…]
[p. 250] Jeudi 16, à Versailles. […] Le Roi a longtemps entretenu M. de Tyrconnel ; il avoit couché ici. Le Roi lui fait donner une chambre dans le château quand il couche ici. Le roi d’Angleterre lui donne l’ordre de la Jarretière. Il a la place du duc de Grafton, mort en Irlande dans les troupes du prince d’Orange.
[…]
[p. 253] Mercredi 22, à Marly. […] Monseigneur et Madame coururent le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les chiens de M. du Maine et arrivèrent ici avant le Roi.
[…]
[p. 263] Mercredi 20 [décembre], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 266] Mercredi 27, à Marly. Le Roi alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, et arriva ici sur les six heures.
[…]
[p. 272] Jeudi 11 [janvier 1691], à Versailles. Le Roi alla voir le roi et la reine d’Angleterre à Saint Germain.
[…]
[p. 274] Vendredi 19, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 280] Jeudi 1er février, à Versailles. […] Le roi d’Angleterre s’est trouvé un peu incommodé et s’est fait saigner à Saint Germain.
[…]
[p. 283] Jeudi 8, à Versailles. Le Roi dîna à son petit couvert et puis alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 284] Samedi 10, à Versailles. […] Monseigneur alla avec les princesses à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 292] Mercredi 28, à Marly. […] Ces jours passés, à Saint Germain, des Anglois, frères du comte de Salisbury, se querellèrent, se battirent et se blessèrent très dangereusement. Après leur combat, ils se raccommodèrent, se demandèrent pardon l’un à l’autre, firent venir un prêtre et abjurèrent la religion protestante, dont ils étaient. Depuis ce temps là, l’aîné, qui avoit dix neuf ans, est mort de sa blessure, et le cadet est encore fort malade, et l’on dit qu’il n’attend que sa guérison pour se mettre à la Trappe.
[…]
[p. 293] Samedi 3, à Versailles. Le Roi alla le matin à la chasse, et revint dîner à Marly. L’après dînée, il alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 296] Mercredi 7, à Versailles. Le Roi, après son dîner à Versailles, alla au sermon et puis vint ici en chassant. Monseigneur y étoit déjà arrivé, après avoir couru le cerf à Saint Germain.
[…]
[p. 299] Mercredi 14, à Versailles. Le Roi, à son lever, déclara qu’il marcheroit samedi pour aller à Mons, qui est investi par M. de Boufflers. […] Le Roi a été cette après dînée dire adieu au roi et à la reine d’Angleterre, qui demeureront à Saint Germain.
[…]
[p. 302] Vendredi 16, à Versailles. Le Roi ne sortit point de tout le jour, ni Monseigneur non plus. Le roi et la reine d’Angleterre vinrent prendre congé d’eux. Le roi d’Angleterre souhaitoit fort d’accompagner le Roi au siège de Mons, et l’a fort pressé là dessus, mais le Roi, à cause des embarras que cela auroit pu faire, l’a prié de vouloir bien demeurer à Saint Germain. La Maison du Roi et tous ses équipages sont partis aujourd’hui ; on ne laissa ici pour la garde des princes qu’un lieutenant aux gardes et quatre vingt soldats des moins en état de marcher. Il reste quatre vingt gardes du corps pour demeurer auprès d’eux et auprès du roi d’Angleterre à Saint Germain.
[…]
[p. 326] Jeudi 19 [avril], à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla voir le roi et la reine d’Angleterre. […]
Vendredi 20, à Versailles. […] Monseigneur voulut aller à Saint Germain voir le roi d’Angleterre, mais il étoit allé à Paris pour voir Monsieur.
[…]
[p. 327] Lundi 23, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf le matin, revint dîner ici, et puis alla à Saint Germain voir LL. MM. BB.
[…]
[p. 333] Samedi 5 [mai], à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Marly et à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 334] Mardi 8, à Versailles. […] Monseigneur alla avec madame la princesse de Conty à Saint Germain pour voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 335] Samedi 12, à Versailles. […] La reine d’Angleterre a choisi pour gouvernante du prince de Galles la comtesse d’Errol, arrivée depuis peu d’Ecosse. Elle est veuve, son mari étoit connétable héréditaire du royaume d’Ecosse.
[…]
[p. 353] Jeudi 28 [juin], à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 359] Samedi 14 [juillet], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 371] Vendredi 27, à Versailles. Le Roi, après son dîner, alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre, puis s’alla promener à Marly.
[…]
[p. 390] Mardi 28 [août], à Marly. Le Roi, après avoir dîné à Versailles, alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. Il régla avec eux qu’ils viendraient de Saint Germain passer dix jours à Fontainebleau.
[…]
[p. 393] Mercredi 5 [septembre], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 428] Vendredi 9 [novembre,] à Versailles. […] [p. 429] L’après dînée, le Roi s’amusa à Marly à faire planter jusqu’à la nuit, et puis revint ici avec les dames, qui étoient allées à Saint Germain voir la reine d’Angleterre pendant que le Roi faisoit planter.
[…]
[p. 440] Dimanche 9 [décembre], à Versailles. Le roi d’Angleterre s’en va en Bretagne vers Brest pour se faire voir aux Irlandois qui sont arrivés. Il en formera des régiments selon qu’il jugera à propos. Il partira samedi qui vient, et a prié le Roi que partout où il passeroit, on ne lui rendit aucuns honneurs, afin d’éviter les embarras.
[…]
[p. 441] Jeudi 13, à Versailles. Monseigneur alla à Saint Germain dire adieu au roi d’Angleterre, qui part samedi.
[…]
[p. 442] Samedi 15, à Versailles. Le roi d’Angleterre partit de Saint Germain pour son voyage de Brest. Le Roi lui donne deux relais de carrosse jusqu’à Orléans, où il s’embarquera pour descendre la Loire. Il ne mène avec lui que le duc de Berwick, son fils, et a prié le Roi qu’on ne lui fît aucuns honneurs sur la route.
[…]
[p. 444] Samedi 22, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[tome 4, p. 3] Samedi 5 [janvier 1692], à Versailles. […] Le roi d’Angleterre mande au Roi que, des Irlandois qui ont passé en France, il en a déjà composé sept régiments d’infanterie de quatorze cents hommes, qui feront chacun deux bataillons, et un régiment de cavalerie de six cents chevaux. Il n’a point encore nommé les colonels ; il placera la plupart de ceux qui sont venus, qui sont en très grand nombre, dans son régiment des gardes, qui est un des sept qu’il a composés. Outre cela, il attend encore quatre ou cinq mille hommes qui doivent passer avec Sarsfield.
[…]
[p. 6] Lundi 7, à Versailles. […] La grossesse de la reine d’Angleterre continue ; elle ne sort plus de sa chambre ; elle a senti son enfant remuer. Le roi, son mari, lui a mandé qu’il arriveroit vendredi.
[…]
[p. 8] Vendredi 11, à Versailles. Le roi d’Angleterre revint [p. 9] de son voyage de Bretagne. […]
Samedi 12, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. Il souhaitoit que le Roi fit habiller de rouge tous les régiments irlandois et qu’ils eussent une paye plus forte que les françois, mais cela ne se fera point. Il souhaite aussi que le Roi fasse deux régiments de cavalerie des six cents cavaliers qui ont passé, et le Roi y consent. Il y aura outre cela deux compagnies de ses gardes à cheval et un régiment de dragons à pied. Le roi d’Angleterre compte qu’avec les Irlandois que commande milord Montcassel, et ceux qui viennent de passer avec Sarsfiels, il y aura vingt mille Irlandois dans le service de France.
[…]
[p. 21] Dimanche 10 [février], à Versailles. […] Le Roi a été cette après dînée à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 34] Vendredi 22, à Versailles. Le Roi envoie à Metz les Irlandois des deux compagnies des gardes du roi d’Angleterre et de ses deux régiments de cavalerie ; on y a déjà acheté leurs chevaux. Le roi d’Angleterre a choisi le duc de Berwick, son fils, et Sarsfield, qu’il a fait milord Lucan, pour commander ses deux compagnies des gardes ; et il a donné ses deux régiments de cavalerie, qui seront de trois cents chevaux chacun, à milord Galmoy, Irlandois, et l’autre à Shelton. […]
Samedi 23, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. Monsieur y mena madame la duchesse de Chartres.
[…]
[p. 38] Jeudi 28, à Versailles. […] Monseigneur alla avec madame la princesse de Conty dire adieu au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 44] Vendredi 14 [mars], à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 45] Dimanche 16, à Versailles. […] M. le Dauphin alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. M. le Dauphin a dit au roi d’Angleterre que le Roi comptoit avoir cette année en campagne, en Flandre, cent cinquante six mille hommes.
[…]
[p. 47] Mercredi 19, à Versailles. M. le duc du Maine épousa mademoiselle de Charolois à la messe du Roi. Sur les [p. 48] six heures, on entra dans l’appartement dès que le roi d’Angleterre fut arrivé. […] [p. 49] La reine d’Angleterre n’est point venue à toutes ces cérémonies de mariage parce que sa grossesse l’en a empêché. Elle ne sort pas même de sa chambre. […]
Jeudi 20, à Versailles. […] [p. 50] Milord Dumbarton est mort à Saint Germain. Il étoit premier gentilhomme de la chambre du roi d’Angleterre. Il avoit été général de ses troupes. Il avoit été lieutenant général en France, où il avoit servi longtemps sous le nom de milord Douglas. Il étoit frère du duc d’Hamilton et étoit chevalier de Saint André, qui est l’ordre d’Ecosse, et qui porte le cordon bleu comme les chevaliers de la Jarretière.
[…]
[p. 53] Vendredi 28, à Marly. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain. […]
[p. 54] Samedi 29, à Versailles. Le Roi alla tirer l’après dînée, et puis alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre, et revint ici sur les sept heures. Monseigneur courut encore le loup à Saint Germain et revint ici de bonne heure.
[…]
[p. 55] Lundi 31, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre, et madame la Princesse se servit de cette occasion là pour présenter madame la duchesse du Maine à la reine d’Angleterre. Les Petites Filles de France ni les princesses du sang n’y vont jamais que Monseigneur, Monsieur, ou Madame n’y soient, parce que la reine ne leur fait donner que des tabourets, et qu’ils prétendroient des chaises si Monseigneur, Monsieur ou Madame n’y étoient pas.
[…]
[p. 57] Lundi 7 [avril], à Versailles. Le Roi alla tirer, passa à Marly, où il se promena assez longtemps, et alla ensuite à Saint Germain voir la reine d’Angleterre, qui est assez incommodée. On craint qu’elle ne se soit blessée pour avoir trop longtemps été à genoux.
[…]
[p. 60] Lundi 14, à Versailles. […] Monseigneur alla à saint Germain dire adieu au roi d’Angleterre, qui part au plus tard dans huit jours.
[…]
[p. 61] Mercredi 16, à Versailles. […] On ne doute plus présentement que le roi d’Angleterre ne s’embarque et que le dessein ne soit de faire une descente en Angleterre ; cependant le prince d’Orange demeure tranquillement à Loo à chasser. Le roi d’Angleterre aura deux lieutenants généraux et trois maréchaux de camp dans ses troupes ; les lieutenants généraux sont Richard Hamilton, qui doit incessamment revenir d’Angleterre, où il étoit prisonnier, et milord Lucan, celui qui a amené les quatre mille Irlandois en ce pays ici. Les trois maréchaux de camps sont milord Galmoy, Shelton et Wacop.
[…]
[p. 62] Samedi 19, à Versailles. Le Roi a commandé à M. de Montchevreuil de demeurer, durant le voyage qu’on va faire, auprès de la reine d’Angleterre, qui sera bien seule quand le roi son mari sera parti ; la plupart des Anglois le suivent. Madame de Montchevreuil demeurera avec son mari. Le Roi est bien aise, durant son absence, d’avoir des gens de confiance auprès de la reine d’Angleterre. Sa grossesse va toujours bien ; elle n’a point été blessée, comme on l’avoit craint. […]
Dimanche 20, à Versailles. Le roi alla à Saint Germain dire adieu au roi d’Angleterre. […] Le roi d’Angleterre a fait trois chevaliers de la Jarretière : le prince de Galles, le duc de Powis, et milord Melford, qui étoit déjà chevalier de l’ordre de Saint André d’Ecosse. Le prince d’Orange, de son côté, fait des chevaliers, et a donné l’ordre à l’électeur de Bavière. […]
Lundi 21, à Versailles. Le roi d’Angleterre est parti de Saint Germain pour s’en aller en Normandie voir les Irlandois qui sont dans l’armée du maréchal de Bellefonds.
[…]
[p. 63] Jeudi 24, à Marly. […] [p. 64] Les Anglois qui étoient demeurés à Saint Germain après le roi d’Angleterre sont venus ici prendre congé du Roi et se préparent tous à aller s’embarquer avec le roi leur maître.
[…]
[p. 66] Mercredi 30, à Marly. Le Roi alla à Saint Germain avec la reine d’Angleterre, et arriva ici sur les six heures.
[…]
[p. 67] Vendredi 2 [mai], à Marly. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 72] Mercredi 7, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain avec madame la princesse de Conty dire adieu à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 84] Mardi 27, au camp devant Namur. […] La reine douairière d’Angleterre, en allant de Pontoise à Saint Denis, passa par dessus certaines formalités et alla à Saint Germain voir la reine sa belle sœur, avec qui elle fut deux heures. On avoit envoyé le prince de Galles sur son chemin au devant d’elle.
[…]
[p. 116] Mercredi 25 juin, devant le château de Namurs. […] [p. 117] L’armée qui étoit en Normandie est séparée. Le roi d’Angleterre est retourné à Saint Germain.
[…]
[p. 122] Mardi 1er juillet, devant le château de Namurs. […] On a eu nouvelles de Saint Germain que la reine d’Angleterre étoit accouchée d’une fille.
[…]
[p. 130] Vendredi 18, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. […]
Samedi 19, à Versailles. […] Monseigneur alla avec beaucoup de princesses à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 137] Mardi 5 [août], à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 143] Dimanche 10, à Marly. […] [p. 146] Monseigneur le Dauphin [p. 147] alla l’après dînée à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre, qui lui dirent que milord Montjoy a été tué [p. 148] au combat d’Enghien. C’est lui qui étoit à la Bastille et qui fut échangé il y a quelques mois contre Hamilton.
[…]
[p. 157] Samedi 23, à Versailles. Le Roi, Monseigneur, Monsieur, Madame, les princesses et toutes les dames allèrent à Saint Germain, où se fit la cérémonie du baptême de la petite princesse d’Angleterre, que le Roi et Madame tinrent sur les fonts. Elle fut nommée Louise-Marie.
[…]
[p. 168] Samedi 13 [septembre], à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf le matin à Marly et l’après dînée alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 178] Lundi 6 [octobre], à Fontainebleau. […] [p. 179] Les armateurs en Bretagne ont tant fait de prises depuis la déclaration de la guerre qu’on croit que M. de Chaulnes a eu pour sa part huit ou neuf cents mille francs. Il a le dixième, ayant les droits d’amirauté qui sont attachés au gouvernement de sa province. Quelques armateurs de Saint Malo ont pris des commissions du roi d’Angleterre et portent sa bannière. Par là, ce sera le roi d’Angleterre qui profitera de ce qui seroit revenu à M. de Chaulnes des prises qu’ils feront, et le Roi a permis aux armateurs d’en user ainsi.
Mardi 7, à Fontainebleau. Le roi et la reine d’Angleterre partirent de Saint Germain et arrivèrent ici ; ils ont amené plus de dames et une plus grosse Cour que l’année passée. Ils logent dans le grand appartement et on leur fait tous les mêmes traitements que les autres voyages. Le Roi mange toujours en public avec eux et toutes les princesses y mangent aussi. La reine est placée au milieu des deux rois. Le roi d’Angleterre a la droite partout. On jouera au lansquenet le jour d’appartement parce que la reine aime ce jeu là.
[…]
[p. 195] Jeudi 6 [novembre], à Marly. […] Monseigneur est allé courre le loup dans la forêt de Saint Germain, mais il n’en trouva point et il revint dîner ici.
[…]
[p. 197] Mardi 11, à Versailles. Monseigneur alla sur les dix heures du matin voir une course de chevaux qui se faisoit au Pecq ; le roi et la reine d’Angleterre y étoient. La course fut fort belle et le cheval du grand prieur gagna de deux longueurs de cheval. Le Roi alla, l’après dînée, à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 205] Mercredi 3 [décembre], à Marly. […] Monseigneur alla à Saint Germain avec la princesse de Conty voir le roi et la reine d’Angleterre, et puis vint ici.
[…]
[p. 221] Lundi 12 [janvier 1693], à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 228] Vendredi 30, à Versailles. […] Monseigneur courut le cerf dans la forêt de Saint Germain avec les [p. 229] chiens du duc du Maine. Daunai, premier écuyer de M. le duc du Maine, fit une chute dont il est en grand danger.
[…]
[p. 235] Vendredi 13 [février], à Marly. Le Roi alla l’après dînée voler dans la plaine de Vésinet. Les princesses étoient à cheval, le roi et la reine d’Angleterre étoient à la volerie, et le prince de Danemark étoit allé à Saint Germain prendre congé de LL. MM. BB. et s’y trouva aussi, et le Roi lui fit donner des chevaux pour avoir le plaisir de la chasse.
[…]
[p. 250] Mercredi 25 [mars], à Versailles. […] La reine d’Angleterre, qui étoit assez malade ces jours ci, se porte considérablement mieux. […]
[p. 251] Jeudi 26, à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. […]
Vendredi 27 mars, à Versailles. […] [p. 252] Le Roi alla l’après dînée à Marly et à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. La reine se porte beaucoup mieux.
[…]
[p. 256] Jeudi 16 [avril], à Versailles. Le Roi donna, le matin, une longue audience dans son cabinet à milord Middleton, qui s’est sauvé d’Angleterre. Il a passé en Hollande déguisé et de là est venu ici sans être reconnu. Il étoit secrétaire d’Etat sous le feu roi d’Angleterre et, sous celui-ci, il étoit relégué chez lui dans la contrée depuis que le prince d’Orange est maître du pays.
[…]
[p. 271] Jeudi 23, à Marly. Le Roi se promena le matin dans ses jardins et alla l’après dînée voir à Saint Germain le roi et la reine d’Angleterre. […] Le roi d’Angleterre a fait milord Middleton son premier ministre et chef de son conseil. Il sera devant milord Melford, qu’il n’a point fait de difficulté de lui céder. Les Anglois ont beaucoup de confiance en milord Middleton ; il a toujours passé pour homme de beaucoup d’esprit et de beaucoup de probité. Il assure que le prince d’Orange a laissé vingt cinq mille hommes de ses meilleures troupes en Angleterre.
[…]
[p. 286] Jeudi 14, à Versailles. Le Roi et Monseigneur se promenèrent dans les jardins ; Monseigneur avoit été à Saint Germain, l’après dînée, dire adieu au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 288] Samedi 16, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain dire adieu au roi et à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 315] Mardi 30 [juin], à Versailles. […] Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 344] Jeudi 20 [août], à Versailles. […] Le roi d’Angleterre a donné la charge de capitaine de ses gardes à milord Lancarty, qui fut pris en Irlande et qui est encore prisonnier en Angleterre ; c’est la charge qu’avoit milord Lucan.
[…]
[p. 358] Dimanche 13 [septembre], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 359] Mardi 15, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 383] Samedi 24 [octobre], à Versailles. […] Le roi d’Angleterre a donné au chevalier Scott le régiment d’infanterie de la reine sa femme, que commandoit Wacop, tué à la Marsaglia. Le chevalier Scott est un vieil officier qui a longtemps servi en France et c’est lui qui, en Irlande, défendit Kinsale contre le prince d’Orange.
[…]
[p. 385] Mercredi 28, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 386] Vendredi 30, à Versailles. […] Monseigneur alla avec madame la princesse de Conty à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 397] Mardi 17 [novembre], à Versailles. […] Le roi d’Angleterre a donné les deux régiments de dragons qui vaquoient dans ses troupes, le sien et celui de la reine, l’un à milord Kilmaluc et l’autre à milord O’Brien. Kilmaluc étoit lieutenant colonel du régiment de ses gardes, et O’Brien étoit lieutenant d’une compagnie des gardes du corps. O’Brien est devenu milord par la mort de son frère aîné, mort de maladie depuis quinze jours, qui étoit colonel d’un des trois régiments irlandois dont le Roi dispose sans que le roi d’Angleterre s’en mêle, et Sa Majesté a donné ce régiment à un ancien lieutenant colonel irlandois nommé Lee.
[…]
[p. 402] Jeudi 26, à Versailles. Le Roi alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 409] Jeudi 10 [décembre], à Versailles. […] Monseigneur alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 412] Vendredi 18, à Marly. […] Monseigneur courut le loup dans la forêt de Saint Germain.
[…]
[p. 439] Samedi 16 [janvier 1694], à Versailles. […] Monseigneur alla de Marly à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 459] Vendredi 5 [mars], à Versailles. […] Monseigneur alla courre le cerf à Saint Germain avec les chiens de M. le duc du Maine, qui lui donna à dîner au retour de la chasse, dans sa maison de Saint Germain.
[…]
[p. 484] Jeudi 29 [avril], à Trianon. On a vu le Roi ce matin à son lever et à sa messe, comme à Versailles. Il a tenu conseil ce matin à son ordinaire, et après dîner il a été à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[tome 5, p. 17] Jeudi 27 [mai], à Versailles. Le roi d’Angleterre a ôté à milord Milford la place de premier ministre qu’il avoit auprès de lui avec son entière confiance. Il y avoit à Saint Germain une cabale fort opposée à lui et, outre cela, tous les serviteurs que le roi d’Angleterre conserve en ce pays là accusoient ce milord de ne pas être assez fidèle à son maître. On croit que le milord Greffin, nouvellement arrivé de Londres, a achevé de déterminer S. M. B. à ce changement dans son conseil.
[…]
[p. 20] Mercredi 2 [juin], à Marly. […] L’après dînée, Sa Majesté alla à Saint Germain voir le roi et la reine d’Angleterre. On croit que LL. MM. BB. récompenseront milord Milford de quelque nouveau titre. Quoiqu’ils lui ôtent la place de leur premier ministre, ils ne laissent pas de paraître content de lui. On ne doute pas que sa place ne soit donnée à milord Middleton.
[…]
[p. 33] Jeudi 24, à Trianon. […] Hier, le Roi alla à Saint Germain avec les dames voir le roi et la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 44] Mercredi 14 [juillet], voyage de Marly. Le Roi partit l’après dînée de Trianon, alla voir le roi et la reine d’Angleterre à Saint Germain, et arriva ici de bonne heure.
[…]
[p. 45] Vendredi 16, à Marly. Le Roi se promena tout le matin dans ses jardins ; après dîner, il alla tirer à Saint Germain d’où il ne revint qu’à neuf heures.
[…]
[p. 47] Mercredi 21, à Marly. […] [p. 48] Le Roi alla à Saint Germain avec les dames. Il les laissa aller faire leur cour à la reine d’Angleterre et il monta dans sa calèche pour aller tirer au bout de la forêt. En revenant de la chasse, il reprit les dames au château neuf chez madame de Montchevreuil.
[…]
[p. 72] Vendredi 3 [septembre], à Marly. […] Le Roi a ordonné beaucoup de routes nouvelles dans la forêt de Saint Germain, où il veut pouvoir courre le cerf en calèche comme dans la forêt de Marly.
[…]
[p. 102] Vendredi 5 [novembre], à Marly. Le Roi alla courre le cerf dans la forêt de Saint Germain, où il a fait force routes nouvelles. Madame vint de Paris à la chasse.
[…]
[p. 116] Mardi 7 [décembre], à Versailles. […] Il y a eu une batterie à Saint Germain entre des Anglois, gens de condition, et des enfants de quelques [p. 117] officiers du Roi ; deux Anglois ont été blessés à mort ; un de ceux là étoit gouverneur du château de Basse, à l’embouchure du Leith en Ecosse, qui est la dernière place qui ait tenu pour le roi d’Angleterre, et l’autre

Courcillon, Philippe (de)

Récit du décès de Jacques II à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 369] Vous attendez, sans doute, un détail de la maladie, de la mort et du convoy de Jacques II, roy d’Angleterre ; il faut vous satisfaire sur tout cela.
Depuis un anthrax que ce prince eut il y a deux ans, qui suppura fort peu, et quelques légers mouvemens de goutte, sa santé parut fort ébranlée ; mais [p. 370] cela devint beaucoup plus sensible après une attaque d’apoplexie imparfaite, qui fut suivie de la foiblesse de tout un côté, et de la paralysie de quelques doigts, arrivée au Carême dernier. Ses forces estoient fort diminuées, il maigrissoit de jour en jour, et contre son ordinaire il paroissoit plus pesant et plus assoupi. A tous ces accidens, il estoit survenu, il y a quatre mois, un crachement de sang, fort léger dans son commencement et qui devient par la suite plus sensible.
S. M. B. estoit dans cet estat le vendredy 2 de septembre qu’il luy prit une grande foiblesse, dont Elle revint par le secours des cordiaux. Dans ce moment, la fièvre s’éveilla avec l’assoupissement [p. 371] qui a conduit ce prince jusqu’au tombeau.
Le dimanche, troisième jour de son mal, une seconde foiblesse le mit dans un estat si pressant que l’on eust d’abord recours aux derniers sacremens. Le pouls luy revint un peu après un vomissement d’un sang retenu depuis quelque temps dans l’estomac, comme il paroissoit à la couleur et à l’odorat. Le pouls néanmoins, qui estoit resté embarassé, se trouva dégagé par une pareille évacuation procurée par le moyen d’un remède que M. Fagon luy fit donner. Ce remède, posé à propos, le fit un peu reposer et donna quelque espérance.
Le lundy, quatrième jour de [p. 372] son mal, et cinquième du mois, un léger purgatif luy fit rendre beaucoup de sang retenu.
Le même jour après midy, le Roy alla le voir. Sa Majesté britannique le supplia de trouver bon qu’Elle fust enterrée dans l’église paroissiale de Saint Germain en Laye. Le Roy en parla à la reine d’Angleterre, et l’on ne jugea pas à propos de répondre à ce qu’une profonde humilité luy faisoit dire. Ce prince recommanda ce jour là au Roy les regimens irlandois qui sont à son service.
Il demeura assez tranquille le mardy.
Le mercredy, apres l’usage de quelques remedes propores à arrester l’hemorragie, cet accident [p. 373] cessa absolument, et la fievre diminua de beaucoup.
Le jeudy se passa dans redoublement. Il survint un flux d’urine, ce qui fit concevoir quelque esperance.
Le vendredy, huitieme jour du mal de ce prince, la fievre augmenta, sa langue devint seche, l’assoupissement ne diminua point, et l’on apperçut que le flux d’urine devenoit involontaire et que la paralysie gagnoit la vessie. Un purgatif qui luy fut donné alors fit connoistre que cet engourdissement se communiquoit aux entrailles. On perdit des ce moment toute esperance, les accidens allerent toujours en augmentant, et les remedes furent sans effet.
[p. 374] Ce prince se trouva si mal la nuit du 12 au 13 qu’on craignit qu’il ne mourust avant qu’elle fust passée. Sa Majesté demanda le viatique pour la seconde fois, et le reçut sur les cinq heures du matin avec une piété exemplaire. On luy avoit donné l’extrême onction trois heures après midy en même temps que le viatique. Le prieur curé de Saint Germain s’acquitta de toutes ces fonctions d’une manière très édifiante.
Le même jour 13, après midy, le Roy alla voir pour la dernière fois ce prince mourant, et déclara proche de son lit, et en présence de la reine et de plusieurs seigneurs des deux Cours, que si Dieu disposoit de Sa Majesté [p. 375] britannique, il reconnoistroit et traiteroit monsieur le prince de Galles comme roy d’Angleterre, d’Ecosse et d’Irlande. Sa Majesté britannique, qui estoit dans un grand assoupissement, n’en fut point tirée par les mouvemens que ces paroles causerent dans la chambre, ou peut estre qu’estant toujours en meditation, en attendant le moment de la mort, Elle ne voulut pas interompre, pour les choses de ce monde, le sacrifice qu’Elle faisoit alors de son âme à Dieu. Tous les milords, en fondant en larmes, se jetterent aux genoux du Roy pour le remercier. Ils reconduisirent Sa Majesté en cet état, avec des acclamations qui témoignoient [p. 376] leur reconnoissance et leur affliction, et le mélange de joye et de tristesse qui paroissoit sur leur visage, ayant quelque chose d’aussi vif pour la joye que pour la douleur, on ne scavoit si l’on devoit se réjouir ou s’affliger avec cette Cour, qui pour trop sentir, ne pouvoit bien démeller elle-même ce qu’elle sentoit. La nuit du 13 au 14, on crut que ce prince alloit expirer, les redoublemens estans devenus plus frequens et plus dangereux. On reïtera plusieurs fois la recommendation de l’âme, ce qui fut fait alternativement par les aumôniers de Sa Majesté britannique et par le curé de Saint Germain. Cependant, Sa Majesté conservoit une connoissance parfaite [p. 377] qui continua jusques aux derniers momens ;
Madame la duchesse de Bourgogne alla le voir le 14 à trois heures après midy. Ce prince la remercia avec beaucoup de présence d’esprit et la pria de passer chez la Reine, à cause de la mauvaise odeur qui estoit dans sa chambre.
Monseigneur le duc de Bourgogne l’alla voir le 15, sur les dix heures et demie du matin. Lorsque ce prince y arriva, on disoit pour la cinquième fois les prières des agonisans. Sa Majesté britannique, après l’avoir remercié de sa visite, le pria de trouver bon que l’on continuast les prières. Madame l’alla voir l’après dinée du même jour, à l’issue [p. 378] de son dîner. Il entroit souvent dans une espèce de létargie, et lorsqu’on le reveilloit de son assoupissement, il répondoit juste et reconnoissoit tout le monde. Il avoit commencé le jeudy au soir à prononcer avec peine.
Le même vendredy 16 que ce prince reçut tant de visites et qu’il avoit ouy la messe dans sa chambre, ainsi que les jours précédens, il tomba dans une douce agonie sur les deux heures et demie après midy, et à trois heures et un quart, il expira sans aucun effort, ayant la bouche riante, ce qui continua d’une manière sensible quelques momens après sa mort. On observa, comme une chose digne de remarque, et dont [p. 379] il y a peu d’exemples, qu’en quinze jours que ce prince avoit passez dans le lit de la mort, aussi tourmenté des remèdes qu’on luy donnoit que de sa maladie, il ne luy estoit pas échapé le moindre mouvement d’impatience, de répugnance ny même d’inquiétude, estant dans une méditation presque continuelle et ne parlant qu’autant qu’il estoit absolument nécessaire et que la charité le demandoit. Sa piété n’avoit rien ny d’austère ny de rude. Je n’entre point dans les choses touchantes et plus édifiantes encore qu’il a dites à la reine pendant les quinze jours qu’a duré sa maladie ; elles sont au dessus de toutes sortes d’expression. La manière dont il a parlé à monsieur le [p. 380] prince de Galles n’est pas moins digne d’admiration, et moins difficile à exprimer. Il luy a fait voir par des discours aussi touchans que chrétiens qu’il ne devoit point mettre la couronne en parallèle avec la religion et l’a conjuré de ne le faire jamais. Il a protesté tout haut qu’il pardonnoit sincérement et de tout son cœur à tous ceux qui luy avoient causé tant de mal, et qu’il prioit Dieu qu’il leur pardonnast, en ajoutant qu’il leur avoit de grandes obligations, puisqu’ils estoient peut estre la cause de son salut qu’il esperoit. Il a tenu ces discours plus d’une fois et les a renouvellez en recevant le viatique. Ce n’est point l’état où il se trouvoit, et [p. 381] l’assurance d’une mort certaine qui l’ont fait parler ainsi, puisque depuis le commencement de ses malheurs jusqu’au moment de sa mort les chagrins qu’il ressentoit, peut estre plus pour sa famille que pour luy, n’ont jamais esté cause qu’il luy soit rien échapé contre les auteurs de tous ses maux. Il s’estoit mis pendant tout le cours de sa vie par une fermeté héroïque au dessus de toutes les disgraces qui luy estoient arrivées, et toutes les fois qu’il s’estoit agy de la religion, il avoit fait voir une constance digne des anciens chrétiens. Il estoit d’une valeur intrépide et il en a donné des preuves en plusieurs batailles, tant sur terre que sur mer, mais ce [p. 382] n’est pas icy le lieu de s’étendre sur des choses qui regardent ceux qui travailleront à son histoire.
Lorsque ce prince fut expiré, M. Desgranges, maistre des cérémonies de France, fit exposer son corps à la vue du peuple. Le clergé de la paroisse de Saint Germain, les recolets qui sont dans le même lieu et les augustins des Loges, au nombre de douze qui se relevoient de temps en temps, formerent deux chœurs, qui psalmodierent toute la nuit, et le matin on commença à célébrer des messes sur deux autels dressez dans la même chambre où estoit le corps.
Le samedy 17, sur les quatre heures après midy, on l’ouvrit et on l’embauma. On luy trouva [p. 383] très peu de sang, et presque réduit en eau, tous les visceres, les entrailles et même le cœur fletris et extenuez. A l’ouverture du crane il sortit une tres grande quantité de serositez et les ventricules du cerveau étoient absolument plein d’eau.
Son corps fut porté le soir, avec peu de cérémonie, aux bénédictins anglois du fauxbourg Saint Jacques, où il doit rester en dépost jusqu’à ce qu’on résolve où il sera inhumé. Son cœur a esté porté au couvent de Sainte Marie de Chaliot, où est celuy de la feue reine sa mère. Son convoy n’étoit composé que de trois carosses. Dans le premier, précédé de quatre gardes du corps qui portoient des flambeaux, étoient [p. 384] un aumônier, qui portoit le cœur du Roy, le père Sandun, confesseur de Sa Majesté, son compagnon, un autre aumônier, deux chapelains et le prieur de Saint Germain. Dans le second estoit le corps de ce prince, et M. du Vinet, exempt des gardes du corps de Sa Majesté Très Chrétienne. Vingt six gards du corps marchoient devant et derrière, avec des flambeaux. Le convoy estoit terminé par un troisième carosse, dans lequel estoient M. le duc de Barwik, Mr Porter, vice chambellan de Sa Majesté britannique, milord Hamilton, Mr Desgranges, Mr Hamilton, maistre de la garde robe, et Mr Ploiden, controlleur de la Maison de [p. 284] Sa Majesté. Mr d’Ingleton, aumônier de la semaine, fit un discours en latin en remettant le corps du roy entre les mains du prieur des bénécitins, qui répondit en la même langue, et ces discours furent trouvez fort touchans. Le corps couvert d’un poele fut mis sous un dais dans une chapelle tenue de noir. Le même cortège qui avoit esté aux bénédictins accompagne le cœur jusqu’à Sainte Marie de Challiot. Le même Mr Ingleton fit aussi un très beau discours en remettant le cœur entre les mains de la supérieure, qui y répondit avec beaucoup d’esprit.
Je dois ajouter icy qu’aussitost que le Roy fut expiré, M. [p. 386] le prince de Conty, qui depuis quelques jours n’avoit point quitté Saint Germain, estant parent de la reine, eut l’honneur de saluer le jeune roy. M. le nonce dit à ce nouveau monarque qu’il avoit ordre de Sa Sainteté de le reconnoistre après la mort du roy son père, et M. l’abbé Rizzini, envoyé de Modène, luy fit le même compliment de la part du duc son maistre.
Le 20, le Roy alla à Saint Germain, et il monta d’abord chez le roy d’Angleterre, qui l’attendit au haut du grand escalier en long manteau et conduisit Sa Majesté dans son appartement en prenant la main gauche. Il se trouva deux fauteuils, et le Roy s’assit dans celuy qui estoit [p. 387] à la droite. La visite fut courte. Sa Majesté britannique conduisit le Roy, qui l’empescha d’aller aussi loin qu’il auroit souhaité. Le Roy alla ensuite chez la reine, qui estoit au lit, et demeura près d’une heure avec cette princesse. Madame la duchesse de Bourgogne arriva pendant ce temps là, accompagnée de madame la Princesse, de madame la Duchesse, de mademoiselle d'Angu’en et des dames du palais de madame la duchesse de Bourgogne. Elles estoient toutes sans mantes, parce que la visite n’estoit pas de cérémonie. Madame la duchesse de Bourgogne alla d’abord chez Sa Majesté britannique, qui la reçut à la porte de sa chambre. Elle y resta peu de temps, et ne [p. 388] s’assit point. Cette princesse alla ensuite chez la reine, où elle trouva le Roy, qu’elle y laissa. Après cette courte visite, cette princesse alla chez madame la princesse d’Angleterre, où elle resta debout. Monseigneur le Dauphin et madame la princesse de Conty douairière y arrivèrent de Meudon une demi heure après. Le Roy, avant que de partir, alla chez madame la princesse d’Angleterre, messeigneurs les ducs de Bourgogne et de Berry, monsieur le duc et madame la duchesse d’Orléans, monsieur le Prince, monsieur le Duc et madame la Duchesse, madame la princesse de Conty et généralement tout ce qu’il y a de personnes de distinction [p. 289] à la Cour ont esté faire des complimens au roy, à la reine et à madame la princesse d’Angleterre.
Le 21, Sa Majesté britannique rendit visite au Roy à Versailles et à madame la duchesse de Bourgogne. Cette princesse étant alors à la messe, Sa Majesté l’attendit dans son appartement. Monseigneur le Dauphin et messeigneurs les ducs de Bourgogne et de Berry estoient partis pour Fontainebleau.
Je ne dois pas finir cet article sans vous dire que tous ceux qui ont vu ce jeune roy en sont charmez. Son air, ses manières et son esprit frapent d’abord également tous ceux qui ont l’honneur de l’approcher. Tout est en [p. 390] ce jeune monarque infiniment au dessus de son âge, et quoy qu’il doive beaucoup au sang dont il est sorti, il ne doit pas moins à son éducation. »

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la Cour d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, mercredi 12 janvier 1689
Vous etes retirée à cinq heures du roi ; vous avez donc fait vos rois à dîner : vous etiez en fort bonne compagnie, et aussi bonne qu’à Paris. Il ne tiendra pas à moi que l’archevêque [d’Aix] ne sache que vous etes contente de lui ; je le dis l’autre jour à madame de La Fayette, qui en fut fort aise ; elle a resolu que vous ne preniez point tous deux l’esprit ni les pensées de Provence.
Mais parlons du roi et de la reine d’Angleterre ; c’est quelque chose de si extraordinaire d’avoir là cette Cour, qu’on s’en entretien sans cesse. On tache de regler les rangs et de faire vie qui dure avec gens si loins d’etre retablis. Le Roi disoit l’autre jour, et que ce roi etoit le meilleur homme du monde, qu’il chassoit avec lui, qu’il viendroit à Marly, à Trianon, et que les courtisans devoient s’y accoutumer. Le roi d’Angleterre ne donne pas la main à Monseigneur et ne le reconduit pas. La reine n’a point baisé Monsieur, qui en boude ; elle a dit au Roi : Dites moi comment vous voulez que je fasse ; si vous voulez que ce soit à la mode de France, je saluerai qui vous voudrez : pour la mode d’Angleterre, c’est que je ne baisois personne. Elle a été voir madame la Dauphine, qui est malade et qui l’a reçue dans son lit. On ne s’assied point en Angleterre ; je crois que les duchesses feront avec elle à la mode de France, comme avec sa belle mère. On est fort occupé de cette nouvelle Cour.
Cependant le prince d’Orange est à Londres, où il fait mettre des Mylords en prison ; il est severe et il se fera bientot hair. M. de Schomberg est general ds armées en Hollande, à la place de ce prince, et son fils a la survivance : voilà le masque bien levé. »

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la Cour d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, mercredi 26 janvier 1689
[…] Peut etre que le prince d’Orange n’aura pas le tems cette année de songer à la France ; il a des affaires en Angleterre et en Irlande, où l’on veut armer pour le Roi : nos mers sont toutes emues, il n’y a que notre Mediterranée qui soit tranquille. Je ne sais à qui en ont vos femmes avec leurs vœux extravagans ; je voudrois y ajouter de ne plus manger d’oranges et de bannir l’oranger en arbre et en couleur : ce devroit être sur nos cotes que l’on fit toutes ces folies.
Je crois, en verité, que le roi et la reine d’Angleterre sont bien mieux à Saint Germain que dans leur perfide royaume. Le roi d’Angleterre appelle M. de Lauzun son gouverneur, mais il ne gouverne que ce roi, car d’ailleurs sa faveur n’est pas grande. Ces Majestés n’ont accepté de tout ce que le Roi vouloit leur donner que cinquante mille francs, et ne veulent point vivre comme des rois ; il leur est venu bien des Anglois, sans cela ils se reduiroient encore à moins : enfin, ils veulent faire vie qui dure. »